Des enzymes qui défient la nature pour une meilleure production de biocarburants

Des enzymes qui défient la nature pour une meilleure production de biocarburants

Dans une ère où la recherche de sources d’énergie renouvelables est devenue une priorité, des biologistes végétaux du Laboratoire National de Brookhaven (USA) ont mis au point des enzymes pour modifier les plantes herbacées afin que leur biomasse puisse être convertie plus efficacement en biocarburants et autres bioproduits.

« Le concept de biomasse en biocarburant semble simple, mais il est techniquement très difficile de libérer les sucres », a noté Chang-Jun Liu, un biologiste végétal senior au Laboratoire de Brookhaven qui a dirigé l’étude. La biomasse végétale est pleine de molécules de sucre complexes riches en énergie générées par la photosynthèse.

Chaque cellule végétale est entourée d’une paroi cellulaire rigide composée de sucres et d’un matériau appelé lignine qui fournit un soutien structurel. Réduire la lignine pour accéder aux sucres a été l’objet de recherches visant à utiliser les plantes pour générer des carburants et d’autres produits couramment fabriqués à partir de pétrole.

L’utilisation des enzymes MOMTs

Depuis près de 15 ans, Chang-Jun Liu s’attaque à ce problème en utilisant des enzymes génétiquement modifiées appelées monolignol 4-O-méthyltransférases (MOMTs).

Ces enzymes, qui n’existent pas dans la nature, sont conçues pour modifier la structure chimique des monolignols – les principaux éléments constitutifs de la lignine. Changer la structure des éléments de construction empêche leur liaison, ce qui réduit la teneur en lignine des plantes et rend les sucres plus accessibles.

Des recherches menées au laboratoire Brookhaven montrent que des enzymes modifiées dans les plants de riz (ci-dessus) peuvent aider les scientifiques à accéder aux sucres utilisés pour produire des biocarburants. Credit : BNL

Des enzymes surprenantes

Les enzymes – molécules qui facilitent généralement les réactions chimiques – ciblent généralement un seul type de molécule. Les MOMT4 et MOMT9 ont été conçus pour agir sur les monolignols. Mais lorsque Chang-Jun Liu et ses collègues ont effectué des tests sur ces enzymes, les résultats ont révélé que ces enzymes génétiquement modifiées présentaient une « promiscuité ».

En plus d’agir sur les monolignols, les deux MOMTs ont agi sur d’autres composants de la paroi cellulaire – les phénoliques de réticulation et aussi un phénolique appelé tricin, qui est un précurseur de la lignine unique aux plantes herbacées.

Ces images prises au microscope électronique à balayage montrent des coupes transversales de plants de riz non modifiés (rangée du haut), de plants de riz exprimant l’enzyme MOMT4 (rangée du milieu) et de plants de riz exprimant l’enzyme MOMT9 (rangée du bas). Les images en gros plan (colonne de droite) montrent que les plantes exprimant les enzymes modifiées ont des parois cellulaires déformées et plus minces. En affaiblissant les parois cellulaires, les scientifiques peuvent accéder plus facilement aux sucres pour produire des biocarburants. Credit : BNL

En synthèse

Les enzymes MOMT4 et MOMT9 ont montré une capacité prometteuse à modifier la structure des parois cellulaires des plantes herbacées, permettant une libération plus efficace des sucres pour la production de biocarburants.

Des défis subsistent, notamment l’impact de ces modifications sur la croissance et la reproduction des plantes. Les chercheurs envisagent d’explorer des méthodes pour contrôler comment la lignine est modifiée dans différentes parties de la plante, afin de maximiser la capacité d’extraction des sucres sans affecter la fertilité des plantes.

Cette étude offre des perspectives intéressantes pour l’optimisation de la production de biocarburants à partir de la biomasse végétale.

Pour une meilleure compréhension

Qu’est-ce que la biomasse et comment est-elle convertie en biocarburant ?

La biomasse est une matière organique provenant de plantes et d’animaux qui contient des molécules de sucre complexes riches en énergie générées par la photosynthèse. Pour la convertir en biocarburant, il faut libérer ces sucres, ce qui est techniquement difficile en raison de la structure complexe des parois cellulaires des plantes.

Pourquoi est-elle un obstacle à la production de biocarburants ?

La lignine est un matériau qui fournit un soutien structurel aux plantes en se liant aux sucres pour former une paroi cellulaire rigide. Réduire la lignine pour accéder aux sucres a été l’objet de recherches visant à utiliser les plantes pour générer des carburants et d’autres produits couramment fabriqués à partir de pétrole.

Qu’est-ce que les enzymes MOMTs et comment fonctionnent-elles ?

Les monolignol 4-O-méthyltransférases (MOMTs) sont des enzymes génétiquement modifiées conçues pour modifier la structure chimique des monolignols, les principaux éléments constitutifs de la lignine. En changeant la structure des éléments de construction, elles empêchent leur liaison, ce qui réduit la teneur en lignine des plantes et rend les sucres plus accessibles.

Quels sont les avantages et les défis de l’utilisation des enzymes MOMTs ?

Les enzymes MOMTs ont montré une capacité prometteuse à modifier la structure des parois cellulaires des plantes herbacées, permettant une libération plus efficace des sucres pour la production de biocarburants. Cependant, des défis subsistent, notamment l’impact de ces modifications sur la croissance et la reproduction des plantes.

Quelles sont les prochaines étapes de la recherche ?

Les chercheurs envisagent d’explorer des méthodes pour contrôler comment la lignine est modifiée dans différentes parties de la plante, afin de maximiser la capacité d’extraction des sucres sans affecter la fertilité des plantes. Ils souhaitent également voir si leurs enzymes MOMT peuvent optimiser les rendements en sucre à partir d’autres espèces de plantes herbacées.

Un article à ce sujet a été publié dans la revue Plant Biotechnology Journal

Illustration légende principale : Chang-Jun Liu (à gauche) et Nidhi Dwivedi (à droite) dans la serre du Brookhaven Lab avec des plants de riz comme ceux utilisés dans cette étude. Credit : Brookhaven National Laboratory

[ Rédaction ]

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