Nouveaux « cocktails enzymatiques » pour décomposer la biomasse végétale

Pour la première fois, une approche génomique à haut débit démontre la grande diversité des activités enzymatiques permettant à une bactérie de fermenter différents types de biomasse végétale.

Développée par des chercheurs du Genoscope (Institut de Génomique du CEA, CEA-IG), associés à l’Université d’Evry et au CNRS, cette approche pluridisciplinaire permet d’identifier les différentes enzymes impliquées dans la fermentation chez la bactérie Clostridium phytofermentans.

Ces travaux, publiés le 13 novembre dans la revue PLOS Genetics, ouvrent de nouvelles voies de production industrielle de biocarburants et de bioproduits, à partir de la biomasse végétale.

L’équipe du Genoscope travaille à la caractérisation d’enzymes microbiennes ayant le potentiel de transformer la biomasse cellulosique [1] en énergie et bioproduits renouvelables. Elle se concentre principalement sur Clostridium phytofermentans, une bactérie récemment isolée du sol forestier, qui fermente les débris végétaux en éthanol et en hydrogène. L’analyse de son génome a révélé qu’elle possède une formidable diversité d’enzymes (171 au total) pouvant potentiellement modifier et dégrader les polysaccharides [2] végétaux. Or les plantes sont composées de plusieurs types de polysaccharides, dont chacun est dépolymérisé par différentes enzymes.

Nouveaux « cocktails enzymatiques » pour décomposer la biomasse végétale

Les chercheurs du Genoscope ont montré qu’une des spécificités de Clostridium phytofermentans est de décomposer, puis de fermenter une grande diversité de polysaccharides grâce à sa batterie d’enzymes. Par une approche intégrant criblage enzymatique, séquençage de l’ARN [3] et mesures de croissance, ils ont constaté que Clostridium phytofermentans dégrade de nombreux types de polysaccharides végétaux, y compris la cellulose, les xylanes, mannanes, arabinanes et galactanes. Ils ont ainsi pu identifier les différentes enzymes produites par Clostridium phytofermentans lorsqu’elle est cultivée sur chacun de ces polysaccharides, en observant quels gènes sont alors spécifiquement exprimés. Les 56 enzymes les plus exprimées ont ensuite été purifiées. Les chercheurs sont parvenus à préciser le rôle de 32 d’entre elles.

Constatant que l’action combinée de plusieurs enzymes est souvent nécessaire pour la dégradation d’un polysaccharide, les chercheurs ont alors composé des « cocktails enzymatiques ». Cette étude démontre la complexité des stratégies utilisées par les bactéries pour dégrader la biomasse. Ces résultats faciliteront par la suite l’ingénierie de mélanges enzymatiques et de micro-organismes modifiés pour la production industrielle de biocarburants et de bioproduits à partir de la biomasse végétale.

[1] Biomasse végétale non-comestible par l’Homme.
[2] Polymère de sucres.
[3] Méthode de séquençage permettant de définir quelles enzymes sont synthétisées dans la cellule étudiée.

Références : PLOS Genetics – Functional Diversity of Carbohydrate-Active Enzymes Enabling a Bacterium to Ferment Plant Biomass – Magali Boutard, Tristan Cerisy, Pierre-Yves Nogue, Adriana Alberti, Jean Weissenbach, Marcel Salanoubat, Andrew C. Tolonen – Published : November 13, 2014 – DOI: 10.1371/journal.pgen.1004773

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