Des digues mobiles auto-alimentées pour lutter contre les tsunamis au Japon

Des digues mobiles auto-alimentées pour lutter contre les tsunamis au Japon

Face à la menace constante des tsunamis, le Japon, avec ses 2 780 ports de pêche et 993 ports commerciaux et industriels, cherche des solutions pour protéger ces actifs côtiers essentiels. Une nouvelle solution se présente sous la forme d’un système de barrière mobile, où des portes surgissant du fond marin agissent comme des barrières, protégeant les ports contre les tsunamis, les surcotes et les vagues hautes. Lors de catastrophes naturelles, les coupures de courant peuvent par contre perturber l’électricité nécessaire pour faire fonctionner la porte.

Un système de mur marin mobile auto-alimenté

Une équipe de chercheurs dirigée par le professeur Hiroshi Takagi de l’Institut de technologie de Tokyo a proposé un système de mur marin mobile auto-alimenté (SMS) qui utilise l’énergie microtidale (amplitudes de marée) pour faire fonctionner les portes.

Le système proposé se compose de portes placées à l’entrée du port conçues pour se fermer pendant les périodes d’inactivité du port, comme la nuit ou les saisons de vacances. Lorsqu’elles sont levées, les différences de niveaux d’eau entre l’intérieur et l’extérieur du port sont utilisées pour générer de l’électricité, qui est ensuite stockée et utilisée pour les opérations de porte ultérieures.

« À notre connaissance, il n’existe pas encore de système dans le monde qui utilise des murs marins mobiles pour générer de l’électricité et qui utilise ensuite cette électricité pour faire fonctionner le système lui-même. En ce sens, le SMS est un concept totalement nouveau », explique le professeur Takagi.

Exploitation des amplitudes microtidales

Malgré l’étendue de la côte japonaise, les marées – représentant la différence de hauteur entre les marées hautes et basses – sont considérées comme trop petites pour une production d’énergie marémotrice à grande échelle. En revanche, le système SMS exploite les amplitudes microtidales du niveau de la mer, qui varient de 10 cm à 150 cm pendant les marées de vives-eaux.

Le système se compose d’une série de portes avec un espace de 30 cm qui vise à faire fonctionner les portes adjacentes en douceur sans interaction et de petites turbines pour la production d’énergie logées dans l’espace. Des turbines, avec une hélice par intervalle de 50 cm verticalement, sont placées dans les espaces entre les portes.

La porte de la digue auto-élévatrice s’élève à partir de l’espace de stockage souterrain, créant une différence de niveau de l’eau de mer avant et après l’élévation de la porte. La différence de niveau de la mer génère un fort débit entrant, puis plusieurs petites turbines (hélices) fonctionnent pour produire de l’électricité. Crédit : Hiroshi Takagi

Test de faisabilité et potentiel d’application

Les chercheurs ont testé la faisabilité du système dans les ports japonais, où il fonctionne huit heures par jour, pour déterminer s’il peut générer suffisamment d’électricité pour rétablir les portes sous le fond marin après la levée de l’alerte au tsunami, en tenant compte de la force de flottabilité de la porte flottante.

Sur 56 ports évalués à travers le Japon, neuf emplacements étaient hautement faisables, 14 faisables, et 33 non faisables en raison du faible potentiel de production d’énergie. Toutefois, 20 emplacements faisables ont été identifiés le long de la côte ouest du Japon, face à la fosse de Nankai – une zone de subduction connue comme la source de séismes de méga-poussée qui se produisent tous les siècles ou deux.

Ces événements sismiques ont le potentiel de déclencher des tsunamis, ce qui fait du système SMS proposé une mesure de protection prometteuse pour les ports vulnérables et leurs arrière-pays.

Des ports spécifiques pour une énergie supplémentaire

De plus, les chercheurs ont identifié des ports spécifiques, dont Himeji et Fukuyama, comme des exemples d’emplacements favorables pour la production d’énergie supplémentaire qui peut être stockée pour une utilisation ultérieure.

Ces zones, situées dans la mer intérieure de Seto, servent de grands centres industriels avec des industries sidérurgiques, la construction navale, des usines chimiques et diverses usines.

En plus de protéger ces infrastructures critiques contre les tsunamis, le système proposé peut également fournir de l’énergie d’urgence pour renforcer la résilience de ces industries face aux catastrophes. Il intègre la prévention des catastrophes avec l’utilisation de l’énergie renouvelable. « Nos résultats décrivent un système synergique entre la prévention des catastrophes et l’utilisation de l’énergie renouvelable », ajoute le professeur Takagi.

Une vision globale pour la protection des ports

Tout en reconnaissant des défis tels que les obstacles techniques et les restrictions imposées par les lois et règlements connexes, les chercheurs envisagent le système SMS comme une protection mondiale pour les ports contre les catastrophes naturelles, la montée du niveau de la mer et les conditions météorologiques extrêmes, dont les inondations côtières.

Le professeur Takagi conclut : « Si la technologie de la barrière mobile contre les tsunamis proposée, dans les conditions difficiles de catastrophe au Japon, peut être fermement établie grâce à cette recherche, il ne fait aucun doute qu’un jour viendra où cette technologie pourra être exportée et déployée à l’étranger comme une technologie de prévention des catastrophes révolutionnaire ».

Article: “Feasibility of a self-powered movable seawall using microtidal energy in Japan” – DOI: 10.1016/j.renene.2023.119563

[ Rédaction ]

         

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