Les fuites de gaz naturel sont un enjeu majeur pour la sécurité et l’environnement. Une nouvelle étude révèle des éléments cruciaux sur la manière dont les conditions de surface influencent la propagation du gaz.
Une équipe de recherche universitaire a démontré que des couvertures de sol saturées d’eau ou de neige, ainsi que des revêtements d’asphalte, peuvent entraîner une migration du gaz naturel jusqu’à trois à quatre fois plus loin qu’à travers un sol sec. Ces conditions de surface influencent également la vitesse de propagation, le gaz se déplaçant 3,5 fois plus rapidement qu’en conditions sèches.
Selon Kathleen M. Smits, co-auteure de l’étude publiée dans la revue Environmental Science & Technology Letters, «ce travail est très significatif, car pour la première fois, il relie l’impact des changements de conditions de surface aux temps et distances de transport du gaz souterrain.»
Kathleen M. Smits, présidente du département de génie civil et environnemental à l’Université Southern Methodist (SMU), souligne l’importance pour les premiers intervenants et les entreprises de gaz et de pétrole de prendre en compte les structures de surface du sol lors de l’évaluation des risques de sécurité liés aux fuites de pipelines.
Deux dangers majeurs des fuites de gaz
Les fuites de gaz naturel présentent deux risques principaux : d’une part, le gaz non brûlé, principalement composé de méthane (CH4), peut provoquer une explosion ; d’autre part, le méthane est le deuxième plus grand contributeur au réchauffement climatique après le dioxyde de carbone (CO2). Identifier et éliminer les fuites de méthane pourrait réduire le réchauffement climatique.
Kathleen M. Smits affirme que «les résultats de cette étude fournissent des informations cruciales pour identifier et prioriser les fuites du point de vue de la sécurité et de l’environnement.»
Les chercheurs ont mené des expériences de fuite contrôlée au Centre d’évaluation technologique des émissions de méthane (METEC) de l’Université d’État du Colorado. Ils ont observé la propagation verticale et horizontale du gaz sous différentes structures de surface : neige ou pluie sur de l’herbe, sol sec recouvert d’herbe ou asphalte sec, mouillé par la pluie ou enneigé. Le gaz naturel a été libéré en continu pendant 24 heures pour simuler une fuite réelle.
Principales conclusions de l’étude
Les chercheurs ont découvert que la pluie, la neige et l’asphalte bloquent le gaz à la surface du sol, le forçant à migrer vers le bas et à s’éloigner du site de la fuite. «Imaginez le gaz se déplaçant à travers quelque chose comme une tranche de fromage suisse,» a expliqué Navodi Jayarathne, en faisant référence aux « trous » dans le sol remplis d’eau, de gaz ou d’autres particules.
Kathleen M. Smits ajoute : «Nous avons constaté que dans le cas de conditions d’asphalte, d’humidité ou de neige, lorsque le gaz trouve finalement un endroit pour s’échapper du sol, il se déplace très rapidement et à des concentrations élevées, augmentant le risque pour la sécurité.»
Une autre découverte a surpris les chercheurs : même après l’arrêt de l’alimentation en gaz ou la réparation de la fuite, le méthane piégé sous la neige, le sol humide ou l’asphalte pouvait encore être détecté à haute concentration pendant jusqu’à 12 jours. Le gaz naturel s’est également propagé latéralement à partir de la source de la fuite jusqu’à 2 à 4 % pendant cette période.
Elle précise également que «les données précédentes montrent que le gaz s’échappe rapidement du sol après l’arrêt de la fuite. Mais cette étude montre que l’évacuation du gaz est unique selon les environs, en particulier la surface.»
Les premiers intervenants doivent être conscients que le site de la fuite continuera d’évoluer après l’arrêt de la fuite, souligne Kathleen M. Smits.
Les chercheurs ont noté que les distances de migration enregistrées sont basées sur le type et l’état du sol au METEC. «Les valeurs peuvent varier lorsqu’elles sont appliquées à d’autres lieux et environnements. Cependant, les schémas refléteront les comportements attendus d’autres sites de fuite,» a conclu la chercheuse.
Navodi Jayarathne, chercheur postdoctoral à la SMU, a dirigé l’étude, assisté par Daniel J. Zimmerle, directeur du METEC, Richard S. Kolodziej IV, étudiant en master à la SMU, et Stuart Riddick, chercheur à l’Institut de l’Énergie de l’Université d’État du Colorado. Crédit : Austin Hannon/CSU
Article : « Flow and Transport of Methane from Leaking Underground Pipelines: Effects of Soil Surface Conditions and Implications for Natural Gas Leak Classification » – DOI: 10.1021/acs.estlett.4c00039