L’efficacité énergétique des dispositifs optoélectroniques est devenue un sujet central dans un contexte où les besoins en traitement de données augmentent de manière exponentielle. Les capteurs optiques, omniprésents dans les appareils modernes, sont souvent confrontés à des limites intrinsèques dues à leur consommation excessive d’énergie. Une solution innovante inspirée du fonctionnement humain pourrait permettre de réduire ces contraintes tout en optimisant la qualité des informations transmises. Leur approche repose sur une méthode inédite qui imite le rôle de la rétine dans le traitement visuel.
Une inspiration biologique pour les capteurs optiques
Les dispositifs optoélectroniques actuels, qu’il s’agisse des caméras de smartphones ou des instruments scientifiques scrutant le ciel nocturne et les cellules microscopiques, se trouvent confrontés à un défi majeur : extraire toujours davantage d’informations des photons. Ce processus, particulièrement gourmand en énergie, limite non seulement leurs performances mais également certaines applications commerciales et industrielles. Une équipe de chercheurs dirigée par le Lawrence Berkeley National Laboratory (Berkeley Lab) a décidé d’explorer une alternative plus efficace, directement inspirée du fonctionnement de l’œil humain.
La plupart des capteurs optiques actuels collectent des données lumineuses avant de transmettre l’intégralité des informations brutes à un ordinateur pour traitement ultérieur. Cependant, cette méthode entraîne une consommation énergétique disproportionnée par rapport aux besoins réels. En effet, une fraction infime des données brutes suffit généralement à produire le résultat final attendu. L’équipe développe ainsi une approche moins énergivore dans laquelle une partie du traitement des données est réalisée directement au niveau du capteur.
« Notre approche fonctionne comme une rétine, qui absorbe la lumière tout en stimulant les neurones pour générer des informations encodées à partir de celle-ci », a expliqué Maurice Garcia-Sciveres, responsable du projet et scientifique principal au sein de la division Physique de Berkeley Lab. Il convient de noter que cette stratégie vise à créer un capteur optique intégrant également une capacité de traitement, afin de ne transmettre que les données riches en information vers un ordinateur.
Des économies d’énergie significatives
En transférant une partie du traitement des données directement au niveau du capteur, cette méthode pourrait entraîner des économies substantielles en termes de consommation énergétique. Garcia-Sciveres souligne l’importance d’une conception intelligente des systèmes de traitement de l’information : « cela pourrait sauver beaucoup d’énergie dans les dispositifs optoélectroniques car il ne serait plus nécessaire de transmettre une énorme quantité de données pour traitement, et une fois transmise, la charge de calcul serait considérablement réduite ».
Le projet mené par Berkeley Lab s’inscrit dans le cadre du Microelectronics Energy Efficiency Research Center for Advanced Technologies (MEERCAT), l’un des trois centres de recherche en microélectronique récemment annoncés par le Département de l’Énergie des États-Unis. Ces centres regroupent des collaborations pluridisciplinaires impliquant plusieurs institutions académiques et partenaires industriels. Leur objectif commun consiste à rendre la microélectronique plus économe en énergie et capable de fonctionner dans des environnements extrêmes.
Un alignement stratégique avec les initiatives de Berkeley Lab
Les travaux menés par l’équipe de Garcia-Sciveres reflètent les efforts plus larges de Berkeley Lab visant à accroître l’efficacité énergétique des microélectroniques. MEERCAT, tel qu’annoncé par le Département de l’Énergie, s’est engagé à transformer les microélectroniques économes en énergie grâce à des innovations intégrées couvrant les matériaux, les dispositifs, les modalités de transmission de l’information et les architectures des systèmes. En mettant l’accent sur la sensation intelligente, la bande passante des données, le multiplexage et le calcul avancé, le centre explore des solutions novatrices qui relient de manière fluide la détection, le traitement en périphérie, l’intelligence artificielle et le calcul haute performance.
« Notre projet est très synergique avec les autres projets au sein de MEERCAT », a affirmé Garcia-Sciveres. Il ajoute que cette démarche vise à améliorer l’efficacité énergétique du calcul en évitant certaines opérations de traitement dès le départ. Cette vision holistique illustre comment des innovations technologiques peuvent être conçues pour répondre simultanément à des exigences multiples.
Une collaboration interdisciplinaire pour des résultats tangibles
Outre Berkeley Lab, ce projet bénéficie de contributions essentielles provenant de plusieurs institutions prestigieuses, notamment Sandia National Laboratories, UC Berkeley, UC Davis et l’Université du Texas à Arlington. Chaque partenaire apporte son expertise unique, enrichissant ainsi la recherche collective. Cette collaboration interdisciplinaire joue un rôle fondamental dans la réalisation des objectifs ambitieux fixés par le projet.
Les implications potentielles de cette recherche dépassent largement le cadre des dispositifs optoélectroniques traditionnels. En optimisant la manière dont les données lumineuses sont traitées, cette approche pourrait influencer divers secteurs, allant des technologies grand public aux applications scientifiques complexes. De plus, elle offre un modèle pour concevoir des systèmes technologiques respectueux des ressources énergétiques.
Légende illustration : Une recette pour l’efficacité énergétique : un capteur optique qui traite également les données. Le dôme transparent représente les interactions entre les photons (rouge et vert) et les éléments nanométriques sur le substrat. Les nanotubes de carbone avec des points quantiques (petites sphères) sont montrés connectés au circuit CMOS ci-dessous. (Crédit : François Léonard/Sandia National Laboratories)
Source : Berkeley Lab