La quête de matériaux quantiques pour l’électronique de demain

La quête de matériaux quantiques pour l'électronique de demain

L’industrie des semi-conducteurs est en constante évolution, cherchant sans cesse à repousser les limites de la miniaturisation et de l’efficacité énergétique. Au cœur de cette dynamique, la recherche de nouveaux matériaux capables de succéder au silicium traditionnel est devenue une priorité pour les scientifiques du monde entier. C’est dans ce contexte que des chercheurs ont récemment fait un pas significatif vers la concrétisation de composants électroniques ultrafins et performants.

En 2021, l’équipe scientifique du Cluster of Excellence ct.qmat – Complexity and Topology in Quantum Matter, associant les universités JMU Würzburg et TU Dresden, a mis en lumière les propriétés exceptionnelles des matériaux quantiques topologiques dont l’indénène. Les semi-conducteurs quantiques, d’une finesse extrême, sont constitués d’une unique couche d’atomes – dans le cas de l’indenene, d’atomes d’indium – et fonctionnent comme des isolants topologiques, conduisant l’électricité pratiquement sans résistance le long de leurs bords.

Le Professeur Ralph Claessen, porte-parole de ct.qmat à Würzburg, explique : « La production d’une telle couche atomique unique nécessite un équipement de vide sophistiqué et un matériau de substrat spécifique. Pour intégrer ce matériau bidimensionnel dans des composants électroniques, il faudrait le retirer de l’environnement sous vide. Cependant, une exposition à l’air, même brève, entraîne une oxydation, détruisant ses propriétés uniques et le rendant inutilisable. »

Une couche protectrice innovante

Cedric Schmitt, doctorant sous la direction de Ralph Claessen, précise : « Nous avons consacré deux ans à la recherche d’une méthode pour protéger la couche sensible d’indénène des éléments environnementaux à l’aide d’une couche protectrice. Le défi résidait dans le fait que cette couche ne devait pas interagir avec la couche d’indénène. »

Leur recherche les a menés vers les matériaux de van der Waals, qui présentent des liaisons internes fortes entre leurs atomes tout en adhérant faiblement au substrat. « Ces couches atomiques bidimensionnelles de van der Waals se caractérisent par des liaisons internes fortes entre leurs atomes, tout en adhérant faiblement au substrat. Nous avons cherché à reproduire cette caractéristique », explique Ralph Claessen.

Amalgame d’images expérimentales. En haut, une image de microscopie à effet tunnel montre le réseau en nid d’abeille du graphène (la couche protectrice). Au centre, la microscopie électronique montre une vue de dessus de l’indénène sous forme de réseau triangulaire. En dessous, une vue latérale du substrat de carbure de silicium. On peut voir que l’indénine et le graphène sont tous deux constitués d’une seule couche atomique. Crédit : Jonas Erhardt/Christoph Mäder)

Un succès décisif

En chauffant du carbure de silicium (SiC) comme substrat pour l’indenene, l’équipe de Würzburg a réussi à former du graphène à partir de celui-ci, créant ainsi la couche protectrice pour l’indénène. « Le carbure de silicium est composé d’atomes de silicium et de carbone. En le chauffant, les atomes de carbone se détachent de la surface et forment du graphène », détaille Schmitt.

« Cela fonctionne ! L’échantillon peut même être exposé à l’eau sans être affecté », s’exclame Ralph Claessen. La couche de graphène agit comme un parapluie pour notre indénène, protégeant le matériau des effets de l’oxydation et de la corrosion.

Vers une électronique à l’échelle atomique

Cette avancée ouvre la voie à l’utilisation de couches atomiques semi-conductrices hautement sensibles dans la fabrication de composants électroniques ultraminces.

L’équipe de Würzburg se concentre désormais sur l’identification d’autres matériaux de van der Waals pouvant servir de couches protectrices. Malgré l’efficacité du graphène pour protéger les monocouches atomiques contre les facteurs environnementaux, sa conductivité électrique présente un risque de courts-circuits.

Les scientifiques de Würzburg travaillent à surmonter ces défis pour créer les conditions nécessaires à l’électronique de demain à l’échelle atomique.

Le Cluster of Excellence ct.qmat

Le Cluster of Excellence ct.qmat – Complexity and Topology in Quantum Matter est une collaboration entre l’Université Julius-Maximilians (JMU) de Würzburg et l’Université Technique (TU) de Dresde depuis 2019.

Plus de 300 scientifiques de plus de trente pays et quatre continents étudient les matériaux quantiques topologiques qui révèlent des phénomènes surprenants dans des conditions extrêmes telles que des températures ultra-basses, une haute pression ou de forts champs magnétiques.

Financé par la Stratégie d’Excellence Allemande des gouvernements fédéral et des Länder, ct.qmat est le seul Cluster of Excellence en Allemagne basé dans deux états fédéraux différents.

Légende illustration : Représentation schématique montrant comment une couche de graphène protège de l’eau. Le courant électrique circulant le long du bord de l’isolant topologique indénié ne subit aucune influence extérieure.

[ Rédaction ]

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