Bure-Saudron : projet de biocarburants 2ème génération

Le CEA et ses partenaires industriels et financiers lancent la première phase du projet de construction d’un démonstrateur BtL – « Biomass to Liquid » – de production de biocarburants de 2ème génération sur le site de Bure-Saudron.

Localisé à la limite des départements de la Haute-Marne et de la Meuse, ce projet a reçu le soutien des acteurs économiques et politiques locaux, notamment les Conseils généraux et le Conseil régional. L’objectif est de démontrer la faisabilité technique et économique d’une chaîne complète de production BtL en France, depuis la collecte de la biomasse jusqu’à la synthèse de carburant. Selon le CEA "l’introduction d’hydrogène dans le procédé pour optimiser le rendement massique constituera une première mondiale".

Le choix d’implanter cette unité pilote sur le site de Bure-Saudron (en photo) concrétise les engagements pris en 2006 par les acteurs de la filière nucléaire, d’accompagner le développement économique des territoires qui accueillent le laboratoire de recherche sur le stockage des déchets nucléaires en couche géologique profonde 1. Le démonstrateur pré-industriel utilisera comme matière première les ressources forestières et agricoles locales, estimées à 75.000t/an de matière sèche.

L’unité pilote sera la première du genre en France, rassemblant en une même installation les différents composants, ou « briques technologiques », de fabrication de ce biocarburant. Le démonstrateur expérimentera à une échelle pré-industrielle la filière BtL, par voie « thermochimique » de production de biocarburant 2. La production attendue est de l’ordre de 23.000t/an de biocarburant (diesel / kérosène / naphta). Cette filière permet la production d’un biocarburant de très haute qualité, tant du point de vue du fonctionnement des moteurs que de leurs émissions de polluants.

A l’heure actuelle, une limite importante de la filière BtL réside dans ses rendements massiques (quantité de matière à l’entrée / quantité de carburant en sortie) que l’on cherche à améliorer. De ce point de vue, le démonstrateur de Bure-Saudron expérimentera une solution originale augmentant le rendement du procédé : le ratio hydrogène / monoxyde de carbone généré lors de l’étape de synthèse du carburant sera fortement amélioré par l’apport extérieur d’hydrogène.

Le pilote de Bure-Saudron permettra d’expérimenter une filière complète de production : collecte puis conditionnement de la biomasse, gazéification, traitement des gaz, conversion en carburant de synthèse via le procédé Fischer-Tropsch. Il fournira l’expérience à la mise en place d’une filière, tant pour l’intégration des procédés techniques que pour la définition d’un modèle économique régional, depuis la collecte de la ressource jusqu’à la distribution de biocarburant.

Le CEA assure la maîtrise d’ouvrage de la phase d’étude ; il apportera son expertise de R&D en systèmes énergétiques, son expérience des technologies biomasse, et ses compétences d’intégration des procédés. Les actions de R&D menées en parallèle viseront à améliorer l’installation dans l’optique d’une filière industrielle. Le CEA confie la maîtrise d’œuvre des études de conception au groupe CNIM. Une partie des opérations d’ingénierie technique sera assurée par le groupe Air Liquide, via sa filiale Lurgi, en particulier pour les étapes allant de la gazéification à la synthèse finale de biocarburant. Le procédé de gazéification est confié à la société allemande Choren.

Le lancement effectif de la construction de cette installation pré-industrielle interviendra au vu des résultats de cette étude, prévus pour être disponibles en juin 2011.

1 Conformément à ce qui est prévu par la loi du 28 juin 2006 relative à la gestion des déchets radioactifs.
2 La voie thermochimique permet de produire du biodiesel ou du kérosène. L’autre voie de production de biocarburants de 2ème génération est la voie « enzymatique », dans laquelle la cellulose de la plante (glucose) est convertie en bioéthanol, incorporable à de l’essence.

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michel123

Cette filière est trés prometteuse elle a déja connu une exploitation avec le charbon mais on aimerait avoir des notions de rendement de conversion , c’est à dire plus précisément la quantité d’énergie qu’il faut dépenser pour en produire sous forme de combustible. On aimerait également savoir d’où vient l’hydrogène nécessaire à l’amélioration du procédé . Ne viendrait il pas du reformage du méthane issu du gaz naturel ? Dans ce cas l’amélioration ne serait que relative. A moins que le cea et edf n’aient dans l’idée d’utiliser les centrales nucléaires pour produire massivement de l’hydrogène par electrolyse protonique : sous forte température et forte pression (technique en cours de développement , utilisable dans les centrales nucléaires) ce qui leur permettrait de produire de l’hydrogène rentable qu’ils pourraient utiliser dans le procédé btl en produisant du carburant avec la biomasse ou même à partir de charbon + h2. Mais peut être que nos développeurs n’en sont qu’à la première phase et que mes hypothèses n’ont même pas été évoquées par ceux qui nous dirigent . y a t il vraiment un pilote dans l’avion ? MC

Lebavarois

Les hypothèses de michel123 sont parfaitement pertinentes, et ils sont, bien sur, dans les cartons du CEA. Pour complèter: On peut aussi transformer la biomasse en charbon par carbonisation hydrothermale puis gazéifier ce charbon pour avoir un gaz de synthèse pour le Fischer-Tropsch. Ultèrieurement nous pourrons même obtenir ce gaz de synthèse directement à partir de CO2 et de H2O, voir de H2 issu de l’électrolyse. En Allemagne, tout cela est déjà en route et, bien entendu, le CEA s’y interesse. Le démonstrateur de Bure-Saudron n’est que le début. Pour plus d’info, voir le compte rendu de l’audience publique de l’office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPEST)sur les biocarburants du 1er octobre 2008.