Lors de l’examen en deuxième lecture du projet de loi de transition énergétique pour la croissance verte à l’Assemblée nationale, Ségolène Royal a fait adopter plusieurs mesures phares pour la prise en compte du changement climatique par les entreprises et investisseurs.
Ainsi, l’analyse des risques financiers liés aux changements climatiques et les mesures que prend l’entreprise pour les réduire en mettant en œuvre une stratégie bas-carbone dans toutes les composantes de son activité devront figurer dans le rapport du président du conseil d’administration.
Ce rapport est approuvé par le conseil d’administration et par l’assemblée générale des actionnaires, au même titre que les comptes annuels et le rapport de gestion. C’est donc une disposition essentielle pour que tous les décideurs, administrateurs et actionnaires, prennent pleinement conscience des enjeux du changement climatique liés à leur entreprise
C’est également la prise en compte des enjeux climatiques dans le reporting RSE (responsabilité sociétale des entreprises), en élargissant les informations prévues dans le rapport présenté par les organes dirigeants de l’entreprise en assemblée générale des actionnaires aux conséquences sur le changement climatique de l’activité de l’entreprise et de l’usage des biens et services qu’elle produit. Cette extension à l’usage des biens et services qu’elle produit est une avancée majeure.
Le changement climatique sera aussi intégré dans les « tests de résistance » aux crises que doit régulièrement réaliser le système financier, sous le contrôle de la supervision bancaire. Cette mesure met en œuvre un engagement pris par la France au G20.
Pour les investisseurs institutionnels, des objectifs indicatifs d’augmentation de la "part verte des investissements français" et des justificatifs pour les moyens mis en œuvre pour les atteindre seront demandés.
Cette disposition permettra de connaître l’empreinte carbone des actifs des investisseurs institutionnels.
Il s’agit d’une première réponse :
– D’une part, à l’appel du secrétaire général des Nations-Unies et aux réflexions en cours au niveau européen dans le cadre des objectifs de mobilisation des capitaux privés dans le financement du long-terme introduit par la commission sortante ;
– D’autre part, aux initiatives prises depuis plusieurs années par des gérants de portefeuilles d’investissement qui évaluent et publient, sur une base volontaire, l’empreinte carbone de leurs supports d’investissement sur tous les grands marchés financiers (Etats-Unis, Grande Bretagne, Allemagne, Suisse, Chine, etc.). En France, elles ont été testées par plusieurs acteurs de référence, notamment la Caisse d’épargne (sur plus de 100 supports d’épargne en 2008), Cortal Consors-BNP Paribas (sur plus de 400 fonds actions depuis 2010), et l’Etablissement de retraite additionnelle de la fonction publique (ERAFP) qui a publié en mars 2014 l’empreinte carbone de ses investissements en actions cotées. Il s’agit aujourd’hui de généraliser et d’accélérer.
Avec ces dispositions, la France se dote de la législation la plus avancée sur le sujet.
"Je tiens à saluer la contribution des parlementaires, notamment Arnaud Leroy et Denis Baupin. Je veux aussi souligner l’apport de Pascal Canfin et Alain Grandjean, qui s’impliquent sur ce sujet et qui ont contribué à la réflexion. C’est un formidable outil pour l’agenda des solutions de la COP21. Je vais pouvoir m’appuyer sur ce travail collectif pour inviter les autres pays à nous suivre" a déclaré la Ministre de l’écologie, de l’énergie et du développement durable.
Il me semble que la prise en compte des conséquences sur le changement climatique de l’usage des biens et services qu’elle produit, et l’obligation faite de détailler ces conséquences dans le rapport périodique des dirigeants d’entreprises (j’ajouterai « côtées » car je doute que l’on puisse demander ça au boulanger du coin, quoique) montre que les politiques qui nous dirigent considèrent que les entreprises sont désormais responsables de l’usage que l’on fait de leur production. Ceci est nouveau. Si je comprends bien, on va maintenant pouvoir accuser le fabricant d’essence ou de fuel de chauffage des conséquences de l’usage de leurs produits sur le taux atmosphérique de CO2 en déresponsabilisant du même coup, l’usager… joli coup politique. Est-ce pour cela une avancée ? Seul bémol pour les politiques : il se pourrait que l’extension de la loi aux services comme le déclare Madame Royal, n’amène tôt ou tard à considérer aussi la responsabilité, par exemple, des auteurs des lois eux-mêmes lorsqu’il y a quelque chose qui ne marche pas. Avec, pourquoi pas, un effet rétroactif sur une législature par exemple. Ce ne serait qu’un juste retour des choses : « ta loi n’a pas donné les effets escomptés ? tu es responsable et tu sera puni ». (Je rêve).
On ne parle pas de l’usage qui serait fait de leur production mais de l’impact des enjeux climatiques sur leur activité…. Il ne s’agit évidemment pas de pointer du doigt des responsabilités, mais d’exiger que les questions d’énergie, de gaz à effet de serre et de changement climatique fasse partie intégrante des données éclairant la gouvernance des grandes entreprises… Quand à a responsabilité des politiques, je crois que même si elle est réelle, une réaction type « tous pourris » ne fais pas avancer le débat… Et interdire de se tromper ne me semble pas être la meilleure façon de mettre en oeuvre des politique inovantes…!
Lisez bien : il est bien écrit « conséquences sur le changement climatique de l’activité de l’entreprise et de l’usage des biens et services qu’elle produit ». Cette extension est même considérée comme une avancée majeure. Autrement dit, la direction des entreprises doit bien rendre compte aux actionnaires des conséquences climatiques de l’usage de leurs produits (par leurs clients). C’est un pas de plus vers la déresponsabilisation des usagers et le transfert de la responsabilité climatique vers les entreprises : « fautez bonnes gens, l’Etat veille sur vous et désigne les ‘vrais’ coupables ». Que les entreprises aient un devoir moral sur leur production est une évidence, mais que les usagers n’en aient pas constitue une déviation coupable.