L’énergie éolienne offshore représente une opportunité majeure pour répondre à la demande croissante en électricité aux États-Unis, en particulier pendant les mois d’été où la consommation augmente considérablement. Cependant, prédire avec précision la quantité d’énergie que ces éoliennes en mer peuvent produire reste un défi de taille pour les opérateurs de réseaux électriques.
Une équipe de scientifiques de l’Université du Colorado à Boulder, dirigée par Dave Rosencrans, doctorant, et Julie K. Lundquist, professeure au Département des sciences atmosphériques et océaniques, a publié une étude dans la revue Wind Energy Science. Selon leurs estimations, les éoliennes offshore situées dans la région de l’océan Atlantique, où les États-Unis prévoient de construire de grands parcs éoliens, pourraient réduire le vent disponible pour les autres éoliennes à proximité, diminuant ainsi la production d’énergie des parcs de plus de 30%.
Ce phénomène, appelé «effet de sillage», se produit lorsque le vent traverse les éoliennes situées en amont, qui extraient une partie de l’énergie du vent. En conséquence, le vent ralentit et devient plus turbulent derrière ces éoliennes, ce qui signifie que les éoliennes en aval reçoivent un vent plus lent, entraînant parfois une baisse de la production d’énergie.
Les parcs éoliens offshore pourraient couvrir 60% de la demande en électricité de la Nouvelle-Angleterre
Malgré l’effet de sillage, l’équipe a estimé que les parcs éoliens proposés pourraient tout de même fournir environ 60% de la demande en électricité du réseau de la Nouvelle-Angleterre, qui couvre les États du Connecticut, du Maine, du Massachusetts, du New Hampshire, du Rhode Island et du Vermont.
Julie K. Lundquist souligne l’importance de prédire quand ces sillages seront coûteux et quand ils auront peu d’effet, étant donné que les États-Unis prévoient de construire des milliers d’éoliennes offshore.
Les conditions météorologiques influencent la propagation des sillages
Dave Rosencrans, premier auteur de l’étude, explique que l’effet de sillage est particulièrement important en mer, car il n’y a pas de maisons ou d’arbres pour remuer l’air et aider à dissiper les sillages.
Les simulations informatiques et les données d’observation de l’atmosphère ont permis à l’équipe de calculer que l’effet de sillage réduit la production totale d’énergie de 34% à 38% dans un parc éolien proposé au large de la côte Est. La majeure partie de cette réduction provient des sillages formés entre les éoliennes d’un même parc.
Cependant, dans certaines conditions météorologiques, les sillages peuvent atteindre des éoliennes situées jusqu’à 55 kilomètres sous le vent et affecter d’autres parcs éoliens. Par exemple, pendant les journées chaudes d’été, l’écoulement de l’air au-dessus de la surface fraîche de la mer a tendance à être relativement stable, ce qui fait que les sillages persistent plus longtemps et se propagent sur de plus longues distances.
Un équilibre délicat entre l’offre et la demande d’électricité
L’intégration croissante des énergies renouvelables dans le système électrique représente un défi pour les opérateurs de réseaux, car l’énergie éolienne et solaire est variable, le soleil ne brillant pas toujours et le vent ne soufflant pas en permanence.
Julie K. Lundquist souligne que le réseau électrique est un système complexe qui nécessite un équilibre parfait entre l’offre et la demande en temps réel. Tout déséquilibre peut entraîner des pannes dévastatrices, comme ce qui s’est produit au Texas en 2021, où des coupures de courant ont causé la mort de près de 250 personnes.
Des instruments de mesure pour améliorer les prévisions de production d’énergie éolienne
Pour mieux comprendre comment le vent souffle dans la zone proposée pour le parc éolien, l’équipe a installé une série d’instruments sur les îles au large de la côte de la Nouvelle-Angleterre en décembre dernier, dans le cadre du projet Wind Forecast Improvement Project 3 du Département de l’énergie.
Ces instruments, qui comprennent des moniteurs météorologiques et des capteurs radar, collecteront des données pendant au moins un an. Auparavant, les modèles de prévision de la production d’énergie éolienne offshore s’appuyaient généralement sur des données intermittentes provenant de navires et d’observations satellitaires. L’espoir est qu’avec des données continues directement issues de l’océan, les scientifiques pourront améliorer les modèles de prévision et mieux intégrer l’énergie éolienne offshore dans le réseau.
Un mix énergétique diversifié pour répondre à la demande croissante en électricité
Outre la demande croissante en climatisation et en pompes à chaleur, la consommation d’électricité aux États-Unis a augmenté rapidement ces dernières années en raison de la prévalence croissante des véhicules électriques, des centres de données et des installations de fabrication. Au cours des cinq prochaines années, les analyses prévoient que la demande en électricité aux États-Unis augmentera de près de 5%, une hausse substantielle par rapport au taux de croissance annuel estimé à 0,5% au cours de la dernière décennie.
« Nous avons besoin d’un mix diversifié de sources d’énergie propres pour répondre à la demande et décarboner le réseau. Avec de meilleures prévisions de l’énergie éolienne, nous pouvons parvenir à une plus grande dépendance aux énergies renouvelables. » a conclu Julie K. Lundquist.
Légende illustration : Un LiDAR éolien pour la collecte de données sur l’énergie éolienne, les conditions météorologiques et les mouvements d’air. Crédit : Julie Lundquist/CU Boulder
Article : « Seasonal variability of wake impacts on US mid-Atlantic offshore wind plant power production » – DOI: 10.5194/wes-9-555-2024