L’armée américaine lance un nouveau programme pour résoudre un problème que rencontrent toutes les technologies d’intelligence artificielle : elles consomment énormément d’électricité. Le programme ML2P (qui signifie « Mapping Machine Learning to Physics », soit « cartographier l’apprentissage automatique vers la physique ») vise à créer des systèmes d’IA qui fonctionnent aussi bien qu’aujourd’hui, mais en utilisant beaucoup moins d’énergie. L’agence DARPA, qui finance les projets de recherche militaire les plus avancés aux États-Unis, a annoncé qu’elle cherche des solutions pour que les ordinateurs et les logiciels d’IA arrêtent de gaspiller de l’électricité.
Le problème : des IA performantes mais énergivores
Jusqu’à présent, les créateurs d’intelligence artificielle se concentraient sur un seul objectif, faire fonctionner leurs systèmes le mieux possible. Résultat, les IA sont devenues extrêmement performantes pour reconnaître des images, comprendre et produire du texte, ou réaliser des tâches complexes. Mais personne ne s’est vraiment préoccupé de la quantité d’électricité nécessaire pour faire tourner ces programmes. Aujourd’hui, ce problème devient critique, notamment pour l’armée qui déploie des systèmes d’IA sur le terrain, où l’accès à l’électricité reste limité.
Bernard McShea, responsable du programme ML2P, explique la situation simplement : « À une époque où l’IA est de plus en plus déployée dans des environnements à contraintes énergétiques, comme sur le front tactique, l’efficacité énergétique n’est plus optionnelle ». Pour les soldats équipés d’ordinateurs fonctionnant sur batterie, une IA qui consomme trop d’énergie peut rapidement devenir inutilisable.
La solution : mesurer chaque joule dépensé
Le programme ML2P propose une approche nouvelle : au lieu de chercher uniquement la meilleure performance, il s’agit de mesurer précisément combien d’électricité (en joules) chaque IA consomme, puis de trouver le bon équilibre entre performance et consommation. « Avec ML2P, nous voulons aller au-delà de l’optimisation centrée uniquement sur la précision et comprendre plutôt, pour chaque joule d’électricité, quel niveau de performance nous obtenons en retour », précise Bernard McShea. L’idée consiste à développer une IA plus intelligente, plus légère et plus utile pour ceux qui l’utilisent sur le terrain.
Pour y parvenir, la DARPA fait appel à des experts venus de domaines très différents : ingénieurs électriciens, mathématiciens, spécialistes de logique et experts en apprentissage automatique. Ensemble, ils devront concevoir des modèles d’IA « conscients de leur consommation énergétique ». Concrètement, les nouveaux outils développés par le programme guideront la construction des IA en tenant compte de chaque décision technique prise précédemment, et en créant des méthodes d’entraînement qui cherchent le meilleur compromis entre consommation d’énergie et performances.
Des bénéfices qui dépassent le domaine militaire
Bernard McShea pense que les résultats du programme profiteront bien au-delà de l’armée. Les grands modèles de langage (comme ChatGPT), les systèmes d’IA générative qui créent des images ou du texte, et tous les programmes de classification pourraient devenir plus économes en énergie tout en gardant leurs performances actuelles. Mieux encore, le programme pourrait aider à concevoir de meilleurs ordinateurs à l’avenir.
« Rendre les modèles plus efficaces et performants est crucial dans la mesure où les applications d’IA nécessitent souvent des ressources de calcul substantielles, ce qui entraîne une consommation énergétique élevée », rappelle le responsable du programme. En permettant de simuler précisément comment les modèles d’IA fonctionnent sur différents types d’ordinateurs, ML2P pourrait fournir des indications précieuses pour savoir comment fabriquer des machines mieux adaptées aux besoins de l’intelligence artificielle.
Si le programme atteint ses objectifs, il changera la manière dont on conçoit l’IA : au lieu d’opposer efficacité énergétique et performance, les deux iront de pair. Les systèmes d’intelligence artificielle pourront ainsi fonctionner rapidement, traiter de grandes quantités d’informations et rester précis, tout en consommant beaucoup moins d’électricité. Les chercheurs intéressés peuvent consulter les détails du programme sur le site officiel SAM.gov.
Source : DARPA














