La récupération de l’énergie thermique perdue constitue un enjeu non négligeable pour l’industrie et les transports. Les générateurs thermoélectriques, capables de convertir les différences de température en électricité, constituent une solution intéressante. Leur développement a été longtemps entravé par les limitations des matériaux semi-conducteurs de type n. Une équipe de chercheurs coréens vient de réaliser une découverte significative dans ce domaine, élargissant les possibilités de valorisation de la chaleur résiduelle.
Le Dr Kyung Tae Kim, de la Division de Recherche sur les Nanomatériaux du KIMS (Institut coréen des sciences des matériaux), a mis au point un matériau thermoélectrique à base de tellurure de bismuth (Bi-Te) présentant des défauts atomiques artificiels. Cette découverte pourrait considérablement améliorer l’efficacité des générateurs thermoélectriques, notamment pour la récupération de chaleur résiduelle à des températures inférieures à 200°C.
Les générateurs thermoélectriques se composent de semiconducteurs de type p et n. Ces dispositifs sont capables de convertir réversiblement les différences de température en énergie électrique. Jusqu’à présent, les recherches s’étaient principalement concentrées sur l’amélioration des propriétés des matériaux thermoélectriques de type p. En revanche, les semiconducteurs de type n, contenant du sélénium (Se), posaient des difficultés en termes de contrôle de la composition et de la microstructure.
Une approche novatrice pour les semiconducteurs de type n
L’équipe de recherche s’est focalisée sur les semiconducteurs thermoélectriques de type n, déterminants pour la performance des générateurs. Leur découverte repose sur deux aspects clés : le matériau de dopage et le processus de fabrication.
Pour le dopage, les chercheurs ont remplacé le sélénium, habituellement utilisé dans les matériaux de type n, par de l’antimoine (Sb). Cette substitution s’inspire des performances optimales obtenues avec l’antimoine dans les matériaux de type p.
Concernant le processus de fabrication, une méthode innovante a été développée pour induire artificiellement des «défauts atomiques» et des « réseaux de dislocations ». Ces modifications structurelles favorisent la formation d’électrons et dispersent le transfert des phonons du réseau, un vecteur de transfert thermique. Il en résulte une conductivité électrique accrue et une conductivité thermique réduite.
Des performances améliorées et des applications prometteuses
Le semiconducteur thermoélectrique de type n développé grâce à cette technologie présente des propriétés thermiques et électriques nettement améliorées. La conductivité électrique a plus que doublé, tandis que la conductivité thermique a diminué. Ces caractéristiques le rendent particulièrement adapté pour les dispositifs thermoélectriques.
Cette technologie thermoélectrique, qui allie d’excellentes performances de conversion énergétique et une facilité de combinaison des matériaux, pourrait trouver des applications dans la récupération de chaleur autour de 200°C à température ambiante, y compris la chaleur corporelle.
Le marché des générateurs thermoélectriques connaît une croissance annuelle de 8,2%. Il est prévu qu’il atteigne 1,18 milliard de dollars à l’échelle mondiale d’ici 2029. L’équipe de recherche travaille actuellement au développement d’une centrale thermoélectrique en collaboration avec LIVINGCARE Co.
De plus, une étude fondamentale est menée en coopération avec l’usine Hyundai Motor Company d’Ulsan. Cette étude porte sur un système de production d’électricité récupérant la chaleur résiduelle générée par les moules de coulée.
Le Dr Kyung Tae Kim a souligné l’importance de cette avancée : «Cette étude a posé une pierre angulaire pour résoudre le contrôle des propriétés des semiconducteurs thermoélectriques de type n, qui constituait un obstacle à la récupération de divers types de chaleur résiduelle en dessous de 200°C».
Légende illustration : Schéma conceptuel d’un dispositif thermoélectrique et d’une production d’énergie électrique basée sur une plaquette semi-conductrice thermoélectrique développée. Photo de la couverture du numéro de juillet de ACS Applied Materials & Interfaces
Article : « Synergistic Tailoring of Electronic and Thermal Transports in Thermoelectric Se-Free n-Type (Bi,Sb)2Te3Article link copied! » – DOI: 10.1021/acsami.4c06978