Le stress demeure un mécanisme naturel utile à la survie de l’être humain. Bien qu’il soit omniprésent dans notre vie moderne, en excès, il provoque des maladies induites tant au niveau physique que psychosomatique. L’Institut de Technologie de Californie (Caltech) a mis au point une « peau électronique » capable de surveiller en continu neuf marqueurs différents caractérisant une réponse au stress.
Le professeur Wei Gao de Caltech a conçu une peau électronique, appelée CARES (Consolidated Artificial-intelligence-Reinforced Electronic Skin), qui permet de surveiller en continu neuf marqueurs différents caractérisant une réponse au stress. Cette peau électronique, un petit adhésif mince porté au poignet, permet aux utilisateurs de vaquer à leurs activités quotidiennes avec une interférence minimale pendant les tests. Cela permet de mesurer à la fois les niveaux de stress de base et aigus.
Le stress est un concept complexe. Nous parlons de «se sentir stressé» ou d’une situation « stressante », et nous pouvons attribuer le stress à des symptômes physiques. Le terme stress peut s’appliquer à toutes sortes de sentiments, de symptômes, de comportements et d’expériences.
Le stress : une réponse non spécifique du corps
Hans Selye, un médecin et chimiste né à Vienne en 1907, a été le premier à définir le stress comme une condition médicale. Il a défini le stress comme une « réponse non spécifique du corps à toute demande ». Le stress peut être vécu positivement comme de l’excitation ou de l’énergie, ou négativement comme un choc ou de l’anxiété. Il est maintenant largement admis que, selon sa gravité et sa durée, le stress aigu et chronique peut endommager notre santé physique et mentale, et réduire notre capacité à fonctionner comme nous le souhaiterions.
Comme le stress est, comme l’a décrit Selye, «non spécifique», il n’existe pas de biomarqueur unique pour nous dire définitivement si une personne est stressée ou à quel point elle est stressée. Cependant, le stress génère une constellation de réactions corporelles qui, prises ensemble, peuvent fournir une mesure du stress indépendante des auto-rapports. Wei Gao surveille cette constellation avec CARES.
Surveillance des marqueurs de stress avec CARES
« Lorsqu’une personne est sous stress, des hormones comme l’épinéphrine, la norépinéphrine et le cortisol sont libérées dans la circulation sanguine », explique Wei Gao. « La sueur devient riche en métabolites comme le glucose, le lactate et l’acide urique, et en électrolytes comme le sodium, le potassium et l’ammonium. Ce sont des substances que nous avons déjà mesurées auparavant en utilisant un échantillonnage microfluidique sur un capteur de sueur portable. Ce qui est nouveau avec CARES, c’est que les capteurs de sueur sont intégrés à des capteurs qui enregistrent les formes d’onde du pouls, la température de la peau et la réponse galvanique de la peau : des signaux physiologiques qui indiquent également le stress de manière prévisible. »
De nouveaux matériaux améliorent encore les performances de CARES. Bien que les matériaux précédemment utilisés pour les capteurs de sueur puissent être produits efficacement par impression à jet d’encre et soient capables de mesurer avec précision même des composés très rares, les matériaux se dégradent progressivement en présence de fluides corporels.
L’introduction d’un composé à base de nickel aide à stabiliser les capteurs à base enzymatique, comme ceux qui détectent le lactate ou le glucose, tout comme un nouveau polymère ajouté aux capteurs à base d’ions, qui détectent des biomarqueurs comme le sodium ou le potassium.
« L’ajout de ces nouveaux matériaux améliore considérablement la stabilité du capteur pendant une utilisation à long terme », rapporte Wei Gao. Comme les capteurs de sueur précédents, CARES peut être alimenté par batterie et peut communiquer sans fil avec un téléphone ou un ordinateur via Bluetooth.
L’apport de l’apprentissage automatique à CARES
Une autre innovation importante de CARES est l’ajout de l’apprentissage automatique. Comme le stress se présente sous de nombreuses formes différentes et stimule une réponse complexe affectant de nombreux systèmes corporels différents, l’interprétation précise d’une multitude de données est essentielle à l’utilité de CARES et d’autres capteurs.
Des expériences induisant du stress chez des sujets portant le dispositif CARES ont démontré que le capteur mesure avec précision l’interdépendance des biomarqueurs physiologiques (comme le pouls) et chimiques (comme le glucose). Les sujets ont également répondu à des questionnaires pour auto-évaluer leurs sentiments d’anxiété et de stress psychologique avant et après l’exposition à des situations stressantes comme l’exercice vigoureux ou le jeu vidéo intense. Les données ont montré des corrélations claires entre les auto-rapports de stress et ses corrélats physico-chimiques tels que mesurés par CARES.
« Des niveaux élevés de stress et d’anxiété causés par des environnements de travail exigeants, comme ceux vécus par les soldats ou les astronautes, peuvent affecter significativement les performances », note Wei Gao. « La détection précoce de la gravité du stress permet une intervention en temps opportun. Notre capteur portable, combiné à l’apprentissage automatique, a le potentiel de fournir des informations en temps réel sur le niveau de stress. »
Légende illustration : Dispositif CARES sans fil entièrement intégré.