La simplification des normes de construction : l’isolation en danger ?

La Règlementation Thermique 2012, émanant du Grenelle de l’Environnement a ouvert une nouvelle ère en France, celle de la construction responsable vis-à-vis de l’environnement et de nos concitoyens.

Alors que celle-ci a instauré en France des règles visant à réduire la consommation d’énergie des nouveaux bâtis, les discussions en cours pour la rédaction d’une nouvelle règlementation en 2020 tendaient à aller encore plus loin dans cette démarche. Ainsi, on passerait progressivement de la construction de Bâtiments à Basse Consommation (BBC) à celle de Bâtiments à Energie Positive (BEPOS).

L’annonce par le gouvernement du projet « Objectif 500 000 » est une bonne nouvelle pour l’ensemble des secteurs du bâtiment. Mais certaines propositions du groupe de travail 1 visant à « simplifier la règlementation et les normes de construction et de rénovation » lié à ce projet, vont à l’encontre des efforts énergétiques entamés par la Règlementation Thermique 2012. Celui-ci prévoit en effet de remonter le coefficient linéique des ponts thermiques à la jonction dalle/façade de 0,6 à 1. Cela reviendrait à ne plus du tout isoler cet espace qui représente aujourd’hui 40% des déperditions de chaleur des nouveaux bâtiments.

Alors que l’ensemble de la filière industrielle s’est mobilisée pour apporter de nombreuses solutions techniques pour garantir des résultats économiquement performants et pérennes, le fait de ne plus traiter les ponts thermiques linéiques ruinerait totalement ces efforts.

Ne plus garantir cette isolation, c’est autoriser la construction de bâtiments énergivores favorisant l’apparition des phénomènes suivants : moisissures, condensations, hausse des allergies et des risques asthmatiques pour les habitants, possibles risques structurels et défaillances prématurées des balcons avec les coûts induits en matière de réfection .

Ces propositions suscitent une grande incompréhension tout d’abord car cette démarche semble contraire à l’esprit de la loi Grenelle II qui consacre l’engagement de la France en faveur d’un bâti moins énergivore. Ce faisant, ces propositions contredisent également les dispositions de la directive européenne 2010/31/UE sur la performance énergétique des bâtiments, qui prévoit, la prise en compte effective des caractéristiques thermiques réelles du bâtiment, notamment l’isolation et les ponts thermiques.

Les conséquences des propositions du groupe de travail 1 seront finalement supportées par les consommateurs, qu’ils soient futurs propriétaires ou locataires de bâtiments mal isolés. A titre d’exemple , la seule problématique du non-traitement des ponts thermiques engendrera, selon les professionnels du bâtiment rencontrés, une gabegie supérieure à 10% de la facture énergétique des ménages.

Repère : "700 mètres de ponts thermiques sur un immeuble de trois étages, génèrent une surconsommation de 7000 litres de fuel par an et près de 3,5 tonnes de rejet de CO2 dans l’atmosphère"


Raphaël Kieffer, Directeur Général Schöck France

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dede29

C’est de la mauvaise volonté de ne pas vouloir construire plus de logements ,plus vite ,moins chers ,avec une meilleure isolation ,avec plus de travailleurs … Enfin !

seb

Je comprend l’agacement Schöck, un des gros producteurs de rupteurs de ponts thermiques, mais il me semble que cette disposition ne concerne que le “garde fou” placé dans la RT2012 sur les ponts thermiques. La performance globale du bâtiment ne doit pas en être affectée car les exigeances de performances globales (BBio et CEP) du bâtiment ne sont pas dégradées. En gros ça autorise juste à dire, je m’accomode des ponts thermiques sur ce bâtiment, mais du coup, je met le paquet sur les autres aspects de sa performance énergétique. Sur les calcul des émissions de CO2 en fin d’article, je suis circonspect, pour moi 1 litre de fioul = 3 kg de CO2, donc 7000 litres pour moi ca devrait faire 21 tonnes…

Jymesnil2

ce BEPOS va être une farce de très grande ampleur 🙂 isoler c’est conserver de l’énergie, le positif c’est produire de l’énergie ! le coût de l’isolation conservation au kWh est environ 4 à 5 fois moins élevé quele coût de production de l’énergie (chauffage, climatisation, photovoltaïque, etc…). Les coûts d’investissements sont considérables dans cette optique et les français hormis quelques privilégiés ne pourront tout simplement pas financer ce BEPOS ?! c’est déjà très juste actuellement quand ce n’est tout simplement plus possible ! la seule voie sérieuse et que l’union européenne a déjà choisie c’est la maison passive en base et le positif en complément. Des besoins très faibles sont plus faciles à couvrir !!!!

jolastico

@ Jymesnil 2 : le sujet, c’est le garde fou RT2012 sur le pont thermique de dalle intermédiaire, rien à voir avec le Bepos … De plus, ce que vous dites est totalement faux, enfin cela dépend. Le cout de l’isolation est moins élevé que le cout de production lorsque l’on part de quelque chose de très mal isolé. Lorsqu’on est déjà très bien isolé (type RT2012), le cout de production devient beaucoup plus faible que de la surisolation qui ne rapporte presque plus rien. Et sur une maison RT2012 bien conçue, il suffit d’ajouter environ 5-6000 € de photovoltaique pour passer Bepos, c’est un surcout, mais rien de délirant non plus. Pour en revenir à l’article, effectivement, cela ne concerne que le garde fou, et ne devrait (en théorie) pas nuire à la performance globale. Cependant, ça me semble quand même un très mauvais signal et un mauvais calcul. Cela laisse ouverte la porte a des bâtiments avec des ponts thermiques de dalle énormes, sous estimés dans certains cas (combien de bureaux d’études abusent des valeurs par défauts sans recalculer la vraie valeur d’un pont thermique ?) De plus, pour passer dans le calcul, cela obligera a surisoler ailleurs là où ce n’est pas forcément pertinent : au lieu d’avoir un bâtiment thermiquement cohérent, on ouvre la possibilité de déséquilibrer la conception thermique. Enfin, un psi avec une valeur de 1, c’est des températures de surface très faibles au niveau de la jonction, donc condensation et moisissures probables. Tout ça pour rester dans la sacro-sainte isolation par l’intérieur sur les bâtiments collectifs alors que l’isolation extérieure prend tout son sens dans ces cas de figure …

michel123

du trés chaud d’un côté et du trés froid localisé c’est la condensation et les moisissures assurées avec les procés inévitables pour malfaçon. Je pense que les constructeurs responsables n’iront pas sur ce terrain pour ne pas hypothèquer leur futur.

seb

Je suis d’accord avec vous sur le fond, mais je pense que ce retour en arrière sur les rupteurs de ponts thermiques correspond surtout à la prise en compte d’un certain nombre d’allertes du CSTB sur les risque qu’il peuvent représenter en zone sismique, ainsi que vis à vis du rique incendie. Sinon +1 pour l’isolation extérieure… mais c plus cher… PS : Vous en connaissez, vous, des bureaux d’étude qui recalculent les ponts thermiques qui ne seraient pas dans la bibliothèque du logiciel ? Moi quand j’évoque ça, on me regarde avec des yeux ronds …

seb

Je suis d’accord, le rique existe, cependant ce que vous dites laisse entendre qu’il ne serait pas possible de ré-isoler un bàtiment ancien en béton par l’intérieur. Heureusement c’est possible. Souvent, le choix du revètement de sol permet d’augmenter sufisament la température de surface pour éliminer les risques de condensation dans des appartements correctement ventilés. Si ce sujet vous intéresse, je vous conseille de faire des tests sous Therm(logiciel gratuit), ça permet de mieux saisir ce qui se passe.

Luis

¤ La construction bois est parfois plus économique que la construction béton. Des immeubles de plusieurs étages sont aussi construit en bois ou en architecture bois. De même qu’un HLM en brique crue (de la terre) à Nantes (très bon comme isolant thermique) ou encore des maisons en paille. Contrairement à une idée préconçue, la résistance du bois au feu est très bonne. Voir les essais du CSTB (Centre scientifique et technique du bâtiment). C’est mieux que les collèges “Pailleron” pour l’incendie.

jolastico

Oui, j’en connais un : moi 😀 Plus sérieusement, j’ai des confrères qui le font aussi, mais c’est clair que c’est pas la majorité. Et pourtant, les écarts entre les valeurs par défaut et les valeurs calculées précisément au cas par cas peuvent être énormes … Je connais Therm, je l’ai un peu utilisé. Il est puissant mais pas du tout convivial, et assez long à utiliser. Maintenant j’utilise Conducteo qui permet moins de chose mais beaucoup beaucoup plus rapide et facile d’utilisation. @Luis : oui, le bois a un très bon comportement en cas d’incendie, et est en général excellent en pont thermiques.

jolastico

Apparemment, cette proposition de relever le garde fou n’a pas été retenue pour l’instant :

seb31

Je ne comprends pas… Les ministres du Logement et de l’Ecologie s’entendent pour mener des projets favorisant un habitat plus responsable, mais au final les réglementations sorties n’ont pas d’effet positif … Surtout que la norme RT2012 est utilisée pour plusieurs dispositifs, comme la loi Duflot ! Alors s’il faut défaire une loi, il faut modifier l’autre… Ca ne va rien arranger à la situation économique du pays ! Il vaudrait mieux réfléchir avant d’adopter une loi ou réglementation …