Eolien en mer français : “L’export sera indispensable” (Enerpresse)

Après les révélations de la presse à la veille du week-end, Iberdrola reste « optimiste » quant à l’obtention de lots pour développer des parcs éoliens offshore en France.

Jean-Christophe Chomette, directeur d’Iberdrola Renovables France, profite de l’occasion pour souligner de nouveau deux atouts du consortium établi avec Eole RES : le choix de favoriser une technologie éprouvée, qui s’avère être française, et le portefeuille de projets du groupe au Royaume-Uni. Entretien à quelques jours (heures ?) des résultats de l’appel d’offres.

Enerpresse – Après la fuite dans la presse du résultat du dossier de la CRE, dans quel état d’esprit est-vous à quelques jours de l’annonce officielle du ou des vainqueurs ?

Jean-Christophe Chomette – « Avec nos partenaires, nous restons optimistes quant au succès de nos offres sur les zones de Saint-Brieuc et de Saint-Nazaire. Areva, notre fournisseur d’éoliennes, et Technip, notre spécialiste de l’offshore, ont dévoilé leur plan industriel. Usines au Havre pour le premier ; partenariats avec STX et/ou Eiffage Construction Métallique – l’un ou les deux en fonction des résultats – pour le second afin de construire les fondations de type jacket des éoliennes.

Notre plan industriel est très abouti. Il fait exclusivement appel à des ressources françaises. Et ce afin de coller au plus près aux modalités du cahier des charges. Pour assurer la construction des parcs sur les deux zones où nous sommes candidats, 4 000 emplois seraient générés par notre consortium. Avec tous ces éléments, nous ne comprendrions pas ne pas obtenir de lot dans le cadre de ce premier appel d’offres. »

En quoi votre offre se différencie-t-elle de celles des autres candidats ?

Jean-Christophe Chomette – « Certains choix techniques et nos portefeuilles de projets – celui d’Iberdrola et de notre partenaire Eole RES – à l’export sont les deux grands facteurs différenciants. Parlons tout d’abord de la technique. Si nous avons porté notre choix sur Areva pour la turbine, c’est que ce groupe a une machine de 5 MW éprouvée qui tourne. Son usine d’Allemagne a actuellement en commande 120 unités. Ils ne sont pas nombreux en Europe à proposer une machine de cette puissance éprouvée, seules deux offres existent sur le marché.

Deuxième élément : Technip est assurément « le » spécialiste de l’offshore. Personne ne peut prétendre le contraire… Enfin, troisième élément : le choix de construire les fondations de type jacket chez STX à Saint-Nazaire. En cas de succès de nos offres, les jackets seront réalisées tout ou partie aux chantiers de STX de Saint-Nazaire et chez Eiffage Construction Métallique. Ce qui doit assurer 500 emplois à plein temps. Nous savons que les solutions STX ne sont pas retenues par nos concurrents. »

Quant à l’export…

Jean-Christophe Chomette – « Nos portefeuilles de projets au Royaume-Uni et en Allemagne donnent une idée de notre capacité à assurer le développement d’une filière industrielle. Iberdrola et RES, notre partenaire britannique dans le consortium pour concourir en France, totalisent près de 17 500 MW de projets éoliens offshore en Europe, dont 12 500 MW pour Iberdrola. Nous avons 9 400 MW de projets au Royaume-Uni dont celui d’East Anglia que nous développons avec Vattenfall. La taille de ce projet – 7 200 MW, soit 1 400 machines – donne une idée précise de notre ambition. STX, Eiffage Construction Métallique, etc. sont déjà allés au Royaume-Uni pour étudier les meilleures solutions pour East Anglia. Une usine de turbines d’Areva au Havre s’avère particulièrement bien située pour approvisionner ce vaste projet britannique. »

Mais la prise en compte de cette puissance à l’export ne figure pas dans le cahier des charges…

Jean-Christophe Chomette – « En effet, rien en ce sens ne figure dans le cahier des charges de l’appel d’offres. Ce qui ne nous a pas empêché de faire état de nos positions dans les dossiers de candidatures. L’export sera indispensable pour pérenniser une filière française. Sans cela, la taille de l’appel d’offres français – même en comptant le deuxième – n’assure une activité dans la construction d’équipement que pour 3 ou 4 ans. Et après que vont devenir ces usines ?

En cas de succès de nos offres, Areva sera fatalement associé à la construction des turbines pour le parc d’East Anglia (1 400 machines), situé au sud-est de l’Angleterre. Nous prévoyons le démarrage de la construction de ce parc en 2014/2015 au rythme de 200 turbines par an. »

Justement, votre choix du fournisseur des turbines pour East Anglia est-il arrêté ?

Jean-Christophe Chomette – « Pas encore. Notre choix dépend du résultat de l’appel d’offres français. Ce qui est d’ores et déjà sûr c’est qu’il y aura plusieurs fournisseurs, la taille du projet l’impose. Ce qui est également sûr, c’est qu’Areva sera sollicité si nous obtenons des lots en
France. »

Dans une étude de 2009, le Syndicat des énergies renouvelables (SER) estimait que la rentabilité minimale des projets éoliens offshore devrait être comprise « entre 10 % et 12 % (1) ». C’est un objectif ?

Jean-Christophe Chomette – « Nous ne pouvons bien sûr pas communiquer les données économiques de nos offres. Des retours sur investissement de cet ordre nous semblent toutefois nettement surévalués. »

En France, Iberdrola Renovables n’intervient que dans l’éolien. Quel est votre bilan 2011 dans l’éolien à terre ?

Jean-Christophe Chomette – « Iberdrola est présent dans l’éolien en France depuis 9 ans. Nous gérons 320 MW. Fin mars nous avons inauguré un parc de 10 MW. Notre équipe est composée de 40 collaborateurs. Nous disposons également d’un portefeuille de projets totalisant une puissance comprise entre 700 MW et 800 MW. »

Êtes-vous inquiet du recours de l’association Vent de colère devant le Conseil d’Etat sur l’arrêté tarifaire de 2008 ?

Jean-Christophe Chomette – « Bien sûr, nous sommes extrêmement inquiets de cette attaque. Si l’arrêté tarifaire de 2008 était annulé, il ne ferait plus de doute que l’objectif des 19 GW en éolien à terre ne sera pas atteint en 2020. D’autant que nous ne sommes déjà pas sur le bon rythme annuel.

D’ores et déjà, de nombreux parcs en devenir ne pourront être installés dans l’attente d’une nouvelle tarification. J’ajoute également que la réglementation sur les stations « météo » nous oblige à réévaluer notre portefeuille de projets. Tout cela fait que l’on prend du retard sur les objectifs. À force, certains opérateurs pourraient même être tentés de lever le pied. »

Propos recueillis par Philippe Rodrigues


(1) – Etude comparative de la rentabilité des projets éoliens en mer en Europe – France Energie Eolienne (SER) – Juil. 2009.

            

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Jc63

“Jean-Christophe Chomette – « Nous ne pouvons bien sûr pas communiquer les données économiques de nos offres. Des retours sur investissement de cet ordre nous semblent toutefois nettement surévalués. »” Mensonge. Le ROI sur P75 d’un projet éolien c’est minimum 12% pour la majorité des investisseurs à ma connaissance.

Paulo

“Mensonge, Le ROI sur P75 d’un projet éolien c’est minimum 12% pour la majorité des investisseur à ma connaissance” Pouvez-vous étayer votre affirmation, ou cette accusation n’est elle qu’une opinion personnelle diffamante ? Quelles sont vos sources ? la FED ou Vent de Colère ? Je vous propose ce lien sur un investissement que vous pouvez réaliser dans l’éolien en tant que particulier à un taux de rendement beaucoup plus modeste mais réel lui. (onshore)

Jc63

Mes sources? Mes feuilles Excel. Je travaille dans le développement de projets éoliens et dispose donc des données de financement de nos projets.

Samivel51

Le rendement financier de ces projets est egalement affecte par le fait que les depenses (etudes, dossiers de permis…) commencent plusieurs annees avant que le projet ne genere des revenus, et le temps c’est de l’argent, et que certains projets echouent faute de permis.

Paulo

@Jc63 C’est bien de parler de retour d’expérience sur la rentabilité de parcs éoliens offshore. Vous en avez développé combien en France ces dernières années 😉

Jc63

12% sur P75 et 10% sur P90, je maintiens que c’est le standard chez la plupart des investisseurs dans l’éolien terrestre à ma connaissance.

renewable

D’accord avec vous, c’est aussi ce que je vois circuler pour l’Off Shore. Tout le monde prend ses précautions et ses marges de risque, il s’agit d’un appel d’offre et à ce stade très early pour la France c’est pas franchement choquant 🙂 Si ça peut lancer la filière, tant mieux, simplement par la suite il faudra revenir à un tarif d’achat pour faire baisser la facture pour les français et retrouver des TRI plus “industriels”.

Jc63

On est d’accord. Je ne comprend pas les commentaires qui disent le contraire. Ni leurs intérêts à le nier ni leurs sources. Le meilleur financement ce serait bien sûr une nationalisation qui permettrait de baisser le coût de l’installation par amputation du TRI. Mais c’est un autre débat. Toujours est-il que M. Chomette n’a pas dit la vérité dans cet article.

renewable

Oui mais avec quel argent public? Déjà EDF va avoir du mal à financer les 4 projets sur 5 ou il a des chances d’être retenu, s’il veulent en plus investir à nouveau dans le nucléaire (Penly, UK), ça va devenir compliqué sans même parler d’argent public. mais sinon oui sur le principe, une solution intermédiare : emprunter directement (quand il s’agit d’ENR) auprès de la BCE à taux réduit pour faire baisser le cout de la dette?

Tassin

“mais sinon oui sur le principe, une solution intermédiaire : emprunter directement (quand il s’agit d’ENR) auprès de la BCE à taux réduit pour faire baisser le cout de la dette?” C’est précisément ça oui. Sauf que l’état s’est auto-interdit l’emprunter directement à la banque centrale (BF ou BCE). Et c’est pas nos 2 favoris à la présidentielle qui ont l’intention de revenir sur ce cadeau fait aux banques privées.

renewable

mince, 2 fois d’accord avec vous en 15 jours, je faiblis… Heureusement qu’il reste la dernière partie, sur les fusions de géants, ou je ne vois pas franchement l’interêt si ça doit aboutir à des EDF qui grippent tout et bloquent ou retardent toute innovation…

Nicias

La relance par la BEI, c’est pas pour 2012: Elle prévoit d’emprunter, en 2012, 60 milliards d’EUR. Ce programme a été approuvé par le Conseil d’administration le 13 décembre 2011, lors de l’examen du nouveau PAB pour la période 2012-2014. Le volume projeté pour 2012 est à comparer aux 75 milliards d’EUR collectés au titre du programme 2011. La réduction du volume d’emprunt prévue pour 2012 reflète la tendance à la baisse de l’activité de prêt ainsi que la diminution des remboursements d’obligations. Le recul de l’activité de prêt est conforme à l’intention, annoncée en 2008 en concertation avec les actionnaires, de ramener progressivement le volume des financements aux niveaux d’avant la crise après un pic d’activité en 2009­2010. Bon we quand même…