Méfiance des suisses à l’égard du nucléaire

La majorité de la population suisse se méfie de l’énergie nucléaire, ils exigent une solution rapide et concrète pour la gestion des déchets radioactifs et une implication directe dans les processus de décision. C’est ce qui ressort en particulier d’une enquête sur l’énergie nucléaire et sur les déchets radioactifs menée en Suisse durant l’été 2008.

Sur mandat de l’Office fédéral de l’énergie, une enquête représentative a été menée cet été dans toutes les régions du pays. Un sondage quasiment identique avait été effectué au printemps 2008 sur mandat de la Commission européenne dans les 27 Etats membres de l’UE. Le rapport publié aujourd’hui par l’Office fédéral de l’énergie présente les résultats suisses et les compare à ceux des consultations de l’UE.

Principaux résultats:

Méfiance à l’encontre du nucléaire

  • La plupart personnes interrogées se méfient de l’énergie nucléaire : 52% se prononcent partiellement ou totalement contre la production nucléaire d’électricité. 40% y sont favorables. En Suisse, le refus de l’énergie nucléaire est donc beaucoup plus net que dans l’UE, où seuls 45% des gens se disent opposés au nucléaire.
  • S’il existait une solution sûre et durable pour la gestion des déchets radioactifs, 37% des opposants au nucléaire changeraient d’avis, alors que la majorité (53%) camperait sur ses positions.
  • Une large majorité des personnes interrogées reconnaît les avantages de l’énergie nucléaire, notamment en ce qui concerne la diversification des sources d’énergie (66%) ainsi que la diminution des émissions de gaz à effet de serre (65%) et la réduction de la dépendance au pétrole (57%).
  • 77% des personnes interrogées considèrent que les plus gros inconvénients du nucléaire sont les risques d’accidents et la menace d’attentats terroristes. Plus de sept personnes sur dix (72%) ne pourraient pas habiter à proximité d’une centrale nucléaire.
  • Les hommes (49%) sont nettement plus nombreux à soutenir l’énergie nucléaire que les femmes (32%). 74% personnes qui se situent plutôt à gauche sur l’échiquier politique rejettent le nucléaire, alors qu’ils ne sont que 41% au centre ou 35% à droite. L’énergie nucléaire est mieux acceptée dans les milieux ruraux (47%) que dans les grandes villes (29%). En Suisse alémanique, où se trouvent les cinq centrales nucléaires helvétiques, le taux d’acceptation oscille entre 39% et 45% et est donc supérieur à celui de la Suisse romande (36%) ou de la Suisse italienne (33%). Les résultats démontrent en outre que les citoyens et citoyennes s’estimant bien informés sur les déchets radioactifs sont mieux disposés envers l’énergie nucléaire.

Attitude face aux déchets radioactifs et aux dépôts en couches géologiques profondes

  • La quasi-totalité suisses interrogés, soit 97%, estiment qu’une solution concrète pour les déchets radioactifs doit être trouvée maintenant et qu’on ne peut pas laisser ce problème aux générations futures.
  • 46% considèrent les dépôts des déchets radioactifs en couches géologiques profondes comme étant la méthode la mieux adaptée pour un stockage à long terme. 34% refusent ce type de dépôts, alors que 20% ignorent quelle serait la meilleure solution. En même temps, 77% pensent qu’il n’y a pas de solution sûre pour la gestion des déchets radioactifs.
  • Au cas où un dépôt en couches géologiques profondes serait construit à proximité de leur domicile, 6 citoyens ou citoyennes suisses sur 10 (60%) exigent d’être informés personnellement et intégrés au processus de décision. 17% souhaitent voir les organisations non gouvernementales locales (ONG) impliquées dans le processus décisionnel et seulement 18% aimeraient laisser les seules autorités compétentes prendre les décisions.
  • Si l’on construisait un dépôt en couches géologiques profondes près de chez eux, 53% des gens craignent des nuisances possibles pour la santé et l’environnement. Le risque que des substances radioactives puissent s’échapper de leur contenant inquiète 25% des sondés, tandis que d’autres expriment leur inquiétude concernant le transport des déchets jusqu’au dépôt final (11%), les attentats terroristes (4%) ou la dépréciation potentielle des biens-fonds et des immeubles (3%).

Etat actuel des connaissances sur les déchets radioactifs

Pour tester l’état objectif de leurs connaissances sur les déchets radioactifs, les sondés ont été confrontés à des énoncés qu’ils devaient taxer de vrais ou faux. Il en est ressorti que les connaissances des citoyens et citoyennes suisses sur les déchets radioactifs sont plutôt limitées. En comparaison européenne, ils se sentent toutefois mieux renseignés sur les déchets radioactifs et semblent effectivement disposer de meilleures connaissances que les citoyens de l’UE.

  • 58% du panel s’estiment mal informés sur les déchets radioactifs, alors que 41% se considèrent comme bien informés. Les Suisses s’estiment ainsi nettement mieux renseignés que la population de l’UE, dont 74% affirment ne pas être informés du tout.
  • 80% des sondés savent qu’il existe diverses catégories de déchets (déchets de faible, de moyenne et de haute activité) et que les centres de recherche ainsi que les hôpitaux et certaines industries produisent aussi des déchets radioactifs. Mais environ un tiers seulement (33%) savent que les quantités des diverses catégories de déchets ne sont pas identiques.
  • 81% des personnes interrogées sont d’avis que tous les déchets radioactifs, toutes catégories confondues, sont très dangereux.
  • 82% sont au courant de l’entreposage des déchets radioactifs dans des centres spéciaux de stockage intermédiaire jusqu’à la construction de dépôts finals. 42% croient aussi qu’une partie des déchets radioactifs sont immergés, qu’ils sont envoyés à l’étranger pour les éliminer (79%) ou que les déchets sont déjà entreposés aujourd’hui dans des dépôts en couches géologiques profondes (79%).
  • Les hommes sont mieux au courant des déchets radioactifs que les femmes. Elles sont seulement 49% à avoir répondu correctement aux questions alors que 58% des hommes ont donné des réponses justes. On a également constaté que les personnes de la classe d’âge de 25 à 54 ans ont le meilleur niveau de connaissances, cela également chez les sondés bénéficiant d’une plus longue formation et chez ceux se situant plutôt à gauche sur l’échiquier politique.

Fiabilité des sources d’information

Les informations sur les déchets radioactifs que les citoyens et citoyennes suisses jugent les plus fiables émanent de sources indépendantes, notamment d’ONG (33%), d’hommes et de femmes de science (32%) ainsi que d’organisations internationales qui s’engagent pour l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire (30%). Un quart (24%) se fient cependant aux informations de la Nagra et un quart aussi à celles du Conseil fédéral. Les Helvètes font le moins confiance aux informations distillées par les médias (7%).

La procédure suisse de sélection de sites est codifiée dans le plan sectoriel «Dépôts en couches géologiques profondes». Celui-ci prévoit de vastes processus de participation dans lesquels la population concernée et les communes peuvent faire part de leurs besoins et de leurs intérêts. On attache également une grande importance à une information transparente et à des décisions compréhensibles. On procède en outre à un examen précoce et approfondi des nuisances potentielles d’un dépôt en couches géologiques profondes.

Le rapport complet sur l’enquête en Suisse "Attitudes towards radioactive waste in Switzerland" (seulement en langue anglaise) est disponible sur le site Internet de l’Office fédéral de l’énergie.

Le rapport complet sur l’enquête en Europe "Attitudes towards radioactive waste" (en allemand et en anglais) est disponible à l’adresse Internet ci-dessous:.

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