L’intelligence artificielle (IA) et l’apprentissage automatique bouscule la recherche sur la fusion nucléaire. Au Département de l’Énergie des États-Unis, les scientifiques du Princeton Plasma Physics Laboratory explorent de nouvelles façons d’optimiser et de contrôler les réactions de fusion grâce à ces technologies de pointe.
Dans un article publié dans Nature Communications, des chercheurs du PPPL expliquent comment ils ont utilisé l’apprentissage automatique pour éviter les perturbations magnétiques qui déstabilisent le plasma de fusion.
«Nous ne pouvons pas avoir ces instabilités dans un réacteur à fusion commercial. Notre travail montre que l’IA pourrait jouer un rôle important dans la gestion des réactions de fusion à l’avenir, en évitant les instabilités tout en permettant au plasma de générer autant d’énergie de fusion que possible», indique Egemen Kolemen, co-auteur de l’étude.
Le système d’IA peut prédire les perturbations, déterminer les paramètres à modifier et effectuer ces changements avant que les instabilités ne surviennent. Il a été déployé avec succès sur deux tokamaks, DIII-D et KSTAR, qui ont atteint le mode de confinement élevé (H-mode) sans instabilités, une première dans un cadre pertinent pour le déploiement de l’énergie de fusion à l’échelle commerciale.
Optimiser la conception des réacteurs
L’IA est également utilisée pour améliorer la conception des réacteurs à fusion. Michael Churchill, du PPPL, utilise l’apprentissage automatique pour optimiser la conception des stellarateurs, des réacteurs à fusion avec une forme plus complexe que les tokamaks.
«Nous aimerions effectuer des calculs de plus haute fidélité mais beaucoup plus rapidement afin de pouvoir optimiser rapidement», explique-t-il.
De même, l’équipe de Stefano Munaretto utilise l’IA pour accélérer un code appelé HEAT, développé pour simuler le plasma dans le tokamak NSTX-U. En optimisant HEAT, les chercheurs espèrent pouvoir rapidement exécuter le code complexe entre les tirs de plasma, en utilisant les informations du dernier tir pour décider des paramètres du suivant.
Contrôler le chauffage du plasma
Les chercheurs tentent également de trouver les meilleures conditions pour chauffer les ions du plasma en perfectionnant une technique appelée chauffage cyclotronique radiofréquence des ions (ICRF). Álvaro Sánchez Villar et son équipe ont montré que l’apprentissage automatique peut grandement accélérer le code utilisé pour simuler les interactions entre les ondes radio et le plasma, tout en conservant une grande précision.
«Cela nous permet de mieux contrôler le plasma car nous pouvons prédire son évolution et le corriger en temps réel», explique Sánchez Villar.
Fatima Ebrahimi dirige un projet qui utilise des données expérimentales, des simulations de plasma et l’IA pour étudier le comportement du bord du plasma pendant la fusion. L’objectif est de trouver les meilleurs moyens de confiner un plasma dans un tokamak à l’échelle commerciale, en évitant les modes localisés au bord (ELMs) qui peuvent endommager les composants internes.
«Nous voulons explorer comment l’apprentissage automatique peut nous aider à tirer parti de toutes nos données et simulations afin de combler les lacunes technologiques et d’intégrer un plasma haute performance dans un système de centrale à fusion viable», explique Fatima Ebrahimi.
Légende illustration : Kyle Palmer / PPPL Communications Department