Les couches liquides ultra-minces pourraient remplacer les revêtements toxiques

Les couches liquides ultra-minces pourraient remplacer les revêtements toxiques

Dans le vaste domaine des matériaux, les chercheurs ont mis en lumière des propriétés surprenantes des molécules d’huile lorsqu’elles sont fixées à des surfaces solides. Ces découvertes pourraient définir de nouvelles normes pour les revêtements durables et non adhésifs.

Des chercheurs de l’université de Sydney ont en effet observé que les molécules d’huile conservaient leurs propriétés “liquides” lorsqu’elles étaient chimiquement attachées en couche extrêmement fine à des surfaces solides, ce qui ouvre de nouvelles perspectives pour la conception de matériaux durables dotés de caractéristiques anti-adhérentes.

SCALS : une alternative prometteuse

Les revêtements “liquides” étudiés par l’équipe, appelés surfaces liquides glissantes à liaison covalente (SCALS), sont produits à partir de silicones ou de polyéthylène glycol, qui se décomposent tous deux en sous-produits inoffensifs dans l’environnement.

Les SCALS sont anti-adhésifs sans avoir recours aux polymères perfluorés problématiques (PFAS), connus sous le nom de “produits chimiques à vie”, qui sont généralement utilisés pour leurs faibles propriétés d’adhérence.

Ces couches liquides sont extrêmement glissantes pour la plupart des contaminants : elles évacuent les gouttelettes de liquide sans effort, ce qui est excellent pour augmenter l’efficacité du transfert de chaleur et pour collecter l’eau, elles empêchent l’accumulation de tartre et résistent à l’adhésion de la glace et des bactéries, ce qui nous rapproche d’un monde autonettoyant“, a expliqué le professeur Neto, qui dirige le laboratoire des nano-interfaces de l’université de Sydney.

Nous pouvons établir une corrélation entre les performances exceptionnelles de ces couches et leur nanostructure, ce qui signifie que nous savons maintenant ce que nous visons lorsque nous concevons des surfaces glissantes, ce qui nous permet de les rendre encore plus efficaces et d’offrir des alternatives viables aux revêtements fluorés.

Comprendre la nanostructure

Les couches nanométriques glissantes, d’une épaisseur comprise entre deux et cinq milliardièmes de mètre, soit 10 000 fois plus fines qu’un cheveu humain, sont constituées de molécules d’huile d’une centaine d’atomes seulement.

Une gouttelette d’eau glisse sans frottement sur un film d’huile épais, mais si vous enlevez complètement le film d’huile, par exemple en utilisant du savon, la plupart des gouttes d’eau adhéreront aux surfaces solides”, a ajouté le professeur Neto.

Jusqu’à quel point la couche d’huile peut-elle être mince sur une surface solide avant qu’elle ne soit plus “liquide” ? À l’échelle nanométrique, la définition d’un liquide devient quelque peu glissante.

Pour percer les secrets de ces revêtements liquides ultraminces, l’équipe a utilisé deux techniques pour “voir” les couches de surface.

La première technique est la spectroscopie de force à molécule unique, qui mesure la longueur des molécules individuelles et la force nécessaire pour les étirer ou les comprimer.

La seconde est la réflectométrie neutronique, qui permet aux scientifiques de mesurer la longueur et la densité de greffage des molécules.

Nous avons constaté que si les molécules liquides étaient trop courtes et peu greffées sur la surface solide, elles ne couvraient pas suffisamment la surface solide sous-jacente et restaient collantes“, a indiqué encore le professeur Neto.

En revanche, si les molécules étaient trop longues ou greffées de manière trop dense, elles n’avaient pas assez de souplesse pour se comporter comme un liquide.

De gauche à droite : Dr Isaac Gresham, Professeur Chiara Neto, M. Seamus Lilley [Crédit : Isaac Gresham]

Pour que SCALS soit efficace, les molécules doivent se trouver dans une zone “Goldilocks“, où elles ne sont ni trop courtes ni trop longues, ni trop lâches ni trop serrées.

Pour démontrer définitivement que les propriétés exceptionnelles de ces couches sont dues à leur état “liquide“, l’équipe a mesuré la vitesse de diffusion d’une petite molécule sonde à l’intérieur de la couche.

Les molécules peuvent diffuser à travers les liquides, mais pas à travers les solides. Le professeur Neto a déclaré que la diffusion moléculaire la plus rapide était observée dans la zone “Boucles d’or“, où les molécules d’huile ont juste la bonne longueur et sont greffées avec une densité modérée.

En synthèse

Les recherches menées à l’Université de Sydney ont révélé que les molécules d’huile, lorsqu’elles sont fixées chimiquement en couches ultra-minces sur des surfaces solides, conservent leurs propriétés liquides. Ces revêtements, appelés SCALS, sont formés à partir de silicones ou de polyéthylène glycol, des composés respectueux de l’environnement. Ces revêtements offrent une alternative viable aux polymères perfluorés généralement utilisés pour leurs propriétés anti-adhésives.

Pour une meilleure compréhension

Qu’est-ce que le SCALS ?

Le SCALS, ou “slippery covalently-attached liquid surfaces”, désigne des revêtements qui sont produits à partir de silicones ou de polyéthylène glycol. Ils sont particulièrement glissants et offrent une alternative écologique aux polymères problématiques.

Quelle est la principale découverte de cette recherche ?

La principale découverte est que des molécules d’huile peuvent conserver leurs propriétés “semblables à un liquide” même lorsqu’elles sont chimiquement fixées en une couche extrêmement fine à des surfaces solides.

Pourquoi ces revêtements sont-ils importants pour l’environnement ?

Ces revêtements se décomposent en sous-produits inoffensifs dans l’environnement, contrairement aux polymères perfluorés qui peuvent poser des problèmes écologiques.

Quels sont les avantages potentiels de ces revêtements “semblables à un liquide” ?

Ils repoussent efficacement la plupart des contaminants, favorisent le transfert de chaleur, empêchent l’accumulation de tartre, résistent à la glace et aux bactéries, et pourraient contribuer à un monde autonettoyant.

Quelle est la particularité de la “zone de Goldilocks” mentionnée ?

Pour que le SCALS soit efficace, il doit se trouver dans cette “zone de Goldilocks”, où les molécules ne sont ni trop courtes, ni trop longues, ni trop espacées, ni trop serrées.

Les résultats sont publiés dans la revue de chimie de premier plan Angewandte Chemie (“Nanostructure Explains the Behavior of Slippery Covalently Attached Liquid Surfaces“), sous la direction du Dr Isaac Gresham et en collaboration avec le professeur Chiara Neto et l’étudiant Seamus Lilley de l’école de chimie et de Sydney Nano, le Dr Kaloian Koynov de l’Institut Max Planck pour la recherche sur les polymères et le Dr Andrew Nelson du Centre australien de diffusion des neutrons.

DOI: https://doi.org/10.1002/anie.202308008

Illustration principale : Gouttes sur une surface glissante [Crédit : Isaac Gresham]

[ Rédaction ]

         

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