Des chercheurs ont étudié les revêtements protecteurs sur des matériaux avancés pour résister à la corrosion dans les réacteurs de fusion. Ils ont testé des couches d’oxyde α-Al2O3 sur des alliages ODS dans un environnement de lithium-plomb à haute température. Même les alliages ODS nus ont formé une couche durable de γ-LiAlO2 in situ, qui a empêché la poursuite de la corrosion. Les couches présentaient une forte adhérence sous contrainte mécanique, ce qui rend ces résultats cruciaux pour l’amélioration de la durabilité des matériaux dans les réacteurs de fusion et les systèmes énergétiques à haute température.
Les réacteurs de fusion, source prometteuse d’énergie durable, nécessitent des matériaux avancés capables de résister aux températures extrêmes et aux environnements corrosifs créés par les liquides de refroidissement métalliques tels que le lithium et l’alliage lithium-plomb (LiPb). Ces liquides de refroidissement sont essentiels dans les réacteurs de fusion pour extraire la chaleur et produire du tritium, mais leur nature corrosive menace l’intégrité des matériaux structurels utilisés. Le LiPb est particulièrement agressif, car il contient une forte concentration de lithium, qui réagit avec les matériaux structurels, provoquant la corrosion et la dégradation des matériaux au fil du temps.
Les alliages ODS FeCrAl, connus pour leur excellente résistance aux températures élevées et à la corrosion, ont été proposés comme candidats prometteurs pour les réacteurs de fusion et d’autres applications à haute température telles que les systèmes d’énergie solaire concentrée. Ces alliages reposent sur la formation de couches d’oxyde protectrices, telles que l’α-Al2O3, qui offrent stabilité et durabilité à haute température. Toutefois, dans un environnement LiPb liquide, les interactions chimiques entre l’alliage et le liquide de refroidissement soulèvent des inquiétudes quant à la stabilité et à la longévité de ces couches protectrices.
Dans cette optique, une équipe de chercheurs de l’Institut des sciences de Tokyo (Science Tokyo), dirigée par le professeur associé Masatoshi Kondo, en collaboration avec l’université nationale de Yokohama, Nippon Nuclear Fuel Development et le département de recherche de l’Institut national des sciences de la fusion, a effectué des tests de corrosion sur les couches d’oxyde formées sur les alliages ODS FeCrAl lors d’une exposition prolongée à du LiPb liquide circulant à des températures élevées.
Les chercheurs ont effectué des tests de corrosion en utilisant deux types d’alliages ODS FeCrAl : SP10 et NF12. Les essais ont été réalisés dans des conditions statiques et d’agitation à 873 K afin de simuler des scénarios réalistes dans les systèmes de refroidissement des réacteurs de fusion. Ils ont utilisé des techniques d’analyse métallurgique avancées, notamment la microscopie électronique à transmission à balayage couplée à la spectroscopie de perte d’énergie des électrons, pour étudier la composition et la microstructure des couches d’oxyde protectrices formées à la surface des alliages.
Ils ont constaté que la couche α-Al2O3 préformée supprimait efficacement la corrosion initiale mais se transformait partiellement en α-/γ-LiAlO2 en raison de l’adsorption de lithium. Il est intéressant de noter que même sans pré-oxydation, les alliages ODS ont développé in situ une couche durable de γ-LiAlO2, qui a servi de barrière protectrice auto-formée. L’analyse microstructurale utilisant la microscopie électronique avancée a révélé la pénétration du lithium dans la couche α-Al2O3, conduisant à la transformation chimique. Malgré cela, les couches α-Al2O3 et γ-LiAlO2 ont montré une forte résistance à l’exfoliation. Des tests de micro-griffage ont confirmé que ces couches adhéraient fortement à la surface de l’alliage, avec une dégradation minimale, même sous des contraintes thermiques élevées causées par la solidification du LiPb.
« La durabilité de la couche d’oxyde de lithium-aluminium montre que ces alliages pourraient durer plus longtemps dans des environnements à haute température et à forte contrainte. Cette couche sert de bouclier durable qui continue à protéger les composants du réacteur même après l’usure initiale », explique M. Kondo.
À mesure que la technologie nucléaire évolue, ces résultats nous rapprochent de la mise au point de réacteurs pouvant fonctionner en toute sécurité pendant une longue période, ce qui rend les sources d’énergie durables plus réalisables. « Nos résultats montrent que les alliages ODS FeCrAl, avec leur capacité à former des couches protectrices durables, pourraient jouer un rôle vital dans les futurs réacteurs de fusion et autres systèmes d’énergie à haute température », déclare M. Kondo, soulignant l’impact de l’étude de recherche.
Légende illustration: Résistance exceptionnelle à la corrosion d’un alliage renforcé par dispersion d’oxyde ODS FeCrAl dans un environnement de couverture liquide avancé pour les réacteurs de fusion.
Article: « Chemical and structural durability of α-Al2O3 and γ-LiAlO2 layers formed on ODS FeCrAl alloys in liquid lithium lead stirred flow » – DOI: 10.1016/j.corsci.2024.112459
Source : Institut des Sciences de Tokyo – Traduction Enerzine.com