Conférence parlementaire sur les énergies renouvelables : Acte 1

Jeudi 6 décembre 2012 s’est tenue une conférence parlementaire présidée par Jean-Pierre Audy, député européen, membre de la commission industrie, recherche et énergie et Roland Courteau, sénateur de l’Aude, président du Groupe d’études sur l’énergie afin de s’interroger sur la place des énergies renouvelables dans le mix énergétique français.

L’occasion pour les acteurs du secteur de faire le point sur les ambitions industrielles des filières EnR, leur développement et leur coût de financement. Mais également de débattre des orientations technologiques, innovations et des synergies possibles au niveau européen.

Lors de la 1ère séance, Olivier Laffitte, directeur de projet (Sereo) a initié le débat sur le concept d’éolien flottant, en demandant si d’autres projets pouvaient se concrétiser ? et avec quels financements ?

Jérôme Pécresse (Président, Alstom Énergies Renouvelables)

"L’éolien flottant est une technologie en développement, en voie de maturité. L’éolienne offshore posée qu’Alstom a réalisée fait 6 mégawatts et mesure 100 mètres de mât, 73,5 mètres de pales : il n’est donc pas aisé de la faire flotter et de l’ancrer à plus de 40 mètres de profondeur. Un autre axe technologique consiste à changer le centre de gravité des éoliennes, notamment pour faciliter les travaux de maintenance. Quelques démonstrateurs fonctionnent, à l’heure actuelle, mais aucun processus de convergence technologique n’est engagé. Au Japon, seul l’éolien flottant est envisageable, ce qui crée un besoin massif, dans un marché porteur. Cependant, il n’est pas trop tard pour proposer de nouvelles technologies."

Ivan Faucheux (Commissariat général à l’investissement)

"Il existe des moyens pour financer des concepts d’éoliennes flottantes de nouvelle génération, comme le crédit d’impôt recherche ou les dispositifs subventionnels. La question à se poser est en fait relative à la maturité technologique du projet. Ainsi, pour répondre à un appel d’offres de l’ADEME, il est nécessaire de présenter des plans d’affaires crédibles et les moyens de remboursement en cas de succès. Le porteur de projet doit donc se poser la question de savoir s’il en est au stade du développement technologique, dans le cadre d’une entreprise ayant besoin de fonds propres (le financement possible est l’amorçage ou le capital-développement), ou si son projet est partenarial, d’envergure et plus risqué (le financement renvoie alors à un dispositif à caractère plus subventionnel, avec l’ADEME par exemple, le financement européen étant contraignant en termes de coordination des acteurs)."

David Bonnet (Président AFPAC)

"Lorsque les énergies renouvelables sont évoquées, il est question de la production d’énergie, plus rarement de production de chaleur. Monsieur le sénateur Roland Courteau a abordé le thème de la dépendance énergétique de la France vis-à-vis des énergies fossiles ; or, la réglementation thermique RT 2012, favorisant le développement de l’énergie gazière, aggravera fortement le déficit de la balance commerciale."

Marcel Deneux (Sénateur de la Somme
)

"Il ne faut pas confondre l’action du gouvernement et celle du Parlement. Pouvez-vous préciser votre question ?"

David Bonnet

"Il n’est question que de production d’énergie, jamais de production de chaleur. Or, avec les objectifs de la PPI Chaleur, vu l’importance de l’énergie consommée pour chauffer les bâtiments, il s’agit d’un sujet qui mériterait plus d’attention."

Marcel Deneux

"Durant cette journée d’études, nous traiterons peut-être, cet après-midi, des problèmes de bâtiment. Les techniques de cogénération ne sont pas toujours celles que nous avons le mieux soutenues. Il est vrai que nous ne toucherons pas au sujet de la géothermie, et que nous nous focaliserons sur l’énergie électrique."

David Bonnet

"Le deuxième point concernait la réglementation thermique 2012, qui aura pour corollaire un développement du chauffage au gaz, ce qui augmentera le poids des énergies fossiles dans le déficit de la balance commerciale."

Marcel Deneux

"Nous avons importé, en 2011, 63 milliards d’euros de pétrole, 71 milliards d’euros d’énergies au total. Le déficit commercial est de 70 milliards d’euros. Or, il ne faut pas comparer ces chiffres, car il n’existe pas de corrélation entre eux. L’idée de faire appel au gaz de schiste s’inscrit dans ce contexte de débat."

De la salle

"Je signale à Jérôme Pécresse que, selon le SER, le commerce éolien terrestre est équilibré. Quel est le potentiel hydrolien que nous espérons mobiliser sur nos côtes ?"

Lionel Lemoine (Ifremer)

"En 2020, 15 térawatt/heure seront techniquement exploitables. Il s’agit d’un chiffre que nous pouvons trouver dans différentes prospectives."

Marcel Deneux

"Nos conjectures font référence à des perspectives à venir. La politique du mix énergétique français n’est pas encore fixée ; elle ne le sera que progressivement."

David Bonnet

"La RT 2012 a-t-elle vocation à favoriser le développement des énergies renouvelables, ou celui des énergies fossiles ?"

Roland Courteau (sénateur de l’Aude)

"Par rapport à l’inquiétude qui se manifeste concernant une surconsommation de gaz et donc, des importations supplémentaires d’énergies fossiles, je rappelle que nous sommes actuellement capables de transformer l’électricité d’origine renouvelable en hydrogène. L’hydrogène combiné à certains métaux peut être stocké avec une faible pression. Une simple variation de pression permet une libération de cet hydrogène et son mélange avec du gaz naturel. Lorsque nous serons capables de réaliser cette opération, nous pourrons réduire nos importations de gaz."

Bernard Léon (Administrateur AFITE)

"Les possibilités technologiques existent, mais il nous manque le choix organisationnel et le courage politique. Des personnes sont porteuses de projets intéressants en matière d’innovation organisationnelle : l’innovation n’est pas seulement technologique."

Jean-José Wanegue, journaliste, Énergie & Développement Durable

"Les zones ultra-marines procurent-elles bien 50 % des énergies renouvelables ?"

Stéphane Dupré la Tour (Responsable énergies renouvelables, EDF)

"Les zones ultra-marines sont gérées par une filiale d’EDF, nommée Système électrique insulaire. Nous ne sommes pas encore à 50 % d’énergie renouvelable électrique insulaire. Il s’agit d’un objectif que nous devrons atteindre en 2020. A priori, cet objectif sera tenu."

Marcel Deneux

"Les 23 % d’énergies renouvelables prévus par la loi française proviennent d’un accord européen. Certains pays sont loin de ce taux, d’autres le dépassent largement ; la différence à combler est inversement proportionnelle au PIB des différents États membres."

De la salle

"Tout d’abord, j’aimerais souligner le fait que l’énergie marémotrice n’a pas été évoquée ce matin. Ensuite, Jérôme Pécresse a fait référence à un taux de 1,5 % d’hydroélectricité en France ; or, il ne fait mention que de la « grande hydroélectricité », car la « petite hydroélectricité » est à l’origine d’une véritable filière industrielle, à raviver."

Lionel Lemoine

"Au niveau de l’énergie marémotrice, nous avons le barrage de la Rance, pour lequel nous disposons d’un retour d’expérience. D’autres projets sont évoqués (Grande-Bretagne), mais je n’ai pas d’informations précises sur l’état d’avancement de ces projets."

Jérôme Pécresse

"Il existe des projets marémoteurs en Asie, en Afrique du Sud, en Grande-Bretagne (dans la baie de Bristol)."

Ivan Faucheux

"À chaque Salon de l’automobile, en France, nous avons la chance d’avoir un nouveau sujet d’émerveillement (le Wankel, le fameuxmoteur rotatif, l’électrique, l’hydrogène, etc.)."

"Le problème est que l’automobile fait face à de grands freins en termes de changement du dispositif industriel. Le premier est relatif aux constructeurs automobiles, qui doivent effectuer de gros investissements et fidéliser constamment leur clientèle. Le moteur à air comprimé reste une option possible, mais je doute de la viabilité industrielle immédiate de ce moteur."

"Le deuxième frein concerne le circuit de distribution : les investissements que devraient réaliser les stations-essence en cas d’introduction d’un nouveau carburant ou d’un nouveau moyen de stockage sont trop importants. Il doit rester sur Paris de vieux réseaux d’air comprimé liés aux horloges qui étaient sur cette technologie ou aux roulettes de dentistes, mais je crains qu’ils ne suffisent pas."

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Pas naif

et donc assez démocrates. Il serait souhaitable que les blogs en fassent autant. J’aimerais relever ce qu’a dit le sénateur Courtereau: “On sait stocker l’hydrogène allié à des métaux”. Vrai pour le palladium (à 20,000€ le kg et stockant 0.01kg d’H² soit l’équivalent de 30 grammes d’essence). On finira par savoir le faire avec le magnésium. Fini le problème du coût du métal mais pas celui du poids car pour stocker l’équivalent énergétique de 1kg d’essence il faut 6 fois plus de poids. C’est OK pour un navire mais pas pour une automobile ou avion. Finalement, dans le meilleur des cas en partant d’énergie EnR folâtre à 200€ le MWh, le coût H² libéré serait au moins le double. Un tel prix ne marque pas les esprits. Alors c’est simplement 5 fois le prix actuel du fuel de chauffage, sans compter les immenses dangers d’incendie. Parlons-en: Mg absorbe H² lorsqu’il est divisé. En cas de rupture d’un réservoir Mg-H² contenant l’équivalent de 2 tonnes de fuel (réserve classique de cuve de chauffage), H² brûlera en libérant autant de chaleur que les 2t de fuel mais Mg brûlera à son tour en rajoutant 3 fois plus de chaleur et à 3000°C. Rappelez-vous les anciens flash photo “magnésium” avec 0.001g de Mg. Alors avec 6tonnes de Mg, la maison et celels du voisinage seront volatilisées. Donc impraticable car de très très loin, le meilleur moyent de stocker l’énergie est le.. fuel, désolé, la Nature n’a rien fait de mieux. Notre cher sénateur lit trop de romans de science fiction.