« L’agrivoltaïsme, ce n’est pas produire plus mais mieux »

"Pour un modèle agrivoltaïque simple et robuste"

Vincent Vignon, directeur du développement GLHD, est intervenu la semaine dernière à la conférence de l’INES (photo) intitulée « L’agrivoltaïsme au défi de l’agriculture », au World Impact Summit pour expliquer « Comment aligner les 3 planètes de la transition agricole, énergétique & écologique avec l’agrivoltaïsme » et aujourd’hui aux Assises de la Fédération française des producteurs agrivoltaïques (FFPA) organisées à Auxerre.

Au moment où la définition de l’agrivoltaïsme intégrée au projet de loi sur l’accélération des énergies renouvelables s’écrit à l’Assemblée nationale, Vincent Vignon milite pour un
cadre légal favorisant le développement d’un « modèle agrivoltaïque simple et robuste. »

Extraits :

« L’agrivoltaïsme permet de travailler l’innovation agricole dans un cadre contraint consistant à asservir les installations solaires aux besoins des exploitants. Le champ des possibles est vaste : la science connaît les cultures qui sont les plus sensibles au couvert lumineux, la technique sait piloter l’ombrage, adapter les espacements des tables aux machines… Des idées très pointues sont testées en laboratoire. Mais au-delà de la recherche/développement, il faut aussi le bon agriculteur au bon endroit pour mettre en œuvre avec succès l’innovation.

C’est pourquoi nous parlons d’un agrivoltaïsme à visage humain et privilégions un référentiel agrivoltaïque simple et robuste sur un taux de couverture du foncier inférieur à 50 %. Il s’agit d’accompagner la transformation agricole dans l’élevage, dans d’autres cultures. Ce qui induit d’accompagner aussi le changement de pratiques, d’apporter toutes les clés de réussite d’un agrivoltaïsme crédible et économiquement viable

On peut imaginer de cultiver durablement des cultures méditerranéennes de plantes aromatiques et médicinales en Bourgogne, à condition d’opérer ce changement dès maintenant et de donner le temps à l’expérimentation dans un objectif pérenne.

Le métier d’agriculteur, en tant que chef d’entreprise soumis à de multiples aléas, est le plus compliqué au monde en matière de visibilité. Il dépend de la météo, des marchés… Les exploitants sont donc volontaires pour engager leur propre transformation.

Notre responsabilité est de leur fournir les garanties d’une transition réussie. C’est tout le sens des expertises que nous mobilisons autour de chaque projet agrivoltaïque dans tous
les domaines, agricoles, écologiques, paysagers… En moyenne, un projet agrivoltaïque va concerner 10% environ de la surface totale d’un exploitant. Traduits en revenu, ces 10% représentent une garantie contre les aléas climatiques et économiques sur un temps long de 40 ans, une visibilité qui peut relancer le sujet de la transmission au sein de la cellule familiale. »

Vincent Vignon, directeur du développement d’un agrivoltaïsme militant

Vincent Vignon est le directeur du développement de GLHD depuis mars 2020. À son arrivée, l’entreprise comptait 7 salariés et visait un portefeuille de 400 MW de projets. 20 mois plus tard, GLHD a bien grandi. La start-up est devenue une PME de 25 personnes et se positionne parmi les acteurs majeurs de la filière solaire avec plus de 3 GW de projets, soit 10% des objectifs photovoltaïques de la PPE.

Particularité : les projets développés par GLHD sont exclusivement agrivoltaïques « Quand on apporte la solution à la question de l’énergie, on règle tout un tas de sujets, géopolitiques, écologiques… », explique comme une évidence celui qui a précédemment contribué à la croissance pendant 15 ans d’une autre société emblématique du secteur des énergies renouvelables, VALOREM, notamment en tant que responsable de la filière solaire.

Petit-fils d’agriculteurs dans le Maine-et-Loire, fils d’une institutrice et d’un conseiller du Crédit Agricole qui revenait à la maison avec des cagettes de fruits et légumes, Vincent « biberonné aux émissions du Commandant Cousteau et de 30 millions d’amis » a toujours eu « un truc avec la nature ». « Petit, je me voyais bien garde-forestier » se souvient-il.

Diplômé en génie de l’environnement (IUT Tours) et géologie pratique (EGID Bordeaux), pourquoi ne pas avoir choisi la voie des énergies fossiles ?

« C’était le chemin tout tracé après l’IUP de géo-ingénierie. Mais les EnR ont été une vraie révélation pour moi au début du nouveau millénaire. Si j’avais travaillé chez un pétrolier, je serais de toute façon parti un jour chez Greenpeace avec les plans de la maison » répond il avant de préciser : « Mon Adn, c’est l’écologie ».

Logiquement, l’indicateur du « jour du dépassement de la Terre » le fait réagir chaque année. Calculé par le Global Footprint Network, il marque la date à laquelle l’humanité a consommé toutes les ressources que la Terre peut générer en un an. Et celui-ci ne cesse d’avancer. Cette année, c’était le 28 juillet à l’échelle mondiale et le 5 mai pour la France.

« Si toute l’humanité vivait comme nous, il faudrait 3 planètes pour subvenir à ses besoins. Aujourd’hui nous consommons nos ressources à crédit et aux dépens des générations futures et des habitants les plus sobres de la planète. Il faut avoir conscience, selon l’expression de Saint-Exupéry, que nous n’héritons pas de la terre de nos parents, nous l’empruntons à nos enfants » souligne-t-il.

Il ajoute : « le modèle agrivoltaïque de GLHD permet justement d’assumer les conséquences de nos nécessités en créant virtuellement les 3 France indispensables pour subvenir aux besoins de ses habitants. Dans un même espace, notre référentiel est en mesure de répondre aux 3 politiques publiques majeures du 21 ème siècle pour lesquelles je milite : la transition agricole, énergétique et écologique.

De manière générale, le monde a besoin d’aligner ces 3 planètes si l’on veut accélérer vers la neutralité carbone. Et l’État a une grande responsabilité dans leur accélération. Je ne me prive pas pour le bousculer, lui rappeler que notre espèce est en train de flinguer l’environnement dans lequel elle vit et qu’il a le pouvoir et le devoir d’agir maintenant pour nous éviter d’aller dans le mur. Il y en marre de ne pas écouter tous ceux qui nous préviennent depuis 40 ans, les Cousteau, Tazieff, le GIEC : bougeons-nous ! Sinon c’est la nature qui va nous réguler. L’être humain est un animal comme les autres et son aquarium n’est pas extensible. »

On comprend que Vincent Vignon a choisi d’exprimer ses valeurs dans le cadre de son activité professionnelle plutôt que militer dans une association. Il confirme : « Je vis mon métier comme une passion, l’idée consiste surtout à travailler en prenant du plaisir et essayer de changer un peu les choses. Ma mission chez GLHD coche toutes les cases : le modèle agrivoltaïque que nous proposons, sur de grandes surfaces à l’échelle des exploitations, peut contribuer à atteindre cette neutralité carbone espérée. Il redonne en tout cas de la visibilité aux agriculteurs et les accompagne dans l’adaptation.

Depuis des décennies on demande aux agriculteurs d’augmenter leurs rendements. Aujourd’hui on a mangé le capital de pas mal de sols de la zone intermédiaire. L’agrivoltaïsme, ce n’est pas produire plus mais mieux, de manière qualitative et durablement. Avec cette technique qui implique de changer de pratiques, l’exploitant continue d’exercer son métier, il contribue en même temps à recréer des corridors de biodiversité, à revégétaliser, à régénérer les sols tout en produisant de l’énergie renouvelable.

Nous conduisons nos projets dans les règles de l’art, certains services commencent à le reconnaître, nous faisons école, il y a une manière GLHD de faire de l’agrivoltaïsme, et nous en sommes très fiers. »

La méthode GLHD est-elle reconnue au point d’inspirer le législateur ?

En tout cas, l’agrivoltaïsme a été intégré au projet de loi sur l’accélération des EnR actuellement débattu à l’Assemblée nationale. Commentaire de Vincent : « D’un côté, l’État a pris conscience que l’objectif de 40 GW de production photovoltaïque à l’horizon 2030 ne pourra pas se faire sans mobiliser du foncier agricole. De l’autre, il y a des résistances qui se révèlent dans les amendements. On peut comprendre la prudence de ceux qui craignent de voir les cultivateurs d’énergie se transformer en rentiers de l’électricité. Ma mission est aussi de leur donner confiance dans notre modèle d’un agrivoltaïsme raisonné. La France a encore perdu 100 000 exploitants et 100 000 exploitations depuis 10 ans. L’agrivoltaïsme fait partie des solutions à mettre en œuvre pour maintenir les exploitations, assurer leur transmission au sein de la cellule familiale, favoriser l’installation de jeunes agris. La loi d’accélération doit viser ces objectifs avec une forme d’agilité. Nous avons été capables de déclarer la guerre au Covid. Le même effort doit être porté contre les émissions de CO2. Si notre combat contre le dérèglement climatique doit passer par une loi d’urgence, celle-ci ne doit pas rater sa cible. »

[ Communiqué ]

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