L’industrie du plastique connaît une transformation majeure avec l’émergence de solutions innovantes pour réduire son impact environnemental. Une équipe internationale de chercheurs a réalisé une avancée significative dans la biodégradabilité de l’acide polylactique (PLA), un bioplastique largement utilisé.
Des scientifiques du Toulouse Biotechnology Institute (TBI), en collaboration avec l’entreprise Carbios et des universités thaïlandaises et belges, ont mis au point une enzyme capable de dégrader efficacement le PLA. Cette innovation répond à un défi majeur : la faible biodégradabilité du PLA en conditions naturelles.
Le PLA, bien que biosourcé, nécessite des conditions spécifiques pour se décomposer, notamment une température supérieure à 60°C pendant une période prolongée. Ces conditions sont rarement réunies en dehors des installations de compostage industriel.
L’équipe de recherche a développé une enzyme résistante aux hautes températures, permettant son intégration directe dans le processus de fabrication du PLA. Alain Marty, directeur scientifique de Carbios, a déclaré : «Notre enzyme modifiée conserve son efficacité même après avoir été soumise aux températures élevées de production du plastique, qui peuvent atteindre 170°C.»
Les tests réalisés ont démontré que le PLA enzymé se désintègre en moins de 26 semaines dans un composteur domestique. Ce délai respecte les normes légales pour le compostage à domicile, ouvrant ainsi de nouvelles possibilités pour la gestion des déchets plastiques.
De plus, même en conditions extérieures non contrôlées, le PLA modifié se dégrade, bien qu’à un rythme plus lent. Cette caractéristique représente un progrès significatif par rapport au PLA conventionnel, qui persiste longtemps dans l’environnement.
La conception de cette enzyme innovante a nécessité une approche multidisciplinaire. Les chercheurs ont d’abord identifié une protéine produite par la bactérie thermophile Actinomadura keratinilytica, nommée PAM. Ensuite, des techniques bioinformatiques ont été employées pour développer une nouvelle enzyme thermostable, appelée ProteineT.
Le Dr Sophie Duquesne, chercheuse au CNRS, a expliqué : «Nous avons optimisé les propriétés de l’enzyme grâce à des techniques d’ingénierie moléculaire, créant ainsi une molécule capable de résister aux hautes températures tout en dégradant efficacement le PLA.»
Cette innovation ouvre la voie à de nouvelles applications dans l’industrie de l’emballage, particulièrement pour les emballages alimentaires souples. Le PLA enzymé pourrait remplacer avantageusement les plastiques conventionnels non biodégradables dans de nombreux secteurs.
Les chercheurs envisagent maintenant d’étendre leur approche à d’autres types de polymères, comme le polyamide. Cette recherche continue pourrait conduire à une gamme élargie de plastiques biodégradables, contribuant ainsi à réduire l’impact environnemental de l’industrie plastique.
Articles : « An engineered enzyme embedded into PLA to make self-biodegradable plastic. »
M. Guicherd, M. Ben Khaled, M. Guéroult, J. Nomme, M. Dalibey, F. Grimaud, P. Alvarez, E. Kamionka, S. Gavalda, M. Noël, M. Vuillemin, E. Amillastre, D. Labourdette, G. Cioci, V. Tournier, V. Kitpreechavanich, P. Dubois, I. André, S. Duquesne & A. Marty. – Nature 631, 884–890 (2024). DOI : https://doi.org/10.1038/s41586-024-07709-1