Les résidus de l’industrie brassicole suscitent un intérêt croissant dans le domaine de la recherche scientifique. L’Université de Salford explore des méthodes novatrices pour valoriser ces déchets, offrant ainsi de nouvelles possibilités économiques et environnementales pour le secteur.
L’industrie brassicole génère d’importantes quantités de résidus solides, communément appelés drêches de brasserie. Traditionnellement utilisées comme aliment pour le bétail ou simplement mises au rebut, les drêches représentent une source potentielle de composés chimiques valorisables. Au Royaume-Uni, la production annuelle de drêches s’élève à environ 7 499 trillions de tonnes métriques.
Les drêches de brasserie sont essentiellement constituées de polymères de carbone organique. La décomposition de ces polymères permet d’obtenir des molécules chimiques utilisées dans de nombreux secteurs industriels. Cependant, les méthodes actuelles de traitement s’avèrent coûteuses et énergivores, impliquant souvent des températures élevées ou l’utilisation d’acides et de bases fortes.
Une approche enzymatique innovante
À l’Université de Salford, une équipe de chercheurs dirigée par le doctorant Danny Wales développe une méthode plus écologique et économique pour extraire des composés chimiques précieux des drêches de brasserie. Leur approche se concentre sur l’utilisation d’enzymes bactériennes et fongiques capables de rompre les liaisons moléculaires au sein des polymères présents dans les drêches.
Danny Wales a commenté : «Notre objectif est de rendre l’extraction des blocs de construction chimiques dérivés des sucres plus efficace et durable en utilisant différentes enzymes pour des processus de décomposition spécifiques.»
Parmi les composés ciblés par les chercheurs figurent le furfural et d’autres molécules aromatiques, largement utilisés dans les industries des plastiques et des produits pharmaceutiques. La valeur projetée de ces composés sur le marché international en 2030 s’élève à 95,3 milliards de livres sterling pour le furfural et 589,1 millions de livres sterling pour les composés aromatiques.
Le furfural, un composé aux multiples applications
Le furfural, extrait des drêches de brasserie, se révèle être un ingrédient chimique polyvalent. Par hydrogénation catalytique, il peut être transformé en divers produits à haute valeur ajoutée :
– L’alcool furfurylique (FA) : utilisé dans la fabrication de résines, lubrifiants, plastifiants et fibres.
– L’alcool tétrahydrofurfurylique (THFA) : un solvant écologique employé dans les encres d’imprimerie et l’agriculture.
– Le furane et le tétrahydrofurane (THF) : utilisés comme additifs pour carburants ou tensioactifs.
La Dr Rosa Arrigo et son équipe ont réalisé des avancées importantes dans la conversion du furfural en composés utiles. Leurs travaux, publiés dans la revue ChemCatChem, mettent en lumière l’utilisation de nanoparticules de nickel comme catalyseurs. Ces nanoparticules permettent de réduire la pression de gaz hydrogène nécessaire lors des réactions, diminuant ainsi les coûts et améliorant la sécurité.
L’équipe a réussi à contrôler la taille et la forme des nanoparticules, aboutissant à des structures aux caractéristiques uniques. Cette recherche souligne l’importance de la collaboration entre institutions britanniques, italiennes et espagnoles, ainsi qu’avec Diamond Light Source et le UK Catalysis Hub.
Une découverte majeure des travaux de la Dr Rosa Arrigo concerne l’impact de la taille des particules de nickel sur le processus d’hydrogénation. Les particules plus petites produisent principalement de l’alcool furfurylique, tandis que les particules plus grandes conduisent à une hydrogénation plus poussée en furane. Cette compréhension permet une production sélective de composés chimiques spécifiques, rendant les méthodes de fabrication plus efficaces et respectueuses de l’environnement.
Des répercussions plus larges pour l’industrie brassicole
Les travaux innovants menés à l’Université de Salford s’inscrivent dans un effort plus vaste visant à faire progresser la biotechnologie et à soutenir l’industrie brassicole. Le MicroJoule Brew Lab, dirigé par le Dr Ale Diaz De Rienzo et le Prof Ian Goodhead, collabore avec des brasseurs pour séquencer des variétés de levures uniques, tester de nouveaux équipements et éliminer la contamination bactérienne dans les brasseries.
Récemment, la Dr Silvia Tedesco du Centre for Sustainable Innovation a rejoint l’équipe, apportant son expertise en génie chimique sur la conversion des déchets lignocellulosiques en acide lévulinique dans les systèmes catalytiques thermochimiques.
Grâce à la puissance de la collaboration industrielle, les chercheurs de l’Université de Salford font non seulement progresser les connaissances scientifiques, mais ouvrent également la voie à un avenir plus durable et prospère pour l’industrie brassicole et au-delà. Leurs travaux démontrent comment les déchets peuvent être transformés d’une source de préoccupation environnementale en une ressource précieuse, contribuant à un avenir plus écologique et durable.
Légende illustration : cuve de la Brasserie Larkhill
Article adapté du contenu des auteurs : Daniel Wales, Natalie Ferry, Rosa Arrigo (School of Science, Engineering and Environment at the University of Salford), and Silvia Tedesco (Centre for Sustainable Innovation at the University of Salford)