Lorsque la Terre se déplace dans l’espace, elle oscille légèrement. Une équipe de chercheurs de l’Université technique de Munich (TUM) et de l’Université de Bonn a désormais réussi à mesurer ces fluctuations de l’axe terrestre à l’aide d’une méthode totalement nouvelle, qui n’était jusqu’à présent possible qu’à travers une radioastronomie complexe. L’équipe a utilisé le laser annulaire de haute précision de l’observatoire géodésique de la TUM à Wettzell, en Bavière.
Les résultats de cette expérience menée pendant 250 jours ont été publiés dans la célèbre revue scientifique Science Advances. Le professeur K. Ulrich Schreiber, auteur principal de l’article et membre de l’Institut d’ingénierie pour la géodésie astronomique et physique de la TUM, souligne : « Nous avons fait d’énormes progrès dans la mesure de la Terre. Ce que notre laser à anneau permet de faire est unique au monde. Nous sommes 100 fois plus précis qu’auparavant avec des gyroscopes ou d’autres lasers à anneau. La mesure précise des fluctuations nous aide à mieux comprendre et modéliser le système terrestre avec une grande précision. »
La Terre vacillante
En réalité, l’axe de la Terre n’est pas fermement ancré dans le ciel, comme il apparaît sur un globe terrestre. Diverses forces agissent sur lui, le faisant vaciller à des degrés divers. L’influence la plus forte est la forme imparfaite de la Terre, qui présente un léger renflement à l’équateur par rapport aux pôles. L’effet connu sous le nom de précession fait que l’extension de l’axe de la Terre trace un cercle dans le ciel. Actuellement, il est aligné précisément avec l’étoile polaire. Mais à l’avenir, il s’alignera avec d’autres étoiles avant de revenir à l’étoile polaire dans un cycle de 26 000 ans.
Cependant, les forces gravitationnelles du soleil et de la lune, qui se renforcent ou s’affaiblissent parfois mutuellement, exercent également une attraction sur l’axe de la Terre. Cet effet, connu sous le nom de nutation, provoque de petits mouvements ondulatoires dans le cercle de précession de l’axe terrestre. Il existe une nutation distincte avec une période de 18,6 ans, mais aussi de nombreuses autres plus petites avec des fluctuations hebdomadaires ou quotidiennes. En conséquence, l’axe ne vacille pas de manière uniforme, mais avec des degrés d’intensité variables.
Une précision sans précédent
Le laser en anneau a pu mesurer tous ces effets directement et en continu pendant 250 jours avec un niveau de précision jusqu’alors inconnu pour les capteurs inertiels, c’est-à-dire les capteurs qui fonctionnent indépendamment des signaux externes. Contrairement au passé, cela ne nécessite pas un réseau de plusieurs grands radiotélescopes (VLBI) sur différents continents. Le laser en anneau peut faire tout cela seul dans un instrument relativement petit situé dans une installation souterraine à Wettzell. De plus, la résolution temporelle des fluctuations est inférieure à une heure au lieu d’une journée, et les résultats sont disponibles immédiatement, plutôt qu’après plusieurs jours ou semaines, comme c’est le cas avec le VLBI.
Avec une nouvelle augmentation de la précision et de la stabilité des mesures du laser en anneau d’un facteur 10 à l’avenir, il serait même possible de mesurer la distorsion de l’espace-temps causée par la rotation de la Terre, ce qui permettrait de tester directement la théorie de la relativité. Cela permettrait, par exemple, de tester directement à la surface de la Terre l’effet Lense-Thirring, c’est-à-dire le « glissement » de l’espace sous l’effet de la rotation de la Terre.
K. Ulrich Schreiber, Urs Hugentobler, Jan Kodet, Simon Stellmer, Thomas Klügel, Jon-Paul R. Wells: Gyroscope Measurements of the Precession and Nutation of the Earth Axis, published in: Science Advances, September 3, 2025, DOI: 10.1126/sciadv.adx6634
Source : TUM