La compréhension de notre monde dépend en grande partie de notre connaissance des matériaux qui le constituent et de leurs interactions. La science des matériaux, en constante évolution, nous offre aujourd’hui une nouvelle perspective grâce à l’intégration de la lumière quantique dans la spectroscopie infrarouge.
Notre capacité à identifier les substances chimiques et à élargir leurs applications possibles repose en grande partie sur les technologies de la science des matériaux. Parmi ces technologies, la spectroscopie infrarouge est largement utilisée pour l’identification moléculaire dans divers domaines comme la médecine, la surveillance environnementale et la production industrielle.
Même le meilleur outil existant – le spectromètre infrarouge à transformée de Fourier ou FTIR – présente des limites. Toutefois, comme il utilise un élément chauffant comme source de lumière, cela génère du bruit dans la région infrarouge et limite la sensibilité des appareils. De plus, les propriétés physiques de ces appareils entravent leur miniaturisation.
L’intégration d’une source de lumière quantique
Une équipe de recherche dirigée par l’Université de Kyoto a relevé ce défi en intégrant une source de lumière quantique. Leur source innovante ultra-large bande, intriquée quantiquement, génère une gamme relativement plus large de photons infrarouges avec des longueurs d’onde comprises entre 2 μm et 5 μm.
« Cette réalisation ouvre la voie à une réduction drastique de la taille du système et à une amélioration de la sensibilité du spectromètre infrarouge », précise Shigeki Takeuchi du Département des sciences et de l’ingénierie électroniques.
Des applications prometteuses pour l’avenir
Un autre défi avec les FTIR est le fardeau du transport d’équipements de grande taille et gourmands en énergie vers divers endroits pour tester les matériaux sur place. Shigeki Takeuchi envisage un avenir où les scanners compacts, performants et alimentés par batterie de son équipe faciliteront les applications dans divers domaines tels que la surveillance environnementale, la médecine et la sécurité.
« Nous pouvons obtenir des spectres pour divers échantillons cibles, y compris des solides durs, des plastiques et des solutions organiques. Shimadzu Corporation – notre partenaire qui a développé le dispositif de lumière quantique – a convenu que les spectres de mesure à large bande étaient très convaincants pour distinguer les substances pour une large gamme d’échantillons », ajoute Shigeki Takeuchi.
La lumière quantique : une technique révolutionnaire
Bien que la lumière intriquée quantiquement ne soit pas nouvelle, la bande passante a jusqu’à présent été limitée à une plage étroite de 1 μm ou moins dans la région infrarouge. Cette nouvelle technique utilise les propriétés uniques de la mécanique quantique – comme la superposition et l’intrication – pour surmonter les limitations des techniques conventionnelles.
L’équipe a développé indépendamment un dispositif d’appariement de phase quasi-chirpé qui génère de la lumière intriquée quantiquement en exploitant le chirping (gazouillement) – changeant progressivement la période de renversement de polarisation d’un élément – pour générer des paires de photons quantiques sur une large bande passante.
« Améliorer la sensibilité de la spectroscopie infrarouge quantique et développer l’imagerie quantique dans la région infrarouge font partie de notre quête pour développer des technologies quantiques réelles », conclut Takeuchi.
Légende illustration – Spectroscopie quantique infrarouge utilisant des photons intriqués à très large bande. Crédit : KyotoU/Shigeki Takeuchi
Article : « Ultra-broadband quantum infrared spectroscopy » – DOI: 10.1364/OPTICA.504450