Le sable, jusqu’à 100 heures de stockage d’énergie pour un coût imbattable

Le sable, jusqu'à 100 heures de stockage d'énergie pour un coût imbattable

Le stockage d’énergie est un enjeu crucial pour l’avenir, et une solution innovante pourrait bien se trouver sous nos pieds : le sable. Grâce à sa capacité à retenir la chaleur, ce matériau omniprésent et peu coûteux pourrait jouer un rôle clé dans les technologies de stockage d’énergie thermique.

Si les batteries sont souvent considérées comme la solution de référence pour le stockage d’énergie, d’autres technologies existent, comme le pompage-turbinage hydroélectrique ou le stockage d’énergie thermique (TES) utilisant du sel fondu ou des roches surchauffées. Le TES se présente comme une alternative peu coûteuse, et le stockage dans des particules solides comme le sable offre une solution facilement accessible, sans restrictions géologiques.

Selon Zhiwen Ma, ingénieur mécanique au National Renewable Energy Laboratory (NREL) du Département de l’Énergie des États-Unis, le sable est « facile d’accès, respectueux de l’environnement, stable dans une large plage de températures et peu coûteux ».

Une technologie brevetée pour stocker l’énergie dans le sable

Les chercheurs du NREL ont développé et breveté une technologie permettant de chauffer des particules de sable à la température souhaitée grâce à des sources d’énergie renouvelables comme l’éolien et le solaire. Le sable est ensuite déposé dans un silo pour être stocké et utilisé ultérieurement, soit pour produire de l’électricité, soit pour fournir de la chaleur industrielle.

Un prototype à l’échelle du laboratoire a validé la technologie et permis de créer un modèle informatique montrant qu’un dispositif à l’échelle commerciale conserverait plus de 95% de sa chaleur pendant au moins cinq jours.

Le stockage d’énergie thermique, une solution compétitive

Selon Jeffrey Gifford, chercheur postdoctoral au NREL, le stockage d’énergie thermique dans des particules comme le sable présente un avantage supplémentaire par rapport aux batteries : il ne repose pas sur des matériaux rares ou dont la chaîne d’approvisionnement est complexe et non durable, comme le cobalt utilisé dans les batteries lithium-ion.

De plus, le coût du stockage d’énergie dans le sable est particulièrement compétitif. Zhiwen Ma a calculé que le sable était l’option la moins chère par rapport à quatre technologies concurrentes, dont le stockage d’énergie par air comprimé (CAES), le pompage-turbinage hydroélectrique et deux types de batteries. Avec une durée de stockage de plusieurs centaines d’heures, le sable coûterait entre 4 et 10 dollars par kilowattheure, contre 150 à 300 dollars pour le CAES et environ 60 dollars pour le pompage-turbinage hydroélectrique.

Projet de démonstration pour prouver le potentiel commercial du sable

En 2025, un système de stockage d’énergie thermique électrique (ETES) sera construit sur le campus Flatirons du NREL, dans le Colorado. Ce projet de démonstration financé par le Département de l’Énergie des États-Unis vise à montrer le potentiel commercial du sable pour le stockage d’énergie thermique, avec une capacité de stockage allant de 10 à 100 heures.

Contrairement aux sels fondus déjà utilisés pour le stockage temporaire d’énergie, le sable ne gèle pas et peut retenir considérablement plus de chaleur, jusqu’à 1 100°C (2 012°F), permettant de stocker de la chaleur pour la production d’électricité ou pour remplacer les combustibles fossiles dans les processus industriels.

Le choix du matériau de stockage thermique

Les chercheurs du NREL ont étudié différentes particules solides pour évaluer leur capacité à s’écouler et à retenir la chaleur. Parmi les particules considérées figuraient des matériaux céramiques utilisés dans la fracturation hydraulique, de l’argile calcinée, de l’alumine fondue brune et du sable de silice.

Si les matériaux céramiques ont surpassé le sable dans toutes les catégories, les gains de performance marginaux ont été jugés insuffisants pour justifier leur coût plus élevé. Le sable, sous forme de quartz alpha ultra-pur, coûte entre 30 et 80 dollars la tonne et est facilement disponible dans le Midwest des États-Unis.

Un stockage d’énergie évolutif et rentable

Selon Craig Turchi, responsable du groupe de recherche sur les sciences et technologies de l’énergie thermique au NREL, augmenter la quantité d’énergie pouvant être stockée dans le sable est aussi simple que d’ajouter plus de sable, ce qui représente un coût marginal pour accroître la capacité de stockage.

Si les composants nécessaires pour reconvertir le sable surchauffé en électricité nécessitent un investissement initial, une fois cet investissement réalisé, il est beaucoup moins coûteux d’ajouter du sable pour augmenter la durée de stockage que d’ajouter des batteries supplémentaires.

« Il s’agit d’un coût marginal pour ajouter une capacité de stockage supplémentaire », a-t-il indiqué. « Nous avons besoin d’une capacité de stockage allant de quelques minutes à quelques mois. Les batteries ont très bien fonctionné dans l’espace de quelques minutes à quelques heures en termes d’échelle. Et lorsque l’on passe à des mois de stockage, on envisage généralement de produire un combustible comme l’hydrogène pour assurer ce stockage à long terme. Mais entre plusieurs heures et deux semaines, il n’y a pas d’adéquation pour l’instant. L’hydrogène est trop cher pour cela. Les batteries sont trop chères pour cela ».

Le stockage d’énergie dans le sable pourrait ainsi combler une lacune entre le stockage de quelques heures assuré par les batteries et le stockage de plusieurs mois permis par la production d’hydrogène, offrant une solution compétitive pour un stockage allant de plusieurs heures à deux semaines.

Les composants nécessaires pour convertir le sable surchauffé en électricité nécessitent un coût initial. « Mais une fois que vous avez payé pour cela », a conclu M. Turchi, « si vous voulez simplement augmenter la durée de votre électricité, il est beaucoup, beaucoup moins coûteux d’ajouter du sable que l’alternative, qui est de continuer à ajouter des batteries ».

Légende illustration : Les chercheurs Shin Young Jeong et Zhiwen Ma examinent le prototype d’un dispositif utilisant du sable surchauffé pour le stockage de l’énergie à long terme. Photo de Joe DelNero, NREL

[ Rédaction ]

         

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