Vers un stockage de l’énergie solaire plus efficace et moins cher

Grâce à une idée novatrice, des scientifiques de l’EPFL ont développé une nouvelle technique particulièrement rentable de conversion et de stockage d’énergie solaire par le biais d’hydrogène.

Le stockage d’énergie solaire sous forme d’hydrogène est une technique très prometteuse pour envisager l’utilisation systématique d’énergies renouvelables.

Les panneaux solaires traditionnels peuvent en effet être utilisés pour générer un courant électrique capable de diviser les molécules d’eau en oxygène et hydrogène, ce dernier étant considéré comme une forme de combustible solaire. La production de panneaux solaires efficaces coûtant toutefois très cher, les technologies de dissociation de l’eau s’avéraient jusqu’ici trop onéreuses pour être commercialisées. Or, des chercheurs de l’EPFL viennent de mettre au point une méthode simple et non conventionnelle de fabrication de panneaux solaires de qualité, qui permettent de produire directement de l’hydrogène solaire à bas prix. Leur étude est publiée dans Nature Communications.

Plusieurs matières ont été envisagées pour être utilisées dans les technologies de conversion directe du soleil en hydrogène, mais seuls les « matériaux 2D » ont été récemment identifiés comme étant des candidats prometteurs. En général, ces derniers — notamment le graphène — présentent des propriétés électroniques extraordinaires. Récolter des quantités exploitables d’énergie solaire nécessite cependant de grandes surfaces de panneaux, et l’on sait qu’il est à la fois cher et complexe de fabriquer des films fins de matériaux 2D qui garantissent un bon rendement à une telle échelle.

Kevin Sivula et ses collègues de l’EPFL se sont attaqués à ce problème avec une méthode économique et innovante qui met à profit la frontière entre deux liquides non miscibles. Pour ce faire, ils se sont concentrés sur l’un des meilleurs matériaux 2D en matière de séparation de l’eau dans le domaine de l’énergie solaire, le « diséléniure de tungstène ». Des études ont en effet montré que celui-ci était très efficace pour convertir directement l’énergie solaire en hydrogène combustible, le tout avec une vraie stabilité.

Avant d’en réaliser un film fin, les scientifiques ont d’abord dû obtenir une dispersion homogène. Pour ce faire, ils ont mélangé la poudre de diséléniure de tungstène avec un solvant liquide en utilisant des vibrations acoustiques pour « l’exfolier » en de fins flocons bidimensionnels. Ils ont ensuite stabilisé le tout grâce à des produits chimiques spécifiques. Cette technique, développée par le laboratoire de Kevin Sivula en 2014, produit une dispersion homogène desdits flocons, qui ressemble à de l’encre ou de la peinture.

Les chercheurs ont ensuite employé une innovation créative pour produit des films fins de qualité. Elle consiste à injecter l’encre de diséléniure de tungstène à la frontière de deux liquides qui ne se mélangent pas – comme l’eau et l’huile. Grâce à cet effet, ils ont pu utiliser l’interface entre les deux fluides comme « rouleau à pâtisserie » pour forcer les flocons 2D à former un film fin homogène et de haute qualité avec un minimum d’agglutination ou d’empilage. Les liquides ont été ensuite délicatement retirés et le film fin transféré vers un support plastique flexible, bien moins cher qu’un panneau solaire traditionnel.

Le film ainsi produit a été testé et s’est révélé bien plus efficace que ses équivalents faits du même matériau, mais fabriqués avec des méthodes comparables. A ce simple stade d’étude de faisabilité, la conversion du soleil en hydrogène a atteint les 1%, ce qui est déjà une amélioration significative par rapport aux films fins préparés par d’autres moyens. Ce résultat suggère pour l’avenir un fort potentiel d’efficacité accrue.

Plus important encore, cette méthode à deux liquides peut être appliquée à l’échelle commerciale. « Elle convient à un traitement à la fois continu et rapide de grandes surfaces, » explique Kevin Sivula. « Au vu de la stabilité de ces matériaux et de la relative simplicité de notre méthode de dépôt, notre étude représente une avancée importante vers une conversion énergétique du solaire en combustible réellement rentable ».

Cette étude a été financée par le Centre suisse de compétences en recherche énergétique (SCCER Heat and Electricity Storage) ainsi que par le programme cadre 7 de la Commission Européenne (FP7) via une bourse intereuropéenne Marie Curie (COCHALPEC).

Source :Yu X, Prévot MS, Guijarro N, Sivula K. Self-assembled 2D WSe2 thin films for photoelectrochemical hydrogen production.Nature Communications 01 July 2015. DOI: 10.1038/ncomms8596

Crédit image : Kevin Sivula/EPFL

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Pastilleverte

J’aimerais toutefoisqu’on m’explique ce qu’est une “innovation créative” (ou a contrario que serait une innovation non créative) La conversion du “soleil” en H2 ??? (remarquer que le soleil est une grande boule de H2 et de He en fusio permanente, mais tout de même…) Enfin quel progrès dans le stockage du H2 ainsi produit ? Wait and see.

Vincent977

Pour la conversion de l’énergie solaire en combustible, il y a aussi les arbres…

Tech

oui vincent 977 et pour les véhicules on utilisera des gazogènes au charbon de bois :o)) et à pastille notre champion McPhy se charge du stockage une innovation (réussie) c’est peut être faire ce que quelqu’un n’avait jamais fait créative auquel personne n’avait encore pensé! (une nouvelle méthode) pas de l’amélioration de l’existant! et pourquoi vouloir ainsi sod … miser les diptères? pauvres bêtes ;o)) la science avance et c’est tant mieux.

Tech

c’est vrai que l’ énergie solaire dans une turbine ce serait nouveau ;o)) l’important ce n’est pas le rendement aujurd’hui, mais le potentiel de réalisation demain. imaginez que n’importe qui avec son imprimante à 50 euros puisse “imprimer” les encres qui vont bien pour faire de l’elec, de l’H2 ou autre chose? et en recouvrir sa façade , son toit sa voiture ou ? ! IMAGINEZ, pas le nez collé sur le compteur à 1%! les cellules solaires il y a 50 ans c’était autour de 10% (aujourd’hui, 20, 30, 40% suivant les types!) , il fallait une usine à gaz pour les faire et c’était tellement cher que c’était réservé au spatial ou aux militaires !

pierreerne

Il serait intéressant de connaître comment s’exprime le rendement : 1 % de quoi exactement ?

Sicetaitsimple

c’est vrai que l’ énergie solaire dans une turbine ce serait nouveau ;o)) C’est vrai, c’est nouveau. Bon, pour être honnête, je ne suis pas vraiment convaincu par le concept…..

Tech

à 6CT un peu capillotracté l’argument ;o) hudax va même jusqu’à dire que l’eau c’est aussi le soleil car c’est lui qui l’a évaporée avant qu’elle ne retombe en pluie sur nos montagnes. mais à ce compte le pétrole et le charbon aussi c’est du solaire (stocké !!) :o)))

Dan1

Que le pétrole et le charbon soient de l’énergie solaire ne fait aucun doute. Car presque toute l’énergie procède du soleil sur terre et de toute façon tout procéde du nucléaire dans l’univers : Vous avez juste le choix entre fusion et fission, après c’est de la transformation et du stockage. En matière de stockage longue durée le pétrole est très performant.

marcarmand

Enerzine a publié il y a quelques jours un article sur un électrolyseur avec un rendement de 82% ( ). Combiné au rendement de conversion des panneaux solaires, on arrive à un rendement global de production d’hydrogène de 10 à 20% par rapport à l’énergie solaire reçue. Le procédé décrit ici, avgec un rendement de 1%, n’est donc pas concurrentiel pour l’instant.

Tech

ce n’est pas uniquement le rendement qu’il faut regarder, mais le coût de fabrication! et le diséléniure de tungsten en tant que tel à déjà atteint le 14%. la nouveauté, c’est qu’avec un process type encre et rotative, l’application ne coute plus grand chose, c’est le support de verre qui coute le plus!!