L’industrie électronique fait face à un défi de taille : la protection des matériaux semi-conducteurs bidimensionnels contre la corrosion. Une équipe de chercheurs a mis au point un revêtement innovant pour préserver ces composants essentiels et optimiser les performances des dispositifs électroniques.
Les matériaux semi-conducteurs bidimensionnels (2D) se trouvent au cœur des innovations technologiques dans le domaine de l’électronique. Leur épaisseur extrêmement réduite, de l’ordre de quelques atomes seulement, permet une circulation plus rapide et efficace des électrons. Cependant, l’oxydation rapide de ces matériaux constitue un obstacle majeur à leur durabilité et leur fiabilité sur le long terme.
Une équipe de scientifiques, dirigée conjointement par des chercheurs de Penn State, a publié ses travaux dans la prestigieuse revue Nature Communications. Ils ont développé un procédé de synthèse novateur pour produire un revêtement résistant à la corrosion, doté de propriétés idéales pour la conception d’appareils électroniques plus performants et plus durables.
L’oxydation des matériaux 2D : un défi de taille
Joshua Robinson, professeur de science et d’ingénierie des matériaux et co-auteur correspondant de l’étude, a précisé : « L’un des problèmes majeurs auxquels nous sommes confrontés actuellement dans la recherche sur les semi-conducteurs 2D est l’oxydation rapide des matériaux. Il est impératif d’assurer leur fiabilité à long terme car ils sont destinés à être intégrés dans des transistors ou des capteurs censés fonctionner pendant des années. À l’heure actuelle, ces matériaux ne résistent pas plus d’une semaine à l’air libre.«
Les méthodes traditionnelles de protection contre l’oxydation impliquent l’utilisation de revêtements à base d’oxyde. Toutefois, ces procédés font souvent appel à l’eau, ce qui peut paradoxalement accélérer l’oxydation qu’ils visent à prévenir. L’équipe a donc cherché un matériau de revêtement et une méthode permettant d’éviter complètement l’utilisation d’eau.
Le nitrure de bore amorphe : une solution innovante
Les chercheurs ont opté pour le nitrure de bore amorphe (a-BN), une forme non cristalline du nitrure de bore. Ce matériau est reconnu pour sa stabilité thermique élevée et ses propriétés d’isolation électrique, le rendant particulièrement adapté à une utilisation dans les semi-conducteurs.
Joshua Robinson a expliqué : « Le a-BN possède une résistance diélectrique élevée, une mesure indiquant la capacité du matériau à résister à des champs électriques intenses sans se dégrader, un facteur crucial pour des performances électroniques fiables. La résistance diélectrique élevée démontrée par le a-BN est comparable aux meilleurs diélectriques disponibles, et nous n’avons pas besoin d’eau pour le fabriquer.«
Une technique de dépôt révolutionnaire
L’application du revêtement sur les matériaux 2D s’est révélée être un véritable défi. Les matériaux bidimensionnels manquent de liaisons pendantes, qui sont des électrons non appariés à la surface d’un matériau réagissant ou se liant avec d’autres atomes. Un processus standard en une seule étape utilisant des températures élevées pour revêtir les matériaux a donné des revêtements irréguliers et discontinus, bien en deçà de la qualité requise pour le bon fonctionnement des composants électroniques.
Pour surmonter cet obstacle, l’équipe a mis au point une nouvelle méthode de dépôt de couches atomiques en deux étapes. Cette technique implique d’abord le dépôt d’une fine « couche de base » de a-BN à basse température, avant de chauffer la chambre à des températures de dépôt typiques entre 250 et 300 degrés Celsius. Ce procédé a permis aux chercheurs de produire un revêtement a-BN uniforme sur les semi-conducteurs 2D et a conduit à une amélioration de 30% à 100% des performances des transistors, selon leur conception, par rapport aux dispositifs n’utilisant pas le a-BN.
L’avenir de l’électronique se dessine
Les résultats de cette étude ouvrent de nouvelles possibilités pour l’amélioration des performances et de la durabilité des appareils électroniques. Robinson a souligné que même avec sa résistance diélectrique élevée, les chercheurs n’ont fait qu’effleurer le potentiel du a-BN en tant que matériau diélectrique pour les dispositifs semi-conducteurs.
« Nous disposons encore d’une marge d’amélioration, même si le matériau surpasse déjà les autres matériaux diélectriques« , a indiqué pour conclure Joshua Robinson. « Notre objectif principal actuellement est d’améliorer la qualité globale du matériau et de l’intégrer dans des structures complexes que l’on pourrait observer dans l’électronique future.«
Légende illustration : Ces matériaux sont fabriqués à partir de disulfure de molybdène, un semi-conducteur bidimensionnel, cultivé sur une surface de saphir. Les formes triangulaires observées sont alignées grâce à un processus spécial appelé épitaxie, au cours duquel le matériau suit le modèle de la surface sur laquelle il est cultivé. Des couches isolantes, comme le nitrure de bore amorphe, sont ajoutées au cours du processus de fabrication de ces matériaux ultraminces, qui sont utilisés pour construire les dispositifs électroniques de la prochaine génération. Crédit : J.A. Robinson Research Group/Penn State.