Bruxelles veut optimiser les systèmes de chauffage et de refroidissement

La Commission européenne a présenté le 16 février la première stratégie destinée à optimiser les systèmes de chauffage et de refroidissement dans les bâtiments et l’industrie. Ce secteur représente 50 % de la consommation annuelle d’énergie de l’UE.

En quoi consiste la première communication sur une stratégie en matière de chauffage et de refroidissement et quel est son objectif ?

"La stratégie de l’UE en matière de chauffage et de refroidissement est la première initiative que l’UE consacre à l’énergie consommée par les systèmes de chauffage et de refroidissement utilisés dans les bâtiments et dans l’industrie, qui représente aujourd’hui 50 % de la consommation annuelle d’énergie de l’UE. Rendre ce secteur plus intelligent, plus efficace et plus durable permettra de faire diminuer les importations et la dépendance à l’égard de l’énergie, de faire baisser les coûts et de réduire les émissions. Cette stratégie est une des actions phares du cadre stratégique pour une union de l’énergie. Elle contribuera à l’amélioration de la sécurité énergétique de l’UE et à la mise en œuvre du programme d’action en faveur du climat après la COP 21."

Qu’entend-on par «chauffage et refroidissement» ?

"Il s’agit de l’ensemble des systèmes, consommateurs d’énergie, utilisés pour chauffer ou refroidir les bâtiments, du secteur résidentiel ou du secteur des services (écoles, hôpitaux, immeubles de bureaux, par exemple). Quasiment tous les processus industriels nécessaires à la fabrication des produits que nous utilisons au quotidien font eux aussi appel à de tels systèmes. Ceux-ci sont également très répandus dans le secteur des services, et notamment celui du commerce de détail (pour assurer la conservation des produits alimentaires tout au long de la chaîne d’approvisionnement, depuis la production jusqu’au supermarché et au consommateur)."
 
Que représente le secteur du chauffage et du refroidissement en Europe ?

"Actuellement, 50 % de la consommation annuelle d’énergie de l’UE est imputable à ce secteur. Il représente 13 % de la consommation de pétrole et 59 % de la consommation totale de gaz de l’UE (utilisation directe uniquement), soit 68 % du total des importations de gaz."

"En effet, en Europe, les bâtiments sont anciens, ce qui pose divers problèmes : Près de la moitié des bâtiments de l’UE possèdent des chaudières installées avant 1992 et dont le rendement est inférieur à 60 %; 22 % des chaudières à gaz, 34 % des chauffages électriques directs, 47 % des chaudières au fioul et 58 % des chaudières à charbon ont dépassé leur durée de vie technique."

"La rénovation des bâtiments existants pourrait permettre de réduire la consommation d’énergie mais le taux de rénovation est actuellement inférieur à 1 %."

"Le secteur utilise peu de sources d’énergie renouvelables: la principale source d’énergie primaire utilisée pour le chauffage et le refroidissement est le gaz naturel (46 %), suivi du charbon (environ 15 %), de la biomasse (environ 11 %), du fioul (10 %) de l’énergie nucléaire (7 %) et de certaines sources d’énergie renouvelables (éolien, photovoltaïque et hydroélectricité, environ 5 %). Les autres sources d’énergie renouvelables, telles que l’énergie solaire (thermique), la chaleur ambiante et l’énergie géothermique représentent au total 1,5 % de la consommation, et les autres combustibles fossiles 4 %. La part globale des énergies renouvelables dans la consommation d’énergie primaire du secteur du chauffage et du refroidissement est actuellement de 18 % et il est tout à fait possible de l’accroître."
 
"Le gaspillage d’énergie est trop important: selon les estimations, la chaleur générée par les processus industriels et dissipée ensuite dans l’atmosphère ou dans l’eau permettrait de satisfaire la totalité des besoins en matière de chauffage des secteurs résidentiel et tertiaire de l’UE[1]."

Que prévoit la stratégie ?

"Pour mettre fin à la déperdition d’énergie dans les bâtiments, maximiser l’efficacité et accroître la part des énergies renouvelables, la stratégie de l’UE en matière de chauffage et de refroidissement prévoit les actions suivantes :

1) Faciliter la rénovation des bâtiments

Élaboration d’une panoplie de mesures destinées à faciliter la rénovation des immeubles à plusieurs appartements, telles que l’installation d’équipements de chauffage et de refroidissement modernes (pompes à chaleur, par exemple), l’utilisation de matériaux d’isolation et la fourniture d’une assistance sur les étapes à suivre.

Un meilleur partage des gains permettant aux locataires comme aux propriétaires de tirer parti des investissements consentis pour rénover les bâtiments et appartements anciens, ou pour remplacer leurs installations de chauffage anciennes par des systèmes modernes performants utilisant les sources d’énergie renouvelables ou la chaleur provenant de réseaux de chauffage urbains intelligents de nouvelle génération.

Promotion de modèles d’efficacité énergétique éprouvés pour les bâtiments scolaires et les hôpitaux publics, afin de fournir aux autorités concernées des exemples concernant le recours à des sociétés de services énergétiques, l’utilisation de contrats de performance énergétique et de marchés publics ou de solutions d’auto-consommation pour rendre ces bâtiments plus efficaces, des conseils sur la rénovation énergétique et sur l’installation de systèmes de chauffage et de refroidissement faisant appel à des sources d’énergie renouvelables propres. Cela permettra aussi de faire baisser les coûts du matériel pédagogique, des ordinateurs, des installations sportives, des bibliothèques ou des cantines, par exemple, et d’accroître le pouvoir d’achat.

Renforcement de la fiabilité des certificats de performance énergétique, lesquels seront réévalués dans le cadre de la révision de la directive sur la performance énergétique des bâtiments. Les consommateurs et les investisseurs pourront ainsi bénéficier d’informations claires sur l’utilisation des énergies renouvelables dans les bâtiments et les signaux adressés au marché favoriseront le recours à ce type d’énergie dans les bâtiments.

2) Accroître la part des énergies renouvelables

Aujourd’hui, le secteur du chauffage et du refroidissement est encore largement tributaire des combustibles fossiles. Les énergies renouvelables ne représentent que 18 % de l’approvisionnement en énergie destinée au chauffage et au refroidissement. La stratégie en matière de chauffage et de refroidissement met en évidence la complémentarité entre l’efficacité énergétique et le déploiement des énergies renouvelables.

Les possibilités d’accroître la part de solutions fondées sur les énergies renouvelables dans les bâtiments seront examinées dans le cadre des futures révisions des directives sur la performance énergétique des bâtiments et sur les sources d’énergie renouvelables.

Des aides financières en faveur du déploiement de technologies fondées sur les énergies renouvelables sont disponibles au titre des fonds structurels et d’investissement européens, du programme de recherche et d’innovation «Horizon 2020» et du plan stratégique pour les technologies énergétiques.

3) Réutilisation de l’énergie résiduelle provenant de l’industrie

Les installations industrielles et de production d’électricité génèrent d’importantes quantités de chaleur et de froid résiduels qui, actuellement, ne sont pas utilisées et se dissipent dans l’atmosphère ou dans l’eau.

Un certain nombre de solutions peuvent être mises en œuvre:

– alimentation directe par un système de chauffage urbain : c’est déjà le cas en pratique, par exemple à Göteborg, en Suède, où plus de 90 % de tous les immeubles à appartements sont chauffés par la chaleur résiduelle provenant des installations industrielles du voisinage (raffineries et usines chimiques), de l’incinération des déchets et de la cogénération (production simultanée d’électricité et de chaleur, les deux produits étant consommés) et acheminée par un réseau de chauffage urbain de 1000 km;

– refroidissement par la cogénération et les refroidisseurs à absorption, qui transforment la chaleur en froid et pourraient être utilisés dans des bâtiments desservis par un réseau urbain. L’absorption est un processus qui convertit la chaleur résiduelle provenant d’incinérateurs de déchets ou de raffineries par exemple, pour l’utiliser, pendant les mois d’été, dans des applications de refroidissement. Cette solution est déjà mise en pratique dans de nombreux systèmes de refroidissement urbains. Ainsi, à Vienne, pendant l’été, le système de refroidissement urbain fournit du froid à partir de la chaleur produite par l’incinérateur de déchets avec système de cogénération;

– développement des infrastructures: Les autorités nationales et locales peuvent jouer un rôle capital en déterminant leur potentiel économique en matière de chaleur ou de froid résiduel, en créant les réglementations appropriées et en aidant au développement des infrastructures nécessaires pour exploiter ce potentiel.

4) Faire participer les consommateurs et l’industrie

Consommateurs: les propriétaires, les locataires, les gestionnaires de bâtiments et les autorités publiques devraient pouvoir prendre, en connaissance de cause, des décisions sur la rénovation des bâtiments, les solutions en matière de chauffage/refroidissement fondées sur des énergies renouvelables, les possibilités d’économiser de l’énergie en utilisant des outils avancés de mesure, facturation, contrôle en temps réel du chauffage et du refroidissement et systèmes automatisés. Ils doivent disposer de moyens accrus pour comprendre ce qu’ils peuvent faire, comment structurer leurs projets et accéder au financement.

Industrie: l’industrie représentait plus d’un quart de la consommation finale d’énergie de l’UE en 2012. La plus grande partie de l’énergie utilisée dans ce secteur, soit 73 %, était destinée au chauffage et au refroidissement.

Dans les industries à forte intensité énergétique, on recense trois moyens principaux d’améliorer l’efficacité énergétique du chauffage et du refroidissement. (1) l’amélioration des processus industriels eux-mêmes, (2) l’intégration de la chaleur entre processus de différentes installations (et l’intégration d’autres énergies et ressources) pour récupérer la chaleur excédentaire sur les sites, et (3) le transfert, par des réseaux de chaleur, de la chaleur à basse température non utilisée vers des consommateurs de chaleur du voisinage extérieurs au site industriel, tels que les municipalités."

Quels sont les avantages attendus ?

"La mise en œuvre de la stratégie devrait se révéler bénéfique pour tous, et notamment pour :

Les particuliers : les Européens jouiront de meilleures conditions de vie, d’un confort accru et d’une meilleure santé. Ils bénéficieront d’un environnement de meilleure qualité qui sera durable pour les générations futures, et ils verront diminuer leurs dépenses mensuelles et annuelles de chauffage. Par exemple, si votre maison est équipée d’une chaudière à gaz traditionnelle qui utilise 20 MWh d’énergie par an, la remplacer par une nouvelle chaudière à gaz à condensation pourrait vous permettre d’économiser 275 euros par an. Des systèmes de chauffage efficaces, fondés sur les sources d’énergie renouvelables, tels que des pompes à chaleur combinées avec des chauffe-eau solaires, peuvent faire baisser les dépenses annuelles en énergie d’un ménage de 1500-2000 euros à 300-500 euros. En outre, les consommateurs passifs actuels peuvent échapper, dans une certaine mesure, aux fluctuations des prix de l’énergie et même devenir des «prosommateurs», c’est-à-dire de petits producteurs d’énergie renouvelable qui vendent leur énergie excédentaire sur un marché libéralisé;

Les travailleurs : la fabrication et l’installation d’équipements et de matériaux efficaces en énergie et fondés sur les énergies renouvelables sont des activités à forte intensité de main-d’œuvre, susceptibles de créer, en moyenne, deux fois plus d’emplois que la fabrication et l’installation d’équipements de production d’énergie conventionnels. Les biens et services efficaces en énergie vendus en 2010 ont permis de créer environ 900 000 emplois directs et 2,4 millions d’emplois indirects en Europe;

L’industrie: Il est possible de faire baisser les coûts énergétiques de 4 à 10 %, avec des investissements récupérés en moins de 5 ans."

"Cela entraînera également une réduction des émissions de CO2 et de la pollution atmosphérique :

Compte tenu des objectifs climatiques de l’UE, on s’attend à une baisse de 42 % à 56 % de la demande de chauffage et de refroidissement d’ici à 2050, qui devrait entraîner une diminution correspondante des émissions de CO2. Le secteur devrait jouer un rôle capital dans la réduction des émissions.

Par exemple, la nouvelle réglementation de l’UE en matière d’étiquetage énergétique et d’exigences d’écoconception applicable aux chaudières, qui prévoit, pour la première fois, un classement en fonction des performances énergétiques, devrait permettre d’économiser 600 TWh d’énergie et de réduire les émissions de CO2 de 135 millions de tonnes d’ici à 2030.
Le nouveau règlement fixant des exigences d’écoconception applicables aux appareils de chauffage à air, aux appareils de refroidissement, aux refroidisseurs industriels haute température et aux unités de ventilo-convection complète l’ensemble des prescriptions d’écoconception relatives au chauffage et au refroidissement. Les économies de combustibles escomptées sont de l’ordre de 5 Mtep par an en 2030, soit 9 millions de tonnes d’émissions de CO2.

La diminution de la consommation d’énergie et l’accroissement de la part des énergies renouvelables dans le secteur du chauffage et du refroidissement contribueront notablement à la réduction de la pollution atmosphérique, notamment dans les zones urbaines.

Comment le secteur du chauffage et du refroidissement peut-il aider à la réalisation des objectifs de l’UE en matière d’efficacité énergétique et d’énergie renouvelable?
L’UE est en bonne voie pour atteindre son objectif de 20 % d’énergies renouvelables d’ici à 2020. Toutefois, seule une mise en œuvre complète de la législation européenne actuelle sur l’efficacité énergétique permettra de réaliser l’objectif de 20 % d’efficacité énergétique. Le secteur du chauffage et du refroidissement a donc un rôle crucial à jouer pour la réalisation des objectifs de l’UE en matière d’efficacité énergétique et d’énergie renouvelable
."

Comment se situe l’Europe par rapport à d’autres régions du monde ?

"L’Europe est un acteur mondial de premier plan dans le domaine de l’efficacité énergétique et de l’énergie renouvelable :

– plus de 90 % des chaudières à haut rendement utilisant les énergies renouvelables vendues et utilisées en Europe ont été développées et fabriquées par des entreprises européennes;

– l’Europe est la région du monde où la part de la cogénération dans la production d’électricité et de chaleur est la plus élevée, devant les États-Unis et le Japon;

elle est aussi le berceau de nouvelles technologies émergentes telles que la cogénération par pile à combustible et le chauffage et le refroidissement géothermiques. Ses entreprises innovantes du secteur du chauffage et du refroidissement urbains n’ont pas de concurrents capables de rivaliser avec elles en matière de produits et d’expertise. Elles exportent et installent leurs systèmes exclusifs en Chine, en Corée du Sud, en Russie ou encore au Moyen-Orient."

Quelle est la vision à long terme ?

"L’Europe veut décarboner son parc immobilier d’ici à 2050. Cela signifie que l’Europe économiserait tous les ans environ 40 milliards d’euros sur ses importations de gaz et 4,7 milliards d’euros sur ses importations de pétrole. Les émissions de CO2 de l’UE seraient réduites de 30 % et les Européens verraient leurs dépenses domestiques de chauffage et de refroidissement baisser de 70 %. La pollution atmosphérique due au chauffage et au refroidissement diminuerait de plus de 90 %, ce qui éliminerait les problèmes sanitaires qui en découlent.

Dans l’industrie, une approche analogue peut être envisagée, en tirant parti des avantages économiques que présentent l’accroissement de l’efficacité énergétique et les nouvelles solutions techniques.On estime que la simple mise en œuvre de solutions disponibles et commercialement viables pourrait permettre à l’industrie de réduire sa consommation de 4-5 % en 2030 et de 8-10 % en 2050. La part des énergies renouvelables atteindrait 30 % et des technologies novatrices contribueraient à la décarbonation de l’industrie tout en diminuant de 30 à 50 % l’intensité énergétique des processus de production."
 
Quelles sont les prochaines étapes ?

"Le passage à un secteur du chauffage et du refroidissement à faibles émissions de carbone nécessite un engagement de tous les acteurs concernés. Cette démarche s’inscrira dans le cadre de gouvernance économique au niveau de l’Union pour 2030 et les actions concrètes seront mises en œuvre

1. par les révisions législatives de :  la directive sur l’efficacité énergétique, la directive sur la performance énergétique des bâtiments et l’initiative «Financement intelligent pour bâtiments intelligents» en 2016; la nouvelle organisation du marché de l’électricité et la proposition relative à un cadre concernant les énergies renouvelables en 2016;

2. par une série d’actions non législatives parmi lesquelles: l’élaboration d’une panoplie de mesures destinées à faciliter la rénovation des immeubles comprenant plusieurs appartements; la promotion de modèles d’efficacité énergétique éprouvés pour les bâtiments scolaires et les hôpitaux du secteur public; le développement des travaux de l’initiative de «renforcement des compétences» visant à améliorer la formation des professionnels de la construction, notamment grâce à un nouveau module destiné aux experts du secteur énergétique et aux architectes."

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J.T.

La solution maison positive étanche et parfaitement isolée est ambiguë :
– face à la pollution d’une part, car plus polluée que la rue de l’intérieur et les filtrations pas l’idéal (sauf à brumisation d’eau) ;
– face aux canicules grandissantes d’autre part, car trop isolée de la fraîcheur du sol, si pas de plain-pied !
La maison électrique de plain pied devrait être donc l’avenir à terme, grâce aux énergies renouvelables, moins coûteuses en transport d’électricité qu’en réseau méthane à fuites inévitables.
La généralisation des véhicules électriques devrait donner toute leur valeur aux réseaux ruraux “GRID électrique” de méthanisation alimentant ceux-ci en électricité plutôt qu’en réseaux souterrains Gaz, bcp plus coûteux !