Les mégots de cigarettes : une ressource inattendue pour le biodiesel

Les déchets de cigarettes, une ressource inattendue pour le biodiesel

Des chercheurs lituaniens ont mis au point une méthode innovante pour diminuer les coûts de production du biodiesel en utilisant les déchets issus du recyclage des mégots de cigarettes. Cette découverte pourrait contribuer à une utilisation plus large de ce carburant propre et renouvelable.

Face aux normes environnementales de plus en plus strictes et à la pollution engendrée par les combustibles fossiles, les carburants propres tels que le biodiesel sont de plus en plus recherchés. Ce diesel à base d’huile végétale ou de graisse animale est biodégradable – jusqu’à 4 fois plus rapidement que le diesel pétrolier – et non toxique.

Le coût élevé de production du biodiesel constitue un obstacle majeur à son adoption généralisée. De plus, selon la source de biomasse utilisée, son utilisation peut engendrer de la pollution. L’ajout d’un agent de mélange, comme un composé de triacétine, peut résoudre ces deux problèmes, selon les recherches.

Malheureusement, la triacétine est généralement produite chimiquement, ce qui consomme beaucoup de produits chimiques et génère des déchets et des résidus toxiques.

Exploiter les déchets de cigarettes pour produire de la triacétine

Samy Yousef, chercheur principal à l’Université de technologie de Kaunas en Lituanie, explique que la triacétine est utilisée comme plastifiant dans les filtres de cigarettes, ce qui rend les mégots de cigarettes particulièrement riches en cette substance.

En collaboration avec ses collègues de l’Institut d’énergie lituanien (LEI), il a mené une série d’expériences utilisant la pyrolyse pour décomposer thermiquement les déchets de cigarettes. Les expériences ont été réalisées dans un réacteur de 200 g à différentes températures de réaction (650, 700 et 750°C). La plus grande quantité de triacétine (43 %) a été synthétisée à 750°C.

Samy Yousef, chercheur en chef à la faculté d’ingénierie mécanique et de conception de KTU. Crédit KTU

Une approche originale pour traiter les déchets toxiques

Les fumeurs du monde entier achètent environ 6.5 milliards de cigarettes chaque année, générant plus de 1,1 million de tonnes de mégots annuellement. Ces déchets contiennent d’importantes quantités de substances chimiques toxiques, de carcinogènes, de fibres microplastiques et d’éléments radioactifs qui nécessitent une attention particulière.

Les chercheurs lituaniens ont adopté une approche originale en traitant les mégots de cigarettes comme un mélange, plutôt que de se concentrer sur la dégradation thermique des composants individuels. Cette méthode permet d’éviter les coûts et les complications liés à la séparation des composants des déchets de cigarettes.

Des applications concrètes pour les produits issus de la pyrolyse

Après une série d’expériences de pyrolyse à différentes températures, les chercheurs ont réussi à extraire de l’huile (38-39,5 % en poids), du charbon (25,7-27,7 % en poids) et du gaz (33-36,4 % en poids) des déchets de cigarettes.

Le charbon, riche en calcium (jusqu’à 32 % en poids), peut être utilisé comme engrais, absorbant pour le traitement des eaux usées ou pour le stockage d’énergie. Le gaz peut être utilisé à des fins énergétiques, tandis que l’huile, riche en triacétine, peut être ajoutée au biodiesel pour en réduire le coût.

Durabilité de la stratégie de conversion proposée pour les déchets de cigarettes (photo : auteurs de l’étude).

Les systèmes de collecte des mégots, par exemple les poubelles métalliques et les cendriers, sont largement utilisés pour les collecter séparément des déchets solides.

En ce qui concerne la stratégie de recyclage, les chercheurs proposent d’utiliser un traitement par pyrolyse à 750°C, qui convertit thermiquement les mégots en charbon, en gaz et en huile. Les produits gazeux peuvent être utilisés pour produire de l’électricité et alimenter l’usine de conversion, le charbon peut être utilisé comme absorbant, tandis que l’huile peut être ajoutée aux biocarburants à un taux pouvant atteindre 25 %, puisque le taux de triacétine autorisé est de 10 %.

En synthèse

La découverte des chercheurs lituaniens ouvre la voie à une réduction des coûts de production du biodiesel en utilisant les déchets de cigarettes pour produire de la triacétine. Cette méthode innovante permet de valoriser un déchet toxique abondant tout en favorisant l’utilisation d’un carburant propre et renouvelable. Les produits issus de la pyrolyse des mégots de cigarettes ont des applications concrètes et pourraient contribuer à une économie circulaire plus durable.

Entre-temps, Samy Yousef indique que le groupe étudie d’autres possibilités d’utilisation des déchets de cigarettes.

Pour une meilleure compréhension

Qu’est-ce que le biodiesel ?

Le biodiesel est un carburant renouvelable et propre, fabriqué à partir d’huiles végétales ou de graisses animales. Il est biodégradable et non toxique.

Quel est le problème avec la production de biodiesel ?

Le coût élevé de production du biodiesel est un obstacle majeur à son adoption généralisée. De plus, selon la source de biomasse utilisée, son utilisation peut engendrer de la pollution.

Comment les déchets peuvent-ils aider à réduire le coût de production du biodiesel ?

Les déchets de cigarettes sont riches en triacétine, un composé qui peut être utilisé comme additif dans le biodiesel. Les chercheurs lituaniens ont développé une méthode pour extraire la triacétine des déchets de cigarettes par pyrolyse, ce qui pourrait réduire le coût de production du biodiesel.

Quels sont les autres produits obtenus par pyrolyse des déchets de cigarettes ?

Outre la triacétine, la pyrolyse des déchets de cigarettes permet d’obtenir de l’huile, du charbon et du gaz. Ces produits ont des applications concrètes, comme l’utilisation du charbon pour l’engrais ou le traitement des eaux usées, et du gaz pour la production d’énergie.

Quel est l’impact environnemental de cette méthode ?

En valorisant les déchets de cigarettes, cette méthode contribue à une économie circulaire plus durable. De plus, l’utilisation de la triacétine extraite des déchets de cigarettes dans le biodiesel pourrait favoriser l’utilisation de ce carburant propre et renouvelable.

Principaux enseignements

Enseignements
Le biodiesel est un carburant propre et renouvable
Le coût élevé de production est un obstacle à l’adoption du biodiesel
Les déchets de cigarettes sont riches en triacétine, utile pour le biodiesel
La pyrolyse des déchets de cigarettes permet d’extraire la triacétine
La plus grande quantité de triacétine est obtenue à 750°C
La pyrolyse des déchets de cigarettes produit également de l’huile, du charbon et du gaz
Ces produits ont des applications concrètes, comme l’engrais ou la production d’énergie
Cette méthode contribue à une économie circulaire plus durable
L’utilisation de la triacétine dans le biodiesel pourrait favoriser l’utilisation de ce carburant
Les déchets de cigarettes pourraient être une ressource précieuse pour la production de biodiesel

Références

Article : “Pyrolysis of cigarette butts as a sustainable strategy to recover triacetin for low-cost and efficient biodiesel production” – DOI: 10.1016/j.jaap.2023.106167

[ Rédaction ]

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