l’AIEA dresse un état des lieux complet du nucléaire

L’électronucléaire continuera d’occuper une place prépondérante en tant que grande source d’énergie au cours des prochaines décennies, selon les dernières projections de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), qui vient de publier un rapport sur l’énergie, l’électricité et le nucléaire jusqu’en 2030 (Energy, Electricity and Nuclear Power for the period up to 2030).

L’AIEA établit deux projections annuelles concernant le développement de l’électronucléaire, l’une basse et l’autre haute. La projection basse suppose que la construction de toute tranche nucléaire déjà en cours ou à un stade de développement avancé sera mise en service et raccordée au réseau mais qu’aucune nouvelle tranche ne viendra s’y ajouter. Dans cette projection basse, la puissance installée passerait de 370 GWe à la fin de 2006 à 447 GWe en 2030. (1 gigawatt = 1 000 mégawatts = 1 milliard de watts)

Dans sa projection haute – qui inclut tout nouveau projet ou plan jugé réaliste et prometteur – l’AIEA estime que la puissance installée mondiale atteindra 679 GWe en 2030, ce qui représente un taux de croissance moyen d’environ 2,5 % par an.

« Notre tâche n’est pas tant de prédire que de préparer l’avenir » explique l’analyste nucléaire Alan McDonald, de l’AIEA. « Dans cette optique, nous actualisons chaque année une projection haute et une projection basse de manière à établir la fourchette d’incertitude à laquelle nous devrions nous attendre. »

La part de l’électronucléaire dans la production électrique mondiale est passée de moins de 1 % en 1960 à 16 % en 1986 et, 21 ans plus tard, elle se maintient quasiment toujours à ce niveau. La production d’électricité d’origine nucléaire a augmenté de manière constante, au même rythme que l’ensemble de la production électrique mondiale. À la fin de 2006, le nucléaire compte pour 15 % environ de la production mondiale d’électricité.

Les autres données recueillies par l’AIEA à la fin de 2006 sont développées ci-après. On compte alors 435 tranches nucléaires en exploitation dans le monde et 29 autres en construction. Les États-Unis d’Amérique possèdent le parc le plus important avec 103 tranches en exploitation, suivis de la France avec 59, du Japon avec 55 en exploitation plus une en construction, et de la Russie avec 31 en exploitation et sept en construction.

Dans les 30 pays producteurs d’énergie d’origine nucléaire, la part de l’électricité produite par le nucléaire varie considérablement : 78 % en France ; 54 % en Belgique ; 39 % en République de Corée ; 37 % en Suisse ; 30 % au Japon ; 19 % aux États-Unis d’Amérique ; 16 % en Russie ; 4 % en Afrique du Sud et 2 % en Chine.

C’est en Asie que se concentre l’effort actuel de développement nucléaire : à la fin de 2006, on y compte 15 des 29 tranches en construction dans le monde et 26 des 36 dernières tranches à avoir été raccordées à un réseau électrique. Si l’Inde ne recourt pour l’instant au nucléaire que pour moins de 3 % de son électricité, à la fin de 2006, elle possède d’ores et déjà un quart des réacteurs nucléaires en construction dans le monde – soit sept sur 29.

Les plans de l’Inde dans ce domaine vont encore plus loin : la part du nucléaire dans la production électrique sera huit fois plus importante (10 %) d’ici à 2022 et 75 fois plus (26 %) d’ici à 2052. Une augmentation multipliée par 75 représente une moyenne de 9,4 % par an, soit à peu près la croissance moyenne du nucléaire qu’a connu le monde de 1970 à 2004. Ce n’est donc pas sans précédent.

La Chine, enregistrant une croissance énergétique considérable, cherche à développer toutes les sources d’énergie possibles, y compris le nucléaire. Elle a quatre réacteurs en construction et prévoit de multiplier pratiquement par cinq son parc nucléaire d’ici à 2020 seulement.

Mais la croissance en Chine étant si rapide, cela ne représentera tout de même que 4 % de sa production électrique.

La Russie a 31 réacteurs en exploitation, cinq en construction et des plans de développement ambitieux. On parle beaucoup en Russie de la possibilité que le pays devienne un fournisseur à part entière de services liés au combustible, y compris de services comme la location de combustible, le retraitement de combustible usé pour les pays que cela intéresse, et même la location de réacteurs.

Le Japon a 55 réacteurs en exploitation plus un en construction et il prévoit de faire passer la part du nucléaire dans l’électricité de 30 % en 2006 à plus de 40 % dans les dix prochaines années.

La Corée du Sud, qui vient de raccorder au réseau l’an dernier son 20e réacteur, est en train d’en construire un autre et a préparé le terrain pour lancer la construction de deux supplémentaires. Le nucléaire représente d’ores et déjà 39 % de son électricité.

L’Europe offre un bel exemple d’approches diverses et variées. Elle compte en tout 166 réacteurs en exploitation et six en construction, mais plusieurs pays, comme l’Autriche, l’Italie, le Danemark et l’Irlande, ont rejeté l’énergie nucléaire et d’autres, comme l’Allemagne et la Belgique, sont en train de l’abandonner peu à peu.

D’autres pays par contre, comme la Finlande, la France, la Bulgarie ou l’Ukraine, poursuivent leur programme de développement nucléaire. En 2005, la Finlande a démarré la construction d’une centrale sur le site d’Olkiluoto-3 ; c’est le premier chantier nucléaire en Europe occidentale depuis 1991. La France devrait lancer en 2007 la construction de sa prochaine centrale.

Plusieurs pays dotés de programmes d’énergie nucléaire réfléchissent toujours aux orientations à prendre pour l’avenir. Le Royaume-Uni, avec 19 centrales en exploitation, dont bon nombre sont relativement anciennes, était, récemment encore, le plus indécis.

Si toute décision définitive sur la politique électronucléaire doit attendre que soit connu le résultat de la consultation publique en cours, un Livre blanc sur l’énergie, publié en mai 2007¹, a conclu que « … après avoir examiné les données et les informations disponibles, nous considérons que les avantages [du développement électronucléaire] l’emportent sur les inconvénients et que les inconvénients peuvent être maîtrisés de manière efficace. Sur cette base, le gouvernement estime à premier abord qu’il est de l’intérêt public de donner au secteur privé l’option d’investir dans de nouvelles centrales nucléaires. »

Les États-Unis d’Amérique ont un parc de 103 réacteurs produisant 19 % de l’électricité du pays. Les principaux développements de ces dernières décennies ont été l’amélioration des facteurs de capacité, l’augmentation du rendement électrique dans les centrales existantes et les renouvellements de licence. Actuellement, 48 réacteurs ont déjà été prolongés de 20 ans,ce qui porte leur durée de vie autorisée à 60 ans. Au total, les trois quarts des exploitants de réacteurs aux États-Unis ont soit déjà eu un renouvellement de licence, soit fait une demande de renouvellement, soit annoncé leur intention de le faire. Les intentions annoncées officiellement sont nombreuses (elles concernent une trentaine de réacteurs) et la Commission de la réglementation nucléaire est en train d’examiner quatre demandes d’autorisation préliminaire de site.

¹ http://www.dti.gov.uk/energy/whitepaper/page39534.html

Pour tout renseignement supplémentaire, s’adresser à : Division de l’information de l’AIEA,Section de la communication, tél. : 43-1-2600-21273. Pour de plus amples détails sur la situation actuelle de l’industrie nucléaire, consulter : "Power Reactor Information System,"(PRIS)

            

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Marcel

Le prix de l’électricité nucléaire devrait bientôt doubler, comme le montre cette étude : fondée sur l’évolution récente et future du prix de l’uranium. Un rapport très documenté : étudie l’évolution de la production d’uranium et le déclin de celle-ci à partir de 2025.