Le silicium a-t-il trouvé son rival ? Découverte majeure au Technion

Le silicium a-t-il trouvé son rival ? Découverte majeure au Technion

Les chercheurs de la Faculté Andrew et Erna Viterbi d’Électricité et d’Informatique au Technion ont récemment démontré la possibilité de contrôler la conductivité d’un matériau oxydé grâce à un processus d’étirement à l’échelle atomique. Ce contrôle précis de la conductivité ouvre une voie prometteuse pour l’optimisation des commutateurs, qui sont des composants essentiels des puces informatiques.

Le développement de ces technologies pourrait bien constituer une alternative viable au silicium, matériau jusqu’à présent prédominant dans la microélectronique.

La miniaturisation, un enjeu majeur

La performance des circuits intégrés, également connus sous le nom de puces informatiques, a été constamment améliorée grâce à la miniaturisation des transistors. Ces derniers jouent le rôle d’interrupteurs miniatures contrôlant le flux de courants électriques, de manière similaire à un robinet contrôlant l’écoulement de l’eau.

En 1960, Gordon Moore, le fondateur d’Intel, avait prévu que le taux de miniaturisation des transistors permettrait de doubler le nombre de transistors par surface tous les deux ans. Cette prédiction, connue sous le nom de loi de Moore, a défini le taux de miniaturisation pendant des décennies.

Cependant, ce principe rencontre désormais des limites. Selon le professeur Lior Kornblum de la Faculté Viterbi d’Électricité et d’Informatique, la miniaturisation continue des transistors, dont certains ne mesurent que quelques dizaines d’atomes de largeur, rend difficile l’amélioration de leurs performances sans compromettre leur taille. À l’échelle nanométrique, les transistors présentent des comportements nouveaux, différents de leurs prédécesseurs de plus grande taille.

De gauche à droite : Dr Maria Baskin, Prof. Lior Kornblum et Lishai Shoham, dans le laboratoire.

Les matériaux oxydés, une piste prometteuse

Parmi les solutions envisagées pour relever ces défis, l’une des plus prometteuses est la recherche de matériaux alternatifs au silicium. Le groupe de recherche du Professeur Kornblum étudie plusieurs matériaux oxydés dont l’un présente une propriété intéressante : il peut passer d’un état conducteur à un état isolant, et inversement. Les chercheurs espèrent utiliser cette propriété pour développer des transistors plus efficaces.

Pour atteindre cet objectif, il est nécessaire de contrôler avec précision les propriétés du matériau. L’équipe du Technion a réussi à manipuler les propriétés électriques du matériau en contrôlant avec une précision de l’ordre du picomètre (un millième de nanomètre) la distance entre ses atomes. Le Dr. Maria Baskin, gestionnaire de laboratoire, a réussi à accomplir cet exploit en déposant des couches d’atomes les unes sur les autres, créant ainsi des films du matériau.

Structure atomique du vanadate de strontium – illustration de la structure atomique du matériau sous étirement (à droite) et compression (à gauche). Le centre montre l’arrangement atomique réel, tel qu’il a été imagé par un microscope électronique. La partie inférieure illustre l’effet de l’étirement et de la compression sur les niveaux d’énergie du matériau et donc sur la façon dont les électrons sont disposés. En contrôlant ces propriétés, les chercheurs ont l’intention de concevoir ces matériaux pour en faire de futurs transistors.

Étirer pour contrôler

L’étudiante en doctorat Lishai Shoham a, dans sa dernière publication scientifique, dirigé une équipe de douze autres chercheurs provenant de huit institutions de recherche et entreprises situées en Suisse, au Japon, en France et aux États-Unis. L’équipe a démontré qu’en étirant le matériau au niveau atomique, l’augmentation de la longueur des liaisons chimiques entre les atomes change les propriétés électriques : en étirant de moins de 2% la longueur de la liaison atomique, les chercheurs ont réduit la tendance des électrons à sauter d’un atome à l’autre.

Selon Lishai Shoham, “il est étonnant de voir que de tels changements minimes dans la structure atomique du matériau ont un si grand impact sur les propriétés électriques. Ces découvertes sont les fondations scientifiques dont nous avons besoin pour développer les futurs transistors à partir de ces matériaux non conventionnels. Aujourd’hui, je mets en œuvre les résultats de notre recherche sur des matériaux connexes, à partir desquels je développe un nouveau type de transistor.”

En synthèse

Les résultats des recherches menées au Technion représentent une avancée dans la quête d’alternatives au silicium pour la microélectronique. L’utilisation de matériaux oxydés et l’exploitation de leurs propriétés, bien qu’encourageante, n’en sont encore à un stade préliminaire. Le chemin pour parvenir à une application industrielle reste encore long. Néanmoins, ces travaux constituent un pas important vers l’optimisation des transistors, composants essentiels des puces informatiques.

Pour une meilleure compréhension

  • Qu’est-ce qu’un transistor ? Un transistor est un interrupteur miniature qui contrôle le flux de courants électriques, un peu comme un robinet contrôle l’écoulement de l’eau.
  • Qu’est-ce que la loi de Moore ? La loi de Moore, énoncée par Gordon Moore, le fondateur d’Intel, prévoit que le taux de miniaturisation des transistors permet de doubler le nombre de transistors par surface tous les deux ans.
  • Quels sont les défis actuels de la miniaturisation des transistors ? Avec la taille actuelle des transistors, qui ne mesure que quelques dizaines d’atomes de largeur, la miniaturisation continue sans compromettre leur performance devient de plus en plus difficile.
  • Quel est le potentiel des matériaux oxydés ? Les matériaux oxydés ont la capacité de passer d’un état conducteur à un état isolant, et inversement. Les chercheurs espèrent utiliser cette propriété pour développer des transistors plus efficaces.

Légende illustration principale : Le cœur du laboratoire – le système de croissance des oxydes – Credit Technion

“Bandwidth Control and Symmetry Breaking in a Mott-Hubbard Correlated Metal” – DOI : 10.1002/adfm.202302330

[ Rédaction ]

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