Le laser PETAL implanté au sein du Laser Mégajoule sur le centre CEA du Cesta (Centre d’Etudes Scientifiques et Techniques d’Aquitaine) qui avait délivré le 29 mai 2015 une puissance de 1,2 PetaWatt, devenant ainsi le faisceau laser le plus puissant au monde dans la catégorie des lasers énergétiques, a été inauguré le 18 septembre dernier.
Le CEA, avec l’appui de l’ILP, conçoit depuis près de 10 ans un instrument scientifique unique à l’échelle européenne : PETAL dont l’acronyme signifie PETawatt Aquitaine Laser.
Ce laser réalisé grâce à la maîtrise d’ouvrage de la Région Aquitaine, du soutien de l’Etat et de l’Union européenne reste une prouesse technologique qui démontre les connaissances et savoir-faire des scientifiques, des ingénieurs et des techniciens de la France dans ce domaine.
PETAL s’inscrit dans la dynamique, d’ouverture et de partage de l’utilisation du laser Mégajoule (LMJ) avec la communauté civile de la recherche, telle que voulue par le ministère de la Défense et le gouvernement. De ce fait, les chercheurs bénéficieront dès 2017 de 20 à 30 % du temps disponible de l’installation LMJ. Le couplage des deux instruments PETAL et LMJ vise ainsi la création d’un très grand instrument, unique en Europe, pour les études sur la physique de l’extrême, la connaissance de l’Univers, la fusion par confinement inertiel et la recherche médicale.
L’ILP est chargé de l’animation et de la coordination des communautés scientifiques utilisatrices de PETAL-LMJ. L’ILP gère les appels à propositions et la sélection des expériences par un Comité de sélection international. Un premier appel d’offres lancé en 2014 a permis de retenir 4 équipes-projets internationales pour la première campagne 2017-2018. De premières expériences de qualification sont prévues en 2016.
1 PetaWatt (PW) = 1015 watts = 1 million de milliards de watts.
Performances
Le projet PETAL consiste à réaliser un fasceau laser supplémentaire aux 176 de l’installation LMJ, dont la puissance sera de plusieurs PetaWatts. On réalise ainsi des impulsions ultrabrèves
de l’ordre de la picoseconde, soit 1.000 fois plus brèves que celle d’un faisceau LMJ, et d’une puissance2 100 fois plus élevée. Les principales performances laser recherchées avec PETAL étaient de franchir le seuil du PetaWatt avec notamment :
– une énergie jusqu’à 3 kilojoules3 pour une longueur d’onde de 1053 nm (infra-rouge) ;
– une impulsion courte, d’une durée comprise entre 0,5 et 10 picosecondes 4;
– un éclairement au point focal de l’ordre de 1020 W/cm2.
Planning de réalisation
La première phase de réalisation de PETAL (terminée mi-2008), a permis de valider les options techniques et de qualifier les composants les plus critiques du laser. La deuxième phase, achevée en 2012, concernait la construction de la section amplificatrice de forte énergie. La phase 3 (terminée en 2014) et la phase 4 ont porté principalement sur l’installation des autres parties du laser, notamment les diagnostics laser, les dispositifs d’alignement, la zone de compression, et le système de transport-focalisation vers la chambre d’expériences LMJ
(intégré en 2013). Les derniers montages se sont terminés au premier semestre 2014. La montée en énergie de la section amplificatrice a débuté fin 2013 (5 kJ d’énergie obtenus en
mars 2014).
La montée en puissance jusqu’à la zone de compression a été menée en 2014-2015 et s’est achevée par la démonstration des capacités Petawatt en mai 2015, avec une puissance délivrée de 1,2 PW (correspondant à une énergie de 840 J en une durée de 700 femtosecondes5). Enfin, le faisceau laser est, depuis juin 2015, aligné jusqu’au miroir de focalisation.
Dans le cadre de la phase 5, la dernière du projet PETAL, il reste à amener le faisceau de puissance dans la chambre d’expériences, d’assurer le couplage laser avec le LMJ, et de compléter les mesures de l’impulsion laser.
PETAL : des développements technologiques spécifiques
Les lasers haute énergie à impulsion courte comme PETAL nécessitent le développement de technologies spécifiques.
La conception de PETAL repose sur une technique de mise en forme des impulsions lumineuses : l’amplification à dérive de fréquence ou « chirped pulse amplification » (CPA).
En effet, il est impossible d’amplifier directement une impulsion courte (picoseconde) dans une chaîne amplificatrice à haute énergie sans détérioration des optiques en raison du fort éclairement engendré. Il est nécessaire, dans un premier temps, d’étirer temporellement l’impulsion jusqu’à une durée compatible de la chaîne amplificatrice (quelques nanosecondes).
Ceci est réalisé à l’aide d’une source laser spécifique au sein du pilote. L’impulsion est ensuite pré-amplifiée dans le pilote jusqu’à un niveau de 100 mJ par la technique d’amplification paramétrique optique afin de garantir une grande qualité à l’impulsion finale.
Puis, après amplification dans une chaîne équivalente à celles du LMJ, l’impulsion est recomprimée temporellement en zone de compression. Elle est constituée dans le cas de PETAL de deux étages de compression temporelle permettant de passer l’impulsion laser en régime Petawatt, avec des énergies de l’ordre du kilojoule et une durée sub-picoseconde. Le premier étage fonctionne sous air, le second sous vide (caisson de compression). Une salle regroupe les diagnostics laser destinés à caractériser l’impulsion laser comprimée en sortie du
caisson.
L’éclairement intense obtenu interdit toute traversée de matière jusqu’à la cible. Le transport de l’impulsion jusqu’à la chambre est effectué sous vide et la focalisation est réalisée à l’aide d’un miroir parabolique qui permettra d’atteindre un éclairement de 1020 W/cm2 sur cible. Toute cette séquence constitue la technique d’amplification d’impulsion à dérive en fréquence, schématisée ci-dessous.
PETAL est composé de trois parties.
La partie laser proprement dite avec :
– un Pilote dans lequel des impulsions laser de durée ultra brève (femtosecondes) sont générées, puis manipulées pour les allonger à des durées de quelques nanosecondes et amplifiées à des niveaux d’une fraction de joule ;
– une Section Amplificatrice qui consiste en une ligne de nature proche des lignes amplificatrices du LMJ et qui délivrera dans l’infrarouge une énergie voisine d’une dizaine de kilojoules ;
– une Chambre sous vide de Compression permettant de passer en régime Multi-Petawatt picoseconde et femtoseconde, avec des énergies de plusieurs kilojoules ;
– un Transport sous Vide du faisceau laser vers la salle expérimentale ;
Une installation de caractérisation indépendante.
Une distribution de faisceaux et une instrumentation permettant d’introduire le faisceau petawatt comprimé dans la chambre d’expériences du LMJ et de le focaliser pour le coupler avec les faisceaux du LMJ.
L’instrument PETAL est complété par un ensemble d’outils de mesure, appelés "diagnostics", et de leurs systèmes d’insertion. Ces diagnostics sont conçus par le CEA sous maîtrise d’ouvrage de l’Université de Bordeaux dans le cadre de l’équipex PETAL+.