Une nouvelle méthode de séparation huile-eau inspirée de la nature a été conçue dans l’objectif d’offrir de meilleures perspectives dans le domaine de la dépollution. Pour se faire, les chercheurs ont utilisé le mycélium, la structure fibreuse des champignons afin de créer des membranes écoresponsables et performantes.
Les membranes Janus, caractérisées par des propriétés distinctes sur leurs faces opposées, jouent un rôle crucial dans la séparation des mélanges huile-eau. Une face peut présenter une superhydrophilie, une affinité extrême pour l’eau et les liquides polaires, tandis que l’autre peut être superhydrophobe, préférant les liquides non polaires tels que l’huile et les hydrocarbures.
Cette superamphiphilie peut être ajustée pour répondre à des besoins spécifiques en modifiant les propriétés de mouillage de chaque surface de membrane. Toutefois, la plupart des membranes sont fabriquées à partir de matériaux dérivés du pétrole, ce qui génère une importante empreinte carbone et complique leur développement.
Une méthode innovante à base de mycélium
La doctorante Joyce Cavalcante et son superviseur, l’ingénieur chimiste Gyorgy Szekely du KAUST, ont mis au point une méthode qui exploite la structure fibreuse semblable à des racines des champignons, connue sous le nom de mycélium, pour générer des membranes Janus superamphiphiles destinées à la séparation de l’huile et de l’eau.
La scientifique souligne que cette méthode tire parti de la nature auto-croissante des matériaux à base de champignons, offrant une alternative dynamique et écologique au développement traditionnel des membranes.
Le chimiste indique pour sa part que cette approche a été inspirée par le documentaire « Fantastic Fungi », qui révèle les pouvoirs incroyables des champignons en tant que recycleurs naturels et architectes symbiotiques — des rôles souvent méconnus. Le mycélium peut être moulé dans diverses formes pour de multiples applications, réduisant ainsi son empreinte environnementale.
Des performances prometteuses pour l’avenir
Les tests d’absorption d’huile ont montré que les membranes à base de mycélium présentent une sélectivité huile-eau nettement supérieure à celle des autres membranes polymères, y compris les membranes Janus.
« Ces résultats sont prometteurs pour les membranes de nouvelle génération avec une sélectivité et des capacités d’absorption améliorées », précise Joyce Cavalcante.
L’équipe est optimiste quant à la poursuite de ses travaux sur les membranes à base de mycélium et vise à explorer la scalabilité, à optimiser les processus de fabrication et à améliorer encore les performances.
« Restez à l’écoute pour des développements passionnants à l’intersection des mycomatériaux et de l’innovation environnementale », ajoute pour conclure la Doctorante.
En synthèse
La recherche sur les membranes à base de mycélium représente une avancée significative dans la quête de solutions durables pour la gestion des déversements d’hydrocarbures. En exploitant les propriétés uniques des champignons, les scientifiques ouvrent la voie à des technologies de séparation plus respectueuses de l’environnement, tout en offrant des performances supérieures aux méthodes conventionnelles.
Pour une meilleure compréhension
Qu’est-ce qu’une membrane Janus ?
Une membrane Janus est une structure avec deux faces aux propriétés physico-chimiques opposées, l’une superhydrophobe et l’autre superhydrophile, utilisée notamment pour la séparation de mélanges huile-eau.
Pourquoi utiliser le mycélium dans la fabrication de membranes ?
Le mycélium est un matériau renouvelable, biodégradable et capable de croissance autonome, ce qui le rend particulièrement intéressant pour développer des solutions écologiques et durables.
Quels sont les avantages des membranes à base de mycélium ?
Les membranes à base de mycélium offrent une meilleure sélectivité huile-eau et sont produites de manière plus durable, avec une empreinte carbone réduite par rapport aux membranes synthétiques dérivées du pétrole.
Quelles sont les applications potentielles des membranes mycéliennes ?
Outre la séparation huile-eau, le mycélium peut être utilisé dans la fabrication de meubles, de matériaux de construction et de substituts au cuir, entre autres applications.
Quelles sont les perspectives d’avenir pour cette technologie ?
Les recherches se poursuivent pour améliorer la scalabilité et l’efficacité des membranes mycéliennes, avec un potentiel d’application étendu dans le domaine de la dépollution et de la gestion des ressources naturelles.
Références
Légende illustration : Inspirés par un documentaire, les chercheurs de la KAUST ont utilisé le mycélium – la structure fibreuse des champignons – pour créer des membranes Janus superamphiphiles pour la séparation huile-eau. 2024 KAUST ; Ivan Gromicho.
Cavalcante, J. & Szekely, G. Surface engineering of a superamphiphilic, self-growing fibrous Janus membrane prepared from mycelium. Journal of Materials Chemistry A 11, 24598–24607 (2023).| article.
Schwartzberg, L. Fantastic Fungi [Video file]. United States, Moving Art Studio (2019)