Canne à sucre : une culture qui produit aussi de l’énergie

Avec une demande en bioénergie croissante, l’exploitation des sous-produits de la canne à sucre, comme la bagasse et l’éthanol, pourrait devenir plus rentable. Encore faut-il déterminer les conditions dans lesquelles cette production peut être à la fois optimale et compatible avec des rendements en sucre élevés.

Une équipe du Cirad, associée à la société eRcane, a entrepris une étude complexe et originale sur toute la chaîne de production, du champ à l’usine, pour déterminer l’incidence des facteurs de production sur le rendement en biomasse et sa qualité, mais aussi sur la répartition de la biomasse aérienne entre production alimentaire et énergétique.

Depuis quelques années, la demande mondiale en denrées de base et en énergie, notamment en énergie propre et renouvelable, ne cesse de croître. La canne à sucre, qui produit du sucre (saccharose), mais aussi une importante biomasse de fibres et d’autres sucres utilisables en bioénergie, s’avère une excellente culture polyvalente. Mais jusqu’à présent, les systèmes de culture de cette filière ont été mis au point pour optimiser les rendements d’un seul produit : le saccharose.

Désormais, l’ensemble des produits d’une canne pourrait être encore mieux valorisé. Encore faut-il connaître l’incidence du génotype, de l’environnement pédoclimatique et des itinéraires techniques, non seulement sur la production de saccharose, mais aussi sur celle de ses coproduits. Une équipe du Cirad, associée à la société de recherche-développement réunionnaise eRcane, a donc entrepris une étude complexe et originale sur toute la chaîne de production, du champ à l’usine, pour déterminer les effets des facteurs de production sur le rendement en biomasse et sa qualité, mais aussi sur la répartition de la biomasse aérienne entre production alimentaire et énergétique.

Des expérimentations du champ à l’usine

L’équipe a mis en place, à la Réunion, une série d’expérimentations dans des conditions climatiques très contrastées.

Ces expérimentations comprenaient plusieurs types de variétés, sucrières et mixtes. Elles devaient permettre de mieux comprendre, selon les modes de récoltes et le climat, le comportement des différents types de canne en fonction des usages envisageables à court terme : production de sucre, d’éthanol de première génération et d’électricité par combustion.

Une étude originale et complexe

Par rapport aux études classiques, cette étude originale comprend une analyse détaillée de la qualité des cannes produites, notamment des lignocelluloses. Elle s’est aussi intéressée aux effets du mode de coupe, avec la dissection des différents organes, et à l’interaction entre génotype, gestion et environnement.

Elle s’est surtout focalisée sur l’analyse de la production finale de plusieurs produits en utilisant une approche intégrée, qui associe expérimentations multilocales, équations de transferts et modèles de simulation des processus de transformation, établis par eRcane, basés sur des critères de qualités variés résultant de ces expérimentations.

De multiples facteurs à prendre en compte

Au champ, la production et la qualité de la biomasse sont affectées différemment selon les conditions environnementales, les génotypes et les pratiques de gestion (mode de coupe, récolte).
A l’usine, les antagonismes dans la production de coproduits entre les ateliers de transformation modulent fortement les résultats sur la qualité obtenus au champ. Ainsi, une matière première riche en sucre mais trop fibreuse ou de faible pureté limite la production finale de sucre.

Les prix des différents produits et le mode de paiement de la canne peuvent eux aussi modifier les résultats trouvés au champ ou après transformation. Par exemple, le prix actuel de la tonne de sucre, très élevé par rapport au prix du kWh, favorise la production de sucre par rapport à celle d’électricité.

Un outil précieux pour les planteurs, usiniers et décideurs

Dans une situation complexe, qui comporte de nombreux antagonismes lors de la transformation en coproduits, cette approche globale et intégrée est un outil précieux pour les planteurs, usiniers et décideurs. Elle permet de jouer sur les conditions environnementales, les pratiques agricoles, le fonctionnement des ateliers de transformation, les coûts et les prix pour optimiser une production multiusages de la canne à sucre.

Reste à prendre en compte, pour que cette démarche soit exhaustive, d’autres critères qui ont un impact sur le fonctionnement des usines, comme le niveau global de production et le débit horaire, et des études à l’échelle de la filière, sur le bilan carbone et sur l’intérêt agronomique et économique de sous-produits agricoles, comme les pailles, traités hors champ.

[ Credit photo : Champ de canne à sucre à la Réunion. (© J.F. Martiné/Cirad) ]

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pierreerne

La bagasse de canne à sucre est une matière première intéressante pour la fabrication de furfural. Le furfural est un produit chimique permettant d’accéder à une foule de produits intéressants comme des nylons, des lubrifiants, des adhésifs et des plastiques doués de propriétés intéressantes. C’est également un précurseur pour des produits pharmaceutiques et phytopharmaceutiques. Le principal dérivé du furfural (en tonnage) est actuellement l’alcool furfurylique. Le principal usage de l’alcool furfurylique est la fabrication de liants pour les sables de fonderie. En conséquence, le principal marché de l’alcool furfurylique est la Chine où résident la plupart des fonderies du monde. Ce type de valorisation est beaucoup plus rentable que la simple combustion de la bagasse pour en tirer de l’énergie.