Sølvi Normannsen
Cette nouvelle invention pourrait alléger les batteries des véhicules électriques lourds d’aujourd’hui, les rendre plus sûres et augmenter leur autonomie. Les chercheurs à l’origine de cette technologie estiment qu’elle est également idéale pour l’aviation, les voyages spatiaux, les drones et le transport maritime.
Les constructeurs automobiles et tous ceux qui ont besoin de batteries légères, sûres et puissantes sont impatients d’adopter les batteries au lithium-soufre (Li-S). Non seulement elles stockent plus d’énergie et sont plus sûres et plus rapides à charger que les batteries lithium-ion actuelles, mais elles sont également moins chères à fabriquer.
Des batteries qui posent problème
Mais ces batteries miracles de nouvelle génération ont un gros problème : elles s’usent très rapidement. La raison en est qu’elles souffrent de ce qu’on appelle l’effet navette.
« Il s’agit de substances chimiques, les polysulfures de lithium (LPS), qui se forment lorsque la batterie est en fonctionnement. Ces substances se déplacent entre les électrodes, l’anode positive et la cathode négative, dans la batterie. Ce sont ces substances qui provoquent la dégradation rapide des batteries LiS, leur perte de capacité et leur courte durée de vie », déclare Önder Tekinalp, post-doctorant au département de génie chimique de la NTNU.
Cela explique également pourquoi ce type de batterie n’a pas encore été adopté pour nos voitures électriques.
Un nouveau filtre fin et intelligent
Le professeur Liyuan Deng et l’équipe de recherche sur les membranes de la NTNU ont mis au point un revêtement ultrafin doté de propriétés spéciales qui pourraient changer la donne. Ils ont breveté ce revêtement dans le cadre d’un projet appelé HiSep-II. Le revêtement porte le même nom que le projet.
À l’intérieur d’une batterie se trouve également un séparateur. Il sépare les électrodes, ce qui permet à la batterie de fonctionner efficacement et empêche les courts-circuits. Lorsque le revêtement HiSep II est placé à l’extérieur de la paroi, il agit comme un filtre intelligent.
De nombreuses personnes qui travaillent à l’amélioration des batteries lithium-soufre se concentrent sur la chimie pure de la cathode et des électrolytes. Les chercheurs de la NTNU se sont donc plutôt intéressés à la séparation.
« Le revêtement bloque les substances chimiques nocives et laisse passer librement les ions lithium utiles », ajoute M. Tekinalp.
Une batterie plus fine et plus légère
La durée de vie d’une batterie est souvent mesurée en cycles de charge. Un cycle correspond à une charge complète et à une décharge complète. Les tests effectués dans le laboratoire de Gløshaugen montrent que les batteries au lithium-soufre équipées de HiSep-II peuvent augmenter le nombre de cycles de charge de 200 à 1 000. Cela permet de multiplier par cinq la durée de vie de la batterie.
La batterie d’une voiture électrique se compose de nombreux éléments. Les chercheurs affirment que la technologie brevetée permet d’alléger de plus de 200 kilogrammes un bloc-batterie de 800 volts. Cela se traduit par une efficacité nettement supérieure et une autonomie beaucoup plus grande. Le fait que cette nouvelle génération de batteries de voitures électriques soit fabriquée à partir de soufre, qui existe en grande quantité, la rend également peu coûteuse à produire.
« Une véritable alternative pour les voitures électriques »
Önder Tekinalp estime que leurs recherches constituent une avancée majeure qui contribuera à faire des batteries lithium-soufre une véritable alternative pour les voitures électriques.
« Bien que HiSep-II n’ait pas encore été utilisé dans les voitures électriques, nous avons démontré qu’il pouvait gérer l’effet navette. Jusqu’à présent, cela constituait le principal frein à son exploitation commerciale », explique le chercheur.
HiSep-II a breveté le séparateur en 2023 et travaille avec NTNU Technology Transfer (TTO) pour le commercialiser.
En mer, sur terre et dans les airs
« L’objectif est de développer cette technologie à plus grande échelle et de la concéder sous licence à un partenaire industriel afin qu’elle puisse être utilisée dans tous les domaines, des voitures électriques au stockage d’énergie verte », explique Kristina Nydal, responsable du développement commercial chez TTO.
Elle estime que Hi-Sep II peut contribuer à améliorer la sécurité des batteries et affirme que cette technologie est idéale pour des domaines tels que l’aviation, l’aérospatiale, les voitures électriques, les drones et le transport maritime.
« C’est également une alternative intéressante et rentable pour le stockage d’énergie. En particulier lorsque la longévité et la stabilité sont des facteurs cruciaux », ajoute-t-elle.
Le processus de production est respectueux de l’environnement, la technologie est conçue pour être facilement développée à grande échelle et elle peut fonctionner avec les batteries au lithium actuelles.
Nécessité d’une mise à l’échelle et de tests
Avant d’être commercialisée, la technologie doit être testée par des acteurs externes. Le filtre doit être intégré aux batteries Li-S, et ses performances doivent être vérifiées et confirmées par un tiers indépendant. Il est essentiel de démontrer que la technologie est fiable et stable à long terme. Il faut également s’assurer que le nouveau filtre intelligent peut être produit de manière sûre, rentable et avec une qualité constante.
Les procédures de brevet sont coûteuses et doivent être adaptées à l’utilisation industrielle de la technologie. Le TTO recherche actuellement un licencié intéressé qui puisse financer la poursuite du brevetage et de la commercialisation et participer aux tests prévus.
Source : NTNU | Norwegian SciTech