Les effets bénéfiques du changement climatique sur le riz à Madagascar

Dans les Hautes-Terres de Madagascar, la culture pluviale du riz s’est développée ces dernières années grâce aux variétés adaptées aux basses températures qui prévalent dans cette région montagneuse.

Mais quelles seront les répercussions du réchauffement climatique sur cette culture dont dépend une grande partie de la population de l’île ? En simulant, sur un siècle, la production du riz en fonction de l’ampleur du changement climatique et des modes de culture adoptés, une équipe du Cirad et du Fofifa arrive à ce résultat surprenant que le scénario climatique le plus pessimiste est aussi celui qui permet d’atteindre les meilleurs rendements.

Le réchauffement climatique pourrait avoir des conséquences graves sur la production de riz et, par conséquent, sur la sécurité alimentaire. Les données précises sur les effets de ce réchauffement sont rares et concernent surtout le riz irrigué. Le riz pluvial, en revanche, n’a fait l’objet d’aucune étude de ce type.

Une équipe de chercheurs du Cirad et de l’institut agronomique malgache s’est intéressée à l’impact de ce réchauffement sur la productivité du riz pluvial dans les Hautes-Terres malgaches, où cette culture s’est développée récemment. L’étude a porté sur une période de 90 ans, de 2010 à 2099, en fonction du système de culture adopté.

Deux scénarios de changement climatique

Les rendements du riz ont été simulés grâce au modèle Céres-Riz, qui a été calibré puis validé avec le cultivar de riz Fofifa 161, pour lequel un ensemble de données expérimentales ont été recueillies sur une période de six ans. Les systèmes de culture comprenaient deux systèmes de travail du sol, le labour manuel et le semis direct, et deux taux de fertilisation azotée, faible et fort.
Par rapport au témoin, sans changement climatique, deux scénarios ont été testés. Dans le premier, les émissions de gaz carbonique subissent une augmentation progressive jusqu’à 750 ppm et la température s’élève de 0,15 °C par décennie. C’est le scénario optimiste, dans lequel l’augmentation du taux de gaz carbonique et la hausse relativement faible de la température sont censées favoriser la croissance du riz.

Les effets bénéfiques du changement climatique sur le riz à Madagascar

[ Dans les Hautes-Terres malgaches, la partie la plus peuplée de l’île, la pression foncière a conduit à une saturation des terres irriguées, et la culture pluviale du riz s’est développée sur les collines. © J. Dusserre/Cirad ]

Dans le second scénario, les émissions de gaz carbonique connaissent, là aussi, une hausse progressive, mais la température augmente de 0,5 °C par décennie et les précipitations diminuent de 0,2 mm par jour de décembre à février. C’est le scénario pessimiste, où une forte hausse de la température combinée à une réduction des précipitations pourrait provoquer un stress hydrique sévère chez le riz.

Des résultats surprenants

L’analyse ne révèle aucune différence de rendement entre les systèmes de travail du sol, quels que soient le changement climatique et la fertilisation appliquée. Le semis direct n’améliore pas les rendements par rapport au labour, ni l’efficacité d’utilisation de l’eau ou d’absorption de l’azote par la culture. Il est probable que, pour améliorer significativement les propriétés du sol, le semis direct exige une forte production de matière sèche qu’il n’est pas possible d’atteindre avec les basses températures qui prévalent dans la région.

En revanche, la fertilisation azotée a un fort impact sur les rendements, avec un gain de 1 500 kg/ha de grains pour un apport de 45 kg/ha d’azote. L’azote est une contrainte majeure dans ce type de sol, où sa disponibilité est réduite du fait de la faible capacité d’échange anionique du sol et du lessivage.

Les effets bénéfiques du changement climatique sur le riz à Madagascar

[ Levée du riz après semis direct, à gauche, et labour, à droite, sur le dispositif expérimental d’Andranomanelatra, près d’Antsirabe, Madagascar. © J. Dusserre/Cirad ]

Les rendements en riz, qui sont en moyenne de 5 478 kg/ha, sont nettement supérieurs dans le scénario pessimiste, avec un gain de 576 kg/ha par rapport au témoin. Dans ce scénario, l’augmentation des températures accélère la floraison et la maturation des grains de sorte que la demande en eau et en nutriments de la plante est mieux ajustée aux disponibilités du sol. La variabilité des rendements y est plus faible, et l’écart avec les autres scénarios se creuse au fil des ans.

Un effet positif sur la productivité du riz

Même si les hypothèses de départ – culture sans contraintes biotiques et sans événements météorologiques violents – limitent la portée des résultats, le réchauffement climatique pourrait avoir un effet positif sur la productivité du riz dans cette région froide, où le riz est cultivé à la limite inférieure de sa tolérance à la température.

A l’inverse de ce qui risque de se passer en Asie du Sud, où le riz est cultivé à la limite supérieure de sa tolérance à la température et où ses rendements devraient subir une baisse générale, les prévisions les plus « pessimistes » en termes de températures pourraient entraîner, dans les Hautes-Terres malgaches, une nette augmentation de la production.

         

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