Cultiver l’avenir : le potentiel des algues pour nourrir la planète

Cultiver l'avenir : le potentiel des algues pour nourrir la planète

Une étude récente suggère que certains agriculteurs pourraient contribuer à résoudre le problème de la faim et de la malnutrition tout en ralentissant le changement climatique en se tournant vers l’océan plutôt que la terre.

Selon Patrick Webb, professeur de nutrition à la Friedman School et principal auteur de l’étude, la production et la vente d’algues marines pourraient augmenter les revenus des agriculteurs dans les pays à faible et moyen revenu (PFMR), en particulier dans les régions côtières d’Afrique et d’Asie du Sud-Est.

L’étude a révélé que la culture des algues marines est une alternative plus durable à l’élevage du bétail. Elle n’exige pas de terres, d’eau douce ou d’engrais chimiques, et pourrait devenir particulièrement rentable à mesure que la demande pour des produits à base d’algues riches en nutriments augmente à travers le monde. Ces profits permettraient aux ménages et aux communautés producteurs de ces microalgues de bénéficier d’un pouvoir d’achat accru, favorisant ainsi l’adoption de régimes alimentaires plus sains.

Patrick Webb, qui est également directeur du laboratoire d’innovation pour les systèmes alimentaires à la Tufts, affirme que l’un des plus grands problèmes d’insécurité alimentaire dans les PFMR est l’inabordabilité des régimes alimentaires sains.

Il y a environ 3,5 milliards de personnes dans le monde qui ne peuvent pas se permettre un régime alimentaire sain, même en choisissant des aliments locaux à des prix locaux. Pour beaucoup d’entre eux, la culture et la vente d’algues marines pourraient conduire à des revenus plus élevés et à une meilleure nutrition grâce aux achats sur le marché.” a t-il indiqué.

La culture des algues marines, une pratique respectueuse de l’environnement, est une technique simple existant depuis des siècles en Asie. En plus d’être relativement facile à cultiver, les algues ont une empreinte carbone négligeable et pourraient même contribuer à réduire les niveaux de carbone dans l’océan. Bien que peu de choses soient encore connues sur la quantité de CO2 que les algues libèrent lors de la récolte, des recherches ont montré que les fermes d’algues brunes pérennes absorbent jusqu’à dix tonnes de CO2 par hectare de surface marine par an.

Cependant, malgré les avantages environnementaux de la culture des algues, le changement climatique pourrait poser des obstacles à son expansion. L’eau de mer devient de plus en plus acide, ce qui n’est pas idéal pour la culture d’algues saines et comestibles.

En outre, la principale valeur des algues comme exportation serait pour leurs extraits utilisés comme ingrédients, plutôt que comme légume marin à consommer entier. Alors que les pays à revenu moyen et élevé qui produisent et exportent des algues brunes, vertes et rouges en grande quantité disposent déjà de l’infrastructure nécessaire pour traiter, tester et réguler ce qui pourrait finalement atterrir dans l’assiette des consommateurs, la plupart des PFMR n’en disposent pas.

D’après Patrick Webb, il est crucial de se concentrer sur les étapes prises entre la ferme et la fourchette. “Nous devons travailler plus étroitement avec les gouvernements et le secteur privé pour déterminer où se trouvent les goulets d’étranglement et comment les surmonter.

Si ces obstacles peuvent être surmontés, les opportunités de l’aquaculture des algues sont infinies. L’industrie a prospéré en Indonésie, où la main-d’œuvre saisonnière est régulièrement disponible et où les fermes peuvent atteindre des économies d’échelle industrielles. L’Indonésie est désormais un exportateur clé de deux espèces d’algues à partir desquelles on extrait la carraghénane, un épaississant présent dans les laits et les viandes à base de noix.

Pour que la culture des algues se développe dans ces régions, les gouvernements doivent prendre cette question au sérieux et créer des réglementations de sécurité alimentaire et un environnement propice. L’intérêt pour l’investissement local et international sera également déterminant.

Patrick Webb reste optimiste quant à l’avenir de la production d’algues dans les PFMR. “Le ministère de l’Agriculture, ou même le ministère des Pêcheries dans ces pays, n’a probablement jamais discuté des algues”, a-t-il déclaré. “Et s’ils le faisaient ? Ils pourraient découvrir une mine d’or.

L’étude a été publiée dans Global Food Security. Ses co-auteurs sont Natalie Somers et Shakuntala Thilsted, lauréate du prix mondial de l’alimentation 2021 pour ses recherches et innovations en aquaculture et systèmes alimentaires.

[ Rédaction ]

      

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