561 marées noires dans les eaux intérieures françaises

"Robin des Bois" , l’association généraliste de protection de l’Homme et de l’environnement  vient de dévoiler son "atlas des marées noires dans les eaux intérieures" françaises. Loin d’être exhautif, cet inventaire national a au moins, le mérite d’exister.

La cartographie et l’inventaire reflètent l’indifférence aux impacts environnementaux de ces pollutions de routine et à leurs préjudices écologiques. L’absence de mémorisation des pollutions dispense les pouvoirs publics, les collectivités et les services de police et de gestion de l’eau d’entreprendre les indispensables mesures de prévention,d’information, de pédagogie, d’investigation et si nécessaire de répression.

Les marées noires dans les eaux douces relèvent de la négligence : les citernes vétustes ou abandonnées fuient dans les entreprises, les établissements publics et chez les particuliers ; le segment routier – entreprises de transport, accidents de la route, et fuite de stations-service – est un contributeur important suivi par la corporation des distributeurs livreurs de fuel et par les dégazages de péniches et de bateaux de loisirs dont les effets dévastateurs restent masqués et impunis. Il faut une égalité de traitement entre le dégazage en mer et le dégazage en rivière. Des actes de malveillance, de vandalisme, de vengeance peut-être, des vols de carburants, des synergies de j’m’en foutisme et d’ignorance aboutissent aux pollutions directes ou indirectes des rivières et autres cours d’eau ; le tiers des marées noires est déclaré d’origine inconnue.

561 marées noires dans les eaux intérieures françaises

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Les hydrocarbures** rejetés dans les eaux douces – peut-on encore les qualifier de douces ? sont des produits neufs ou des déchets, des huiles de vidange, des huiles à usage industriel. Ils peuvent cacher des PCB. Selon les observations de Robin des Bois corroborées par les statistiques du CEDRE (Centre de Documentation, de Recherches et d’Expérimentation sur les pollutions accidentelles des eaux) dans son bulletin d’information de mai 2007, les déversements d’hydrocarbures dans les sources, les ruisseaux, les rivières, les fleuves, les plans d’eau et les canaux représentent environ 50% des pollutions aquatiques accidentelles.

L’autre moitié est constituée par des déversements de substances diverses en provenance du secteur agricole – effluents d’élevage, résidus phytosanitaires et de traitement de récolte –, du secteur des transports – épandages après accidents –, du secteur industriel et du dysfonctionnement des réseaux de collecte et d’assainissement des eaux pluviales et usées.

Faute de transmission, de centralisation et d’interprétation des informations, les pollutions accidentelles des eaux douces – un des facteurs amont de la pollution des eaux marines – sont courantes et oubliées. Robin des Bois est l’un des seuls à s’y intéresser et à percevoir la portée nationale et internationale de ces fléaux au quotidien.

En effet, seuls quelques organismes s’intéressent en France aux pollutions des eaux intérieures : le CEDRE, le BARPI (Bureau d’Analyse des Risques et Pollutions Industrielles) et le CNSPE (Conseil National Supérieur de la Pêche et de l’Environnement). Faute de centralisation et d’interprétation statistique, les origines, les causes, les conséquences sanitaires et environnementales des pollutions accidentelles des eaux intérieures sont mal identifiées, méconnues et sous-estimées.

Il n’y a aucun retour d’expérience ; la réduction à la source des pollutions accidentelles des eaux douces n’était pas jusqu’alors une priorité. Il a été acté dans la feuille de route Grenelle « que les pollutions accidentelles des eaux superficielles devront être mieux répertoriées et mieux analysées »

Pollutions accidentelles, lessivage de sites pollués abandonnés, opérations de curage incohérentes, la somme des perturbations aquatiques est assommante. La solidarité, c’est aussi la solidarité de bassin fluvial. Les pollueurs de l’amont doivent être localisés, responsabilisés et sollicités pour réduire ou réparer les dommages sanitaires et environnementaux infligés à l’aval.

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** Les hydrocarbures se définissent dans le cadre de cet inventaire comme des carburants, lubrifiants ou solvants pétroliers ou comme des produits usagés assimilables à des déchets tels l’huile de vidange. Les irisations, la couleur et dans la plupart des cas les odeurs font qu’en première approche les témoins et les acteurs qualifient les polluants d’hydrocarbures. Ceux-ci peuvent masquer des contaminants plus persistants comme des huiles de transformateurs électriques ou des huiles de coupe industrielles.

Voici la liste des marées noires recensées par l’association :

  • Bassin Rhin-Meuse : 79 marées noires

Entre janvier 2004 et décembre 2007, Robin des Bois a relevé 79 pollutions par hydrocarbures. Le cumul des déversements annoncés comme supérieurs à 100 l est de 15 t. Les pollutions dans l’Est de la France aboutissent directement ou indirectement en Mer du Nord sous l’action des fleuves internationaux que sont le Rhin et la Meuse, des crues, des curages, et des inondations.

  • Bassin Artois-Picardie : 44 marées noires

Entre janvier 2004 et décembre 2007, Robin des Bois grâce à la compilation et à l’analyse de la presse régionale a relevé 44 épandages d’hydrocarbures dans le bassin Artois-Picardie. Le nombre de marées noires peut paraître faible en première analyse mais rapporté à l’exiguité du bassin Artois-Picardie il est catastrophique. Le cumul des déversements annoncés comme supérieurs à 100 l est de 15 tonnes.

  • Bassin Seine-Normandie : 100 marées noires

Entre janvier 2004 et décembre 2007, Robin des Bois grace à la compilation des articles de la presse régionale a relevé 100 pollutions par hydrocarbures dans le bassin Seine-Normandie.
Le cumul des pollutions supérieures à 100 l, soit 21 sur 100, est de 115 t. Ensemble, les rejets annuels d’hydrocarbures de la raffinerie Exxon et de la raffinerie Total dans l’estuaire de la Seine ne dépassent pas 20 tonnes.

  • Bassin Loire-Bretagne : 167 marées noires

Entre janvier 2004 et décembre 2007, Robin des Bois grâce à la compilation et à l’analyse des articles de la presse régionale a relevé 167 épandages accidentels d’hydrocarbures dans le bassin Loire-Bretagne. Le cumul des déversements annoncés comme supérieurs à 100 litres est de 136 tonnes.

  • Bassin Adour-Garonne : 63 marées noires

63 pollutions ont été dénombrées dans le bassin Adour-Garonne réparti entre 6 régions et 25 départements entre janvier 2004 et décembre 2007 grâce à la compilation et à l’analyse de la presse régionale. Le cumul des déversements annoncés comme supérieurs à 100 litres est de 131 tonnes.

  • Bassin Rhône-Méditerranée : 108 marées noires

Entre janvier 2004 et décembre 2007, Robin des Bois grace à la compilation des articles de la presse régionale a relevé 108 épandages accidentels d’hydrocarbures dans le bassin Rhône-Mediterranée. Le cumul des déversements supérieurs à 100 l, soit 28 sur 108, est de 301 t. Ensemble, les rejets annuels de Shell Pétrochimie Méditerranée à Berre-l’Etang, Total à Châteauneuf-les-Martigues, BP à Lavéra, Esso à Fos-sur-Mer et Shell Pétrochimie à Berre-l’Etang sont de l’ordre de 71 t (année 2003). Les déversements accidentels dans le bassin du Rhône sont plus importants que les rejets opérationnels de l’industrie pétrochimique de l’Etang de Berre.

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