Le laboratoire pharmaceutique américain Eli Lilly vient d’inaugurer un supercalculateur géant dédié à l’intelligence artificielle pour révolutionner la découverte de nouveaux traitements. Équipé de plus de 1 000 processeurs ultra-puissants, il permettra de réduire considérablement le temps nécessaire pour développer de nouveaux médicaments.
Pour comprendre l’ampleur du progrès, une comparaison suffit. En 1992, Eli Lilly utilisait déjà un supercalculateur Cray, considéré comme le plus performant de l’époque. Aujourd’hui, un seul des 1 016 processeurs de la nouvelle installation équivaut à 7 millions de ces anciennes machines. L’ensemble peut effectuer plus de 9 quintillions d’opérations mathématiques par seconde, un chiffre astronomique qui dépasse l’entendement.
L’infrastructure repose sur la technologie NVIDIA Blackwell, un système spécialement conçu pour traiter d’énormes quantités de données. Un logiciel de gestion permet aux équipes de superviser l’ensemble de manière sécurisée.
Transformer la recherche de médicaments
Concrètement, les scientifiques pourront utiliser l’intelligence artificielle pour découvrir de nouvelles molécules susceptibles de devenir des médicaments. Thomas Fuchs, responsable de l’intelligence artificielle chez Lilly, explique : « Nos modèles de fondation ouvrent de nouvelles possibilités pour nos chimistes, en les aidant à découvrir de nouveaux motifs et configurations d’atomes qui étaient hors de portée avec les méthodes traditionnelles. L’IA nous donne les moyens d’accélérer les progrès vers le développement et la livraison de médicaments meilleurs, plus personnalisés et ciblés ».
L’IA peut également analyser des images médicales en quelques jours au lieu de plusieurs mois, identifier des biomarqueurs pour des maladies graves, ou encore concevoir des thérapies géniques innovantes. Elle accélère aussi les essais cliniques en automatisant certaines tâches administratives.
Eli Lilly a décidé de mettre certains de ses outils d’intelligence artificielle à disposition d’autres entreprises de biotechnologie via une plateforme appelée Lilly TuneLab. Les petites sociétés pourront ainsi bénéficier de modèles développés grâce à un investissement d’un milliard de dollars, tout en gardant leurs propres données confidentielles. Plus d’entreprises participent, plus les modèles deviennent performants.
Optimiser les usines de production
L’intelligence artificielle ne sert pas seulement à découvrir de nouveaux médicaments, mais aussi à améliorer leur fabrication. Grâce à des « jumeaux numériques » — des copies virtuelles des usines —, Lilly peut tester différentes configurations avant de les appliquer dans la réalité. Thomas Fuchs souligne : « Les temps d’arrêt des machines peuvent signifier des retards importants dans la livraison aux patients des médicaments dont ils dépendent. Nous nous concentrons sur l’optimisation des systèmes et visons la performance maximale grâce à l’IA ».
Des robots intelligents sont déjà déployés pour contrôler la qualité et transporter les médicaments dans les usines.

Un investissement massif aux États-Unis
Diogo Rau, directeur du numérique chez Lilly, résume la stratégie : « Si vous vous concentrez uniquement sur la science, vous n’obtiendrez qu’une expérience, un article ou un traitement — mais si vous réunissez science et technologie, comme le calcul accéléré que nous obtenons grâce à cette usine d’IA, vous pouvez atteindre une échelle massive pour apporter le traitement à des millions de personnes ».
Le projet s’inscrit dans un plan de 50 milliards de dollars pour développer les capacités industrielles de Lilly aux États-Unis, avec la construction de quatre nouvelles installations et un laboratoire de 4,5 milliards de dollars dans l’Indiana. Au total, environ 13 500 emplois devraient être créés.
L’IA comme assistant, pas comme remplaçant
Lilly insiste sur une vision équilibrée de l’intelligence artificielle. Diogo Rau précise : « Les agents d’IA peuvent travailler 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, et explorer des idées que les humains pourraient ne pas avoir le temps ou la capacité d’expérimenter. Au bout du compte, tout tourne autour de l’apprentissage humain — pas de l’apprentissage automatique. Les machines aident à rendre les humains plus intelligents en stimulant de nouvelles idées pour de nouvelles molécules ».
Selon le cabinet d’analyse CB Insights, Eli Lilly est déjà l’entreprise pharmaceutique la mieux préparée pour utiliser l’intelligence artificielle. Avec son nouveau supercalculateur, le laboratoire renforce sa position de leader mondial.
Un pari sur l’avenir
Thomas Fuchs conclut avec prudence : « Nous ne faisons qu’effleurer la surface de ce qui est possible avec l’IA dans la conception et le développement de médicaments. Cette nouvelle usine d’IA et nos collaborations à travers toute la communauté biotechnologique vont fondamentalement changer la façon dont nous concevons, construisons et développons les médicaments ».
Dans l’industrie pharmaceutique, où développer un nouveau médicament coûte des milliards et prend plus d’une décennie, l’intelligence artificielle pourrait représenter la solution pour accélérer le processus et réduire les coûts. Pour les patients, l’enjeu est le suivant : accéder plus rapidement à des traitements innovants et personnalisés.
Source : NVIDIA












