18 recommandations pour la transparence nucléaire

Le 7 novembre 2008, le Président du Haut comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire (HCTISN) a remis au ministre de l’Energie un rapport sur le suivi radioécologique des eaux autour des installations nucléaires et sur la gestion des anciens sites d’entreposage de déchets radioactifs. Le rapport formule 18 recommandations pour améliorer l’information, la transparence et la concertation avec les parties prenantes.

Suite à l‘incident survenu en juillet dans l’usine Socatri de Bollène, Jean-Louis Borloo a commandé un rapport au Haut comité, devant porter sur :

– le suivi radio-écologique de l’ensemble des sites nucléaires ;
– la gestion des anciens sites d’entreposage de déchets radioactifs.

Selon les rapports de synthèse présentés par l’ASN, l’ASND et l’IRSN dans le cadre de la saisine
du Haut comité, l’état radiologique des nappes phréatiques sous et autour des sites nucléaires "ne pose pas de problème significatif de nature environnementale ou sanitaire", c’est-à-dire appelant des précautions particulières pour le voisinage et le public en général.

Cette appréciation globale est précisée par une description des marquages radiologiques identifiés dans l’environnement d’un certain nombre de sites nucléaires. Ces marquages sont pour la plupart soit liés à des activités anciennes, alors que les préoccupations environnementales étaient moins fortes et les normes moins contraignantes, soit liés à des incidents d’exploitation ponctuels. Dans quelques cas, le rapport n’exclut pas des apports continus de substances radioactives alimentant ces pollutions préexistantes.

L’état des nappes et des eaux superficielles autour des sites nucléaires est aujourd’hui globalement bien connu, indique le Haut Comité. Les pollutions ou contaminations identifiées font l’objet de longue date d’une surveillance renforcée et, si nécessaire, d’investigations et d’actions visant à limiter leur extension ou à les résorber.

C’est notamment le cas sur les sites suivants (mentionnés dans les rapports de l’ASN, de l’ASND et de l’IRSN) : La Hague (ANDRA-AREVA), Marcoule (CEA), Saclay (CEA), Tricastin (AREVA), Veureyvoroize (SICN), Valduc (CEA), Bruyères-le-Chatel (CEA).

Enfin, si la saisine porte en premier lieu sur les INB (Installations Nucléaires de Base), le Haut comité constate que des sites d’entreposage de déchets connexes à certaines ICPE (Installations Classées sous Protection Environnementale) qui participent au cycle du combustible nucléaire méritent également une attention renforcée. C’est notamment le cas des lagunes d’entreposage de déchets du site Comurhex de Malvesi.

Information, transparence et concertation

Le Haut comité constate qu’il est difficile, pour le public, d’appréhender la situation radioécologique des sites nucléaires et des anciens entreposages de déchets. Le Haut comité constate qu’il existe une information abondante et diversifiée, souvent disponible depuis longtemps, mais qu’elle est cependant éparse, disparate, compartimentée et qu’elle peut, dans un certain nombre de cas, être difficile d’accès.

Dans ce rapport, le Haut comité formule des recommandations pour permettre une information plus accessible et jugée plus crédible aux yeux du public. 

18 recommandations

Le Haut comité constate qu’il reste essentiel d’améliorer la concertation avec les populations. Dans cette perspective, les commissions locales d’information récemment reconnues dans la loi occupent une place essentielle (tout comme les commissions d’information mises en place depuis 2001 autour de chaque INBS).

En effet, leur rôle est triple :
– assurer la vigilance nécessaire autour des sites nucléaires et encourager l’ensemble des acteurs à se placer dans une démarche de progrès permanent;
– favoriser la concertation au niveau local pour améliorer la qualité du dialogue entre les parties
prenantes ;
– être un relais d’information efficace dans la durée, impartial et objectif.

Les recommandations du Haut comité seront de nature à développer ces trois axes.
Au-delà, le Haut comité considère qu’il est essentiel de développer une capacité d’expertise diversifiée et indépendante des organismes aujourd’hui couramment impliqués dans l’évaluation des dossiers de la filière nucléaire.

Ce chantier pourrait cependant trouver une première application concrète dans le domaine de la surveillance de l’impact radioécologique des installations nucléaires en faisant appel à des laboratoires agréés indépendants des experts classiques de la filière nucléaire (ex. laboratoires universitaires, laboratoires d’associations de protection de l’environnement…).

Le Haut Comité précise qu’il ne remet pas en cause la qualité des expertises réalisées dans le domaine du nucléaire, et considère que la diversification des sources d’expertise permettra de crédibiliser aux yeux du public l’information délivrée aux populations.

Afin d’améliorer l’information, la transparence et la concertation, le Haut comité formule les 18
propositions suivantes. Elles s’adressent à l’ensemble des parties prenantes concernées par ces questions.

Recommandation n°1 : Le Haut comité recommande la création d’un portail internet facilitant l’accès du public aux informations relatives au suivi radioécologique des sites nucléaires.

Recommandation n°2 : Le Haut comité recommande que le processus de rénovation des enquêtes publiques engagé à la suite du Grenelle de l’environnement soit mené activement avec une application prioritaire au domaine nucléaire en engageant sans attendre des expérimentations volontaires (mise en ligne des dossiers sur internet…).

Recommandation n°3 : Le Haut comité recommande que les travaux en cours sur la réglementation générale et les guides applicables aux INB répondent à l’objectif d’une information plus homogène pour le public.

Recommandation n°4 : Le Haut comité recommande que la qualité d’information des fiches relatives aux sites d’entreposage contenues dans « l’inventaire déchets » tenu par l’ANDRA soit harmonisée en référence aux fiches les plus détaillées.

Recommandation n°5 : Le Haut comité recommande que les travaux engagés par l’ASN pour étudier et développer une échelle de communication adaptée aux cas de pollution radiologique de l’environnement aillent rapidement à leur terme.

Recommandation n°6 : Le Haut comité recommande de mieux associer les acteurs locaux (et
notamment les CLI) au suivi radioécologique des installations nucléaires (par exemple en les associant davantage aux campagnes de prélèvement d’échantillons et d’analyses, dans le cadre de conventions) ;

Recommandation n°7 : Le Haut comité recommande de développer une capacité d’expertise diversifiée, et indépendante des organismes aujourd’hui couramment impliqués dans l’évaluation des dossiers de la filière nucléaire.

Recommandation n°8 : Le Haut comité recommande que les laboratoires (universitaires, associatifs…) ayant développé des capacités d’analyse sollicitent les agréments nécessaires à la réalisation des analyses réglementaires de façon à ce que les exploitants et les autorités puissent faire appel à eux.

Recommandation n°9 : Le Haut comité recommande que, pour les sites exigeant une surveillance renforcée, les CLI procèdent à un état des lieux de l’information délivrée et qu’elles réalisent, le cas échéant, une mise à jour de l’information des populations environnantes.

Recommandation n°10 : Le Haut comité recommande que les exploitants des anciens sites
d’entreposage de déchets radioactifs présentent régulièrement à la CLI l’inventaire des substances entreposées, les résultats de surveillance de leur impact environnemental, les mesures mises en œuvre pour réduire leur impact et les échéanciers associés, et qu’une concertation entre les parties prenantes soit menée autour de ces sites.

Recommandation n°11 : Le Haut comité recommande que, lorsque les enjeux environnementaux ou sociétaux sont importants, une CLI soit créée autour des anciens sites d’entreposage qui n’en disposent pas.

Recommandation n°12 : Le Haut comité recommande que les CLI disposent d’un site internet
d’information.

Recommandation n°13 : Le Haut comité recommande le développement des inter-comparaisons des bonnes pratiques en matière d’information.

Recommandation n°14 : Le Haut comité recommande un développement de la démarche
d’harmonisation de l’information du public en matière de gestion des sites et sols pollués et de remise en état des sites miniers.

Recommandation n°15 : Le Haut comité recommande que le site internet BASIAS développé par le ministère en charge de l’écologie relatif aux anciennes industries ou activités de service, soit étendu aux sites industriels susceptibles d’être concernés par des pollutions de nature radioactive.

Recommandation n°16 : Le Haut comité recommande que, dans l’environnement des sites nucléaires où des marquages appellent un suivi renforcé, une information des populations soit réalisée notamment en ce qui concerne l’utilisation de puits et de système d’irrigation (et que l’eau des puits soit analysée périodiquement).

Recommandation n°17 : Le Haut comité recommande que l’information sur la surveillance des eaux souterraines des INB, des INBS et des sites d’entreposage de déchets… s’intéresse aussi bien aux substances chimiques que radiologiques.

Recommandation n°18 : Le Haut comité recommande d’intensifier les efforts engagés en application de la loi sur l’eau et les milieux aquatiques pour évaluer, sur l’ensemble des compartiments de l’environnement (eaux, sédiments…), l’impact cumulé des installations qui rejettent dans un même bassin versant.

[Voir en ligne : le rapport du HCTISN]

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Achillee

Marche pour la transparence sur le nucléaire 30 avril 15h Bastille Le drame que vit le Japon nous montre peu à peu que le nucléaire est entouré de secret : – TEPCO accumule les mensonges depuis des années …- L’OMS est empêchée de travailler sur les effets des radiations sur la santé – Les MEDIAS ont du mal à obtenir des informations fiables – Le PUBLIC dispose de données tronquées entretenant la confusion Pour mettre fin à cette situation inacceptable, nous appelons à une grande marche citoyenne pour la transparence sur le nucléaire le 30 avril à Paris. Tribune au départ de la marche avec les intervenants des assos : Echo-Echanges France-Japon, la Criirad, Les Enfants de Tchernobyl… Nous sommes tous concernés : citoyens sans étiquette, militants, associations et partis politiques. Retrouvons-nous à 15h devant l’Opéra Bastille pour réunir nos énergies