De récentes recherches scientifiques mènent à une conclusion étonnante : les nuages de poussière sahariens pourraient jouer un rôle majeur dans la réduction des concentrations de méthane, un gaz à effet de serre hautement puissant, dans notre atmosphère.
Pour bien saisir l’ampleur de cette découverte, il est indispensable de comprendre l’interaction entre le méthane, un des principaux acteurs du réchauffement climatique, et le Aérosol de Pulvérisation de Mer et de Poussière Minérale (MDSA), un phénomène géophysique relativement peu étudié jusqu’à présent.
Contexte de l’étude
Le méthane est un gaz à effet de serre qui, selon certaines estimations, pourrait être responsable d’un tiers du réchauffement climatique mondial. L’étude, publiée dans la revue PNAS, a été menée par une équipe de recherche internationale incluant le Professeur John E. Mak de l’École des Sciences Marines et Atmosphériques (SoMAS) de l’Université de Stony Brook.
Leur étude a révélé que lorsque la poussière minérale se mélange avec les embruns marins pour former le MDSA, celui-ci est activé par la lumière du soleil pour produire une abondance d’atomes de chlore, réduisant ainsi les concentrations totales de méthane.
Méthodologie
L’équipe de chercheurs a combiné modélisation globale, observations de terrain et analyses en laboratoire pour réaliser cette étude. Le point central de cette nouvelle recherche repose sur les observations de monoxyde de carbone atmosphérique et de ses isotopes stables (13CO) réalisées il y a vingt ans par le groupe de recherche du Professeur Mak et publiées dans le Journal of Geophysical Research en 2003.
Dans cet article, les auteurs ont formulé l’hypothèse que les variations saisonnières observées dans l’abondance de 13C dans le monoxyde de carbone atmosphérique (13CO) étaient la preuve que des atomes de chlore réagissaient avec le méthane.
« Nous ne disposions pas à l’époque des connaissances ou des compétences nécessaires pour poursuivre cette hypothèse, mais ce groupe de recherche international a repris ces idées avec des techniques plus récentes, » explique le Professeur Mak, co-auteur du nouvel article. « C’est un exemple de la façon dont des observations et des mesures de qualité peuvent se révéler utiles à l’avenir de manière imprévue. »
Conclusions de l’étude
Dans cette nouvelle étude, intitulée « Production d’atomes de chlore photocatalytique sur les aérosols de poussière minérale et de pulvérisation de mer au-dessus de l’Atlantique Nord« , les chercheurs concluent que le MDSA est la principale source de chlore atmosphérique au-dessus de l’Atlantique Nord.
En utilisant un modèle global de chimie-climat en 3D, l’équipe de recherche a constaté que lorsque le chlore issu du mécanisme du MDSA était intégré dans le modèle, les résultats correspondaient aux données de la Barbade et expliquaient la diminution du monoxyde de carbone.
En synthèse
Cette recherche révèle un mécanisme où un mélange de poussière du Sahara et d’aérosols de pulvérisation de mer activé par la lumière du soleil produit une grande quantité de chlore actif. Ce mécanisme résout plusieurs observations inexpliquées et révise considérablement notre compréhension du chlore atmosphérique, réduisant les incertitudes dans le budget des sources.
Si l’effet MDSA observé dans l’Atlantique Nord est extrapolé globalement, et si son efficacité est similaire dans d’autres parties du monde, les concentrations de chlore atmosphérique pourraient être environ 40% plus élevées qu’estimées précédemment. En intégrant cette découverte dans la modélisation mondiale du méthane, notre compréhension des proportions relatives des sources d’émissions de méthane pourrait être transformée.
Dans cette nouvelle étude, dirigée par Maarten van Herpen et intitulée « Photocatalytic Chlorine Atom Production on Mineral Dust-Sea Spray Aerosols Over the North Atlantic » (Production photocatalytique d’atomes de chlore sur les aérosols de poussières minérales et d’embruns au-dessus de l’Atlantique Nord), les chercheurs concluent que les aérosols de poussières minérales et d’embruns sont la principale source de chlore atmosphérique au-dessus de l’Atlantique Nord.