Le plus puissant collisionneur de particules du monde est prêt à redémarrer

Le Grand collisionneur de hadrons (LHC) basé au CERN, l’Organisation européenne pour la Recherche nucléaire, dans un tunnel situé à 100 mètres sous terre, de part et d’autre de la frontière franco-suisse, près de Genève (Suisse), constitue le plus puissant accélérateur de particules jamais construit.

Début 2013, après trois années d’exploitation, le Grand collisionneur de hadrons (LHC) a été arrêté dans le cadre d’une campagne de maintenance planifiée. Des centaines d’ingénieurs et de techniciens ont passé deux années à réparer et à consolider l’accélérateur afin qu’il puisse fonctionner à une énergie plus élevée.

À présent, le plus grand et le plus puissant collisionneur de particules du monde est prêt à redémarrer.

À l’intérieur du LHC, deux faisceaux de particules se déplacent à une vitesse proche de celle de la lumière, avant d’entrer en collision. Les faisceaux circulent en sens inverse, dans des tubes distincts placés sous ultravide. Ils sont guidés le long de l’anneau de l’accélérateur par un puissant champ magnétique, maintenu par des aimants supraconducteurs ; au-dessous d’une température spécifique, certains matériaux deviennent en effet supraconducteurs et n’offrent alors aucune résistance au passage du courant électrique. Pour tirer parti de ce phénomène, les aimants du LHC sont par conséquent refroidis à -271,3 °C (1,9 K), une température plus froide que celle de l’espace intersidéral. L’accélérateur est donc relié à un grand système de distribution d’hélium liquide, qui refroidit les aimants, ainsi qu’à d’autres systèmes annexes.

Quels sont les objectifs principaux du LHC ?

Le Modèle standard de la physique des particules est une théorie élaborée au début des années 1970 qui décrit les particules fondamentales et leurs interactions. Elle prédit avec exactitude une grande variété de phénomènes et est parvenue à expliquer, jusqu’à présent, presque tous les résultats des expériences en physique des particules. Mais le Modèle standard est incomplet. Il laisse sans réponse de nombreuses questions, auxquelles le LHC contribuera à apporter des éléments d’explication.

D’où vient la masse ? Le Modèle standard n’explique pas l’origine de la masse, ni pourquoi certaines particules sont très lourdes alors que d’autres ne possèdent aucune masse. Cependant, les théoriciens Robert Brout, François Englert et Peter Higgs ont proposé une théorie pour résoudre ce problème : les particules acquièrent une masse à travers le mécanisme de Brout-Englert-Higgs, en interagissant avec un champ invisible, dit « champ de Higgs », présent dans tout l’Univers. Celles qui interagissent fortement avec le champ de Higgs sont lourdes, celles qui n’interagissent que faiblement sont légères. À la fin des années 1980, les physiciens ont commencé à chercher le boson de Higgs, la particule associée au champ de Higgs.

En juillet 2012, le CERN a annoncé la découverte du boson de Higgs, qui confirmait l’existence du mécanisme de Brout-Englert-Higgs. Cette découverte ne représente cependant pas la fin de cette aventure, car les chercheurs doivent étudier le boson de Higgs en détail afin de mesurer ses propriétés et d’observer ses désintégrations rares.

La supersymétrie existe-t-elle ? Le Modèle standard n’offre pas une description unifiée de l’ensemble des forces fondamentales. En effet, il est difficile d’élaborer une théorie de la gravité similaire aux théories des autres forces. La supersymétrie, théorie fondée sur l’hypothèse qu’il existe pour chaque particule standard connue un partenaire plus massif, pourrait faciliter l’unification des forces fondamentales.

Que sont la matière noire et l’énergie noire ?
La matière que nous connaissons et qui constitue toutes les étoiles et les galaxies ne représente que 4 % du contenu de l’Univers. La chasse aux particules ou aux phénomènes responsables de la matière noire (23 %) et de l’énergie noire (73 %) reste donc ouverte.

Où est passée l’antimatière ?
Lors du Big Bang, matière et antimatière ont dû être produites en quantités égales, mais d’après ce que nous avons pu observer jusqu’à présent, notre Univers n’est constitué que de matière.

Comment était la matière au tout début de notre Univers ? Tous les ans, sur certaines périodes, le LHC fait entrer en collision des ions plomb pour recréer des conditions similaires à celles qui prévalaient immédiatement après le Big Bang. En effet, lorsque des ions lourds entrent en collision à des énergies élevées, ils forment pendant un instant le plasma quarks-gluons, une « boule de feu » constituée de matière chaude et dense qui peut être étudiée par les expériences.

Le plus puissant collisionneur de particules du monde est prêt à redémarrer

Qu’y a t-il de nouveau ?

De nouveaux aimants -1

Sur les 1232 dipôles supraconducteurs qui guident les faisceaux de particules dans le LHC, 18, usés, ont été remplacés.

Des jonctions électriques renforcées – 2

Plus de 10 000 jonctions électriques reliant les dipôles du LHC ont été équipées de shunts – de petits dispositifs métalliques par lesquels une partie du courant (11 000 ampères) peut transiter en cas de défaillance d’une interconnexion.

Des aimants plus sûrs – 3

Les aimants supraconducteurs du LHC bénéficient d’un système amélioré de protection contre les transitions résistives. Les aimants supraconducteurs conduisent l’électricité sans perte d’énergie due à une résistance, ce qui leur permet d’atteindre des champs magnétiques plus élevés. Lors d’une transition résistive, un aimant redevient résistif, libérant ainsi une grande quantité d’énergie. Le système de protection contre les transitions résistives utilisé dans le LHC permet de dissiper cette énergie d’une manière contrôlée lors de l’apparition d’une tension anormale dans un aimant.

Des faisceaux d’énergie plus élevée – 4

L’énergie des collisions qui se produiront dans le LHC en 2015 sera de 13 TeV (soit 6,5 TeV par faisceau) contre 8 TeV (4 TeV par faisceau) en 2012. Cette augmentation de l’énergie permettra aux physiciens d’élargir leur champ de recherches à de nouvelles particules et de valider ou d’infirmer certaines théories.

Des faisceaux plus serrés – 5

Étant donné que la dimension transversale des faisceaux – la largeur des faisceaux – décroît lorsque l’énergie augmente, les faisceaux du LHC seront focalisés plus étroitement, ce qui permettra aux expériences d’étudier davantage d’interactions et de collisions.

Des groupes de protons plus petits mais plus rapprochés – 6

Les groupes, ou « paquets », de protons seront moins denses : chaque paquet contiendra 1,2 x 1011 protons, contre 1,7 x 1011 en 2012. Lorsque des dizaines de collisions se produisent en même temps, il devient difficile de distinguer les particules provenant des différentes collisions. Le fait d’avoir moins de protons lors de chaque collision réduira le problème de l’ « empilement » des événements.

Toutefois, l’intervalle de temps entre deux paquets de protons sera ramené de 50 à 25 nanosecondes. Le LHC produira par conséquent davantage de particules par unité de temps, et davantage de collisions pour les expériences.

Une tension plus haute – 7

Les cavités radiofréquence, qui accélèrent les particules les traversant, fonctionneront à de plus hautes tensions afin que les faisceaux atteignent des énergies plus élevées.

Un système cryogénique amélioré – 8

Pour être supraconducteurs, les dipôles du LHC doivent être maintenus à basse température. Le système cryogénique a été entièrement consolidé : les compresseurs froids ont été réparés, les systèmes de contrôle améliorés et les stations de refroidissement rénovées.

Une électronique qui résiste aux radiations – 9

L’ensemble des systèmes électriques du LHC ont fait l’objet de travaux de maintenance et d’amélioration : plus de 400 000 tests électriques ont été réalisés et des systèmes résistant davantage aux radiations ont été installés.

Un vide plus sûr – 10

L’intérieur du tube de faisceau est maintenu sous vide de façon que le faisceau ne percute pas de molécules sur sa trajectoire. Toutefois, des faisceaux de particules chargées peuvent arracher des électrons de la paroi interne du tube, formant un « nuage d’électrons » interférant avec le faisceau. Pour limiter cet effet, l’intérieur du tube de faisceau a été recouvert d’un revêtement absorbant non évaporable (NEG), un matériau ayant pour effet de maintenir collés les électrons. En certains points, des solénoïdes ont été enroulés autour du tube de faisceau, de manière à empêcher les électrons de dévier de la paroi interne de ce dernier.

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wangfa

Très bel article qui fait du bien aux neurones. Nous attendons les résultats avec impatience même s’ils ne sont compréhensibles que par une frange mince de la population (qui n’en a que faire d’ailleurs). La matière noire se montrera t elle, l’énergie noire brillera t elle? Le secret de la production de la masse sera t il brisé? Rendez vous aux premiers résultats. Mais ce ne sera pas un blockbuster holliwoodien, même pas un film au festival de Sundance.