Non volatiles, les mémoires ferro- magnétiques sont promises à un bel avenir dans le stockage des informations pour les applications mobiles et le multimédia ; Des obstacles techniques ont retardé la révolution qu’elles promettent depuis plusieurs années.
Deux équipes de l’Institut d’électronique fondamentale (Université ParisSud / CNRS), en collaboration avec le Laboratoire de génie électrique de Paris (CNRS / SUPELEC / UPMC / Université Paris-Sud) notamment, viennent de mettre au point des nanodispositifs intégrés qui permettraient d’accroître les capacités de stockage des mémoires numériques, tout en diminuant leur consommation d’énergie.
Ces travaux viennent d’être publiés dans la revue Nature Communications.
Le développement de mémoires solides et non volatiles de grande capacité est un enjeu majeur pour répondre à la problématique de la capacité de stockage des données numériques générées au quotidien. Ces mémoires permettent de supprimer toutes les pièces mobiles qui sont présentes dans les disques durs classiques, ce qui les rend compatibles avec les applications mobiles.
Si les premiers ordinateurs basés sur ce concept viennent d’être commercialisés, il reste de nombreux points à résoudre pour obtenir des mémoires avec une très faible consommation et une capacité de stockage nettement supérieure avant d’envisager de supplanter les disques durs classiques. Pour y parvenir, de nombreuses approches sont actuellement à l’étude dans les laboratoires de recherche.
Dans ce contexte, manipuler la direction d’aimantation dans des nanodispositifs est une alternative qui présente de multiples avantages. En particulier, si l’on considère une piste magnétique submicronique, les domaines magnétiques séparés par des parois étroites permettent de coder l’information. Un segment de ce ruban constitue alors un ensemble de bits et donc un registre (voir la représentation schématique en figure b). Dans les approches actuelles, les parois sont bloquées par des encoches physiques, mais l’absence de pièges dynamiques efficaces ne permet pas de bloquer sélectivement une paroi, lorsque les autres sont mises en mouvement sous l’action d’un courant polarisé en spin par exemple.
Deux équipes de l’Institut d’électronique fondamentale (Université Paris-Sud / CNRS), en collaboration avec des chercheurs du Laboratoire de génie électrique de Paris et du Laboratoire Cavendish (Université de Cambridge), ont développé des structures hybrides submicrométriques : Elles provoquent une déformation locale à l’aide d’un élément piézoélectrique micrométrique sur lequel est déposé une piste magnétique de quelques centaines de nanomètres de largeur (figure a). L’action d’une tension sur les électrodes placées latéralement à la piste permet de créer un piège dynamique qui agit localement sur la piste magnétique par magnétostriction inverse, la hauteur du piège variant ainsi en fonction de la tension appliquée.
Ce travail a conduit à la première démonstration d’un nanodispositif tout intégré (figure a) dont l’étude vient d’être publiée dans la revue Nature Communications. Outre la validation du concept, ce travail** démontre qu’il est possible de manipuler le spin à l’aide de déformations mécaniques locales, ce qui ajoute un degré de liberté supplémentaire pour manipuler l’aimantation en électronique de spin.
** financé par l’Union Européenne dans le cadre du contrat STREP N° 214499 NAMASTE et MAGWIRE N° 257707, par l’Agence Nationale pour la Recherche dans le cadre du projet FRIENDS et par la région Ile de France dans le cadre du projet EMFONES.
Références : Na Lei, Thibaut Devolder, Guillaume Agnus, Pascal Aubert, Laurent Daniel, Joo-Von Kim, Weisheng Zhao, Theodossis Trypiniotis, Russell P. Cowburn, Claude Chappert, Dafiné Ravelosona& Philippe Lecoeur, « Strain-controlled magnetic domain wall propagation in hybrid piezoelectric/ferromagnetic structures”, Nat. Commun. 4, 1378 (2013) (DOI : 10.1038/ncomms2386)