“La photonique est partout, et pourtant invisible”

La convention d’affaires internationale, Invest in Photonics 2012 – dédiée aux investissements dans l’industrie photonique – a annoncé récemment avoir rassemblé plus de 150 participants, pour cet événement qui a permis la rencontre d’investisseurs et de porteurs de projets, les 12 et 13 décembre derniers à Bordeaux.

La France a pu montrer tout le potentiel de son secteur photonique, les participants français représentant les deux tiers des visiteurs. Sur les 19 sociétés sélectionnées pour présenter leur projet et lever près de 72 millions d’euros, 11 étaient françaises.

Le marché de la photonique est estimé à 300 milliards d’euros, et devrait atteindre 480 milliards d’euros d’ici 2015, selon les chiffres de SPIE (the international society for optics and photonics). La photonique représente 1,7 million d’emplois à travers le monde. En Europe, 5.000 PME et 1.000 instituts de recherche se partagent le marché, estimé à 60 milliards d’euros. L’Allemagne est le leader du secteur avec 20% de parts de marché, suivie par la France et le Royaume-Uni avec 14 pour cent chacun (source : Photonics21).

Selon les analystes, la photonique reste malgré tout un secteur difficile à segmenter, à cause du chevauchement de certains domaines. Cette technologie d’avenir couvre plusieurs secteurs d’activités et est donc commercialisée en dehors de son cœur de métier, ce qui la rend complexe à analyser pour les investisseurs.

« Invest in Photonics est la seule convention d’affaires qui informe les capitaux-risqueurs sur les futures applications de la photonique, et leur fournit des données sur les différents marchés qu’elle recouvre », explique Giorgio Anania, Président d’Invest in Photonics 2012. « L’industrie de la photonique va avoir un impact considérable sur de multiples industries. En rassemblant les acteurs du secteur, nous facilitons cette évolution. »

Afin de favoriser les opportunités de rencontres pour les investisseurs et les porteurs de projets, les intervenants et les analystes de niveau international ont mis l’accent sur trois marchés à fort potentiel : les produits grand public, les technologies vertes et les sciences de la vie. L’Asie a aussi fait l’objet d’une conférence dédiée. Parmi les sujets abordés : le diagnostic précoce de maladies grâce à de nouvelles méthodes de détection, la communication et l’infrastructure des données au XXIe siècle, les appareils grand public, l’éclairage LED (diode électroluminescente), les lasers, les technologies de pointe en affichage et capteurs, le packaging des circuits intégrés en 3D, la microfabrication du verre et du PCB et l’énergie solaire.

« La photonique est partout, et pourtant invisible », ajoute Steve Anderson, Analyste industriel chez SPIE, lors de son discours d’ouverture. « Cette technologie fondée sur la lumière concerne tous les secteurs des produits grand public et industriels, avec de multiples applications, dont les dispositifs portables, la communication, les technologies et les sciences de la vie. »

« Par exemple, les smartphones comportent 13 composants différents basés sur les lasers, ainsi que d’autres pièces issues de la technologie photonique, et ils fonctionnent avec la fibre optique, » explique M. Anderson. « Bon nombre d’entreprises florissantes, dont la technologie est basée sur la photonique, n’associent même pas leur société à l’industrie photonique. »

Plusieurs intervenants se sont concentrés sur le marché des lasers qui, selon M. Anderson, connaît une forte croissance pour certains types de produits, en particulier les lasers à fibre. Ceux-ci ont été adoptés par l’industrie plus rapidement que toute les autres technologies laser. Pour l’énergie dirigée, les lasers permettent le traitement pièce par pièce, par opposition au traitement par lot, ce qui autorise la customisation ou l’adaptation à d’éventuels changements des procédés amont. Les lasers permettent de traiter des matériaux délicats, comme le verre, la céramique, le plastique, le métal et les alliages. En matière de protection de l’environnement, l’ablation au laser est un procédé sec, qui évite d’utiliser et de rejeter dans la nature les produits chimiques dangereux qui sont habituellement utilisés dans la gravure à sec et humide. Pour certaines applications (marquage, inscription), les éléments mécaniques n’ont même pas besoin d’être nettoyés, une procédure qui implique habituellement l’utilisation d’eau et de solvants.

François Valencony, Directeur Général chez Mérieux Développement, et Eric Mottay, Président Directeur Général d’Amplitude Systèmes, ont également discuté du potentiel de croissance des lasers ultrarapides dans le domaine médical, ainsi que dans d’autres grands secteurs industriels.

Une autre technologie a fait parler d’elle pendant la conférence : la technologie des LEDs, en particulier dans le domaine de l’éclairage. Les LEDs représentent aujourd’hui la moitié des ventes de rétroéclairage pour la télévision et les dispositifs mobiles. Durant les deux prochaines années, on s’attend à un taux de croissance de 13 pour cent environ sur ce secteur. Le marché devrait passer de 11,4 milliards de dollars en 2012 à 17 milliards de dollars en 2018 (Source : Yole Développement « Status of the LED Industry »).

« Les LEDs se démarquent de toutes les autres technologies d’éclairage jamais inventées », souligne Hans Nikol, Vice-Président de l’innovation LED et de la stratégie chez Philips Lighting. « Aujourd’hui, toutes les technologies d’éclairage coexistent, depuis la bougie jusqu’à l’halogène, en passant par le tube fluorescent. Nous sommes persuadés qu’à terme, toutes ces technologies seront remplacées par des LEDs. »

Autre marché émergent : la photonique intégrée, qui se sert de la lumière pour réaliser ce qui était fait auparavant grâce à l’électronique. « Les secteurs pour lesquels la photonique peut apporter des solutions sont nombreux. Il est nécessaire de réduire la consommation d’énergie des serveurs informatiques pour fonctionner et se refroidir, par exemple, ainsi que celle des routeurs qui consomment de plus en plus d’énergie », déclare Pierre Billardon, Président de Carl Zeiss France. « Parmi les autres pistes, réduire les coûts des soins médicaux et améliorer le diagnostic précoce de maladies invalidantes telles que la maladie d’Alzheimer. »

En termes d’opportunités dans l’énergie solaire, Raffi Garabedian, Directeur technique chez First Solar, a aiguillé les investisseurs présents vers plusieurs secteurs qui offrent des pistes en matière d’investissement. Il a cité notamment les développements technologiques incrémentaux qui peuvent améliorer les plateformes technologiques dominantes avec des besoins minimaux en rééquipement et les métrologies appliquées à l’amélioration de la qualité et au contrôle de procédés dans la production.

Ian Jenks, Président d’Intune Networks, affirme que dans un monde évoluant vers des communications par zettaoctets, la photonique sera un allié de poids pour résoudre les problèmes associés au développement de nouvelles architectures, qui seront nécessaires pour développer économiquement ces réseaux virtuels.

Concernant l’Asie, les analystes ont reconnu la compétitivité de plusieurs entreprises asiatiques dans certains secteurs de la photonique, en particulier celui des AMOLED, marché sur lequel Samsung et LG Display sont bien implantés, suivis par des sociétés émergentes asiatiques. La Chine dispose des meilleures capacités sur le marché des réacteurs LED, pour une production qui n’a commencé qu’en 2009. Le débat a été alimenté par les questions des participants sur la protection de la propriété intellectuelle.

M. Billardon, Président de Carl Zeiss France, a témoigné de l’entrée réussie de Zeiss sur le marché chinois il y a deux ans : l’entreprise fournit désormais du matériel médical aux hôpitaux de deux grandes villes chinoises, dont Chengdu. Pour M. Billardon, « la Chine est un marché à fort potentiel, lancez-vous ! »

Invest in Photonics a également décerné un prix à la société belge Ovizio Imaging Systems, récompensant ainsi sa technologie innovante d’holographie numérique pour les plateformes d’imagerie microscopique quantitative.

         

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