Les centres de données et les ordinateurs à haute performance qui exécutent des programmes d’intelligence artificielle tels que les grands modèles linguistiques, ne sont pas limités par la puissance de calcul de leurs nœuds individuels. C’est un autre problème – la quantité de données qu’ils peuvent transférer entre les nœuds – qui est à la base du « goulot d’étranglement de la bande passante » limitant actuellement les performances et la mise à l’échelle de ces systèmes.
Dans ces systèmes, les nœuds peuvent être séparés par plus d’un kilomètre. Les fils métalliques dissipent les signaux électriques sous forme de chaleur lors du transfert de données à grande vitesse. Ces systèmes transfèrent donc des données via des câbles à fibre optique. Malheureusement, beaucoup d’énergie est gaspillée dans le processus de conversion des données électriques en données optiques (et inversement) lors de l’envoi de signaux d’un nœud à un autre.
Innovation en matière de transfert de données
Une étude publiée dans Nature Photonics par des chercheurs de l’Université de Columbia présente une méthode énergétiquement efficiente pour transférer de plus grandes quantités de données sur les câbles à fibre optique qui relient les nœuds. Cette technologie améliore les tentatives précédentes de transmission simultanée de plusieurs signaux sur les mêmes câbles à fibre optique.
Au lieu d’utiliser un laser différent pour générer chaque longueur d’onde de lumière, les nouvelles puces nécessitent un seul laser pour générer des centaines de longueurs d’onde distinctes de lumière pouvant transférer simultanément des flux de données indépendants.
Plus simple et économe en énergie
Le système à l’échelle du millimètre utilise une technique appelée multiplexage par répartition en longueur d’onde (WDM) et des dispositifs appelés peignes de fréquence Kerr qui prennent une seule couleur de lumière en entrée et créent de nombreuses nouvelles couleurs de lumière en sortie. Les peignes de fréquence Kerr développés par Michal Lipson et Alexander Gaeta ont permis aux chercheurs d’envoyer des signaux clairs à travers des longueurs d’onde de lumière distinctes et précises, avec de l’espace entre elles.
Selon l’auteur principal, Keren Bergman, cette avancée pourrait permettre aux systèmes de transférer exponentiellement plus de données sans utiliser proportionnellement plus d’énergie.
Une architecture photonique novatrice
L’équipe a miniaturisé tous les composants optiques sur des puces de quelques millimètres pour générer de la lumière, les a codés avec des données électriques, puis a converti les données optiques en un signal électrique au nœud cible. Ils ont conçu une architecture de circuit photonique qui permet à chaque canal d’être individuellement codé avec des données tout en ayant une interférence minimale avec les canaux voisins.
Interface directe avec les puces électroniques
Ces puces compactes peuvent interfacer directement avec les puces électroniques d’ordinateur, réduisant considérablement la consommation d’énergie totale puisque les signaux de données électriques n’ont à se propager que sur des millimètres plutôt que sur des dizaines de centimètres.
Performances impressionnantes
Dans leurs expériences, les chercheurs ont réussi à transmettre 16 gigabits par seconde par longueur d’onde pour 32 longueurs d’onde distinctes de lumière, pour une bande passante totale de 512 Gb/s avec moins d’un bit d’erreur sur mille milliards de bits de données transmis.
En synthèse
Cette innovation présente une voie viable vers une réduction drastique de la consommation d’énergie du système tout en augmentant simultanément la puissance de calcul de plusieurs ordres de grandeur. Cela permettra aux applications d’intelligence artificielle de continuer à croître à un taux exponentiel avec un impact environnemental minimal.
Légende illustration principale : Puce photonique intégrée capable d’encoder des données sur 32 canaux de fréquence indépendants à l’échelle d’une pièce de 10 cents américains. Crédit : Lightwave Research Laboratory/Columbia Engineering
Plus d’informations : Massively scalable Kerr comb-driven silicon photonic link, Nature Photonics (2023). DOI : 10.1038/s41566-023-01244-7 , www.nature.com/articles/s41566-023-01244-7