L’identification des infrastructures en dégradation est souvent aussi complexe que leur réparation. Cependant, un nouveau matériau innovant développé par des chercheurs de l’Université de Tohoku simplifie ce processus.
Le matériau réagit aux stimuli mécaniques en enregistrant l’historique des contraintes grâce à un effet luminescent appelé rémanence. Cette information est stockée sur une longue période, et en appliquant le matériau sur les surfaces des structures, les chercheurs peuvent observer les changements de rémanence pour déterminer la quantité de stress subie par le matériau.
«Ce qui rend notre matériau véritablement innovant, c’est qu’il fonctionne sans alimentation électrique, équipement complexe ou observation sur site, et qu’il est facilement combiné avec la technologie IoT,» souligne le professeur Chao-Nan Xu de l’Université de Tohoku, auteur correspondant de l’étude.
Un besoin croissant au Japon
Au Japon, le vieillissement des infrastructures est devenu un problème majeur, entraînant une demande accrue pour de nouvelles technologies de diagnostic qui préviennent les accidents et/ou prolongent la durée de vie des structures.
Les matériaux mécanoluminescents émettent de la lumière lorsqu’ils sont stimulés mécaniquement, et des technologies telles que la détection des fissures et la visualisation des contraintes ont été développées en appliquant ce matériau à la surface des structures. Cependant, la luminescence ne peut être observée qu’au moment de la stimulation mécanique, et les informations sur les stimuli mécaniques passés ne peuvent pas être récupérées.

Des matériaux pour enregistrer l’historique des contraintes
Les chercheurs ont exploré divers matériaux capables d’enregistrer les historiques de chargement mécanique passés. Ces matériaux combinent généralement des matériaux luminescents sous contrainte avec des matériaux photosensibles, créant un système où le matériau émet de la lumière en réponse au stress mécanique, et cette lumière peut être préservée et analysée ultérieurement pour reconstruire l’historique des contraintes.
Ces matériaux rencontrent toutefois plusieurs défis : structures de couches complexes, réactions sombres et performance d’enregistrement à long terme. De plus, bien que certains fluorophores révèlent l’historique des chargements passés lorsqu’ils sont soumis à la chaleur, l’application a été limitée aux matériaux capables de résister à des températures élevées.
Une méthode simple et écologique
Xu et ses collègues ont découvert une méthode simple et respectueuse de l’environnement pour enregistrer les contraintes en utilisant du Li0.12 Na0.88 NbO3 (LNNO) dopé au Pr. Ce LNNO possédait une fonctionnalité d’enregistrement mécanique, ce qui signifie qu’il pouvait récupérer même les événements de stress passés.
Pour récupérer les informations de stress passées, le LNNO est appliqué comme un revêtement sur la surface d’un objet, puis irradié avec une lampe de poche. La rémanence produite par le LNNO peut être mesurée à l’aide de caméras ou de capteurs de lumière. L’étude a démontré que l’image de rémanence correspond quantitativement aux résultats obtenus par l’analyse par la méthode des éléments finis. De plus, la recherche a confirmé que le LNNO conserve ces informations de stress même après une période de cinq mois.
«Nos découvertes devraient atténuer la pénurie de main-d’œuvre dans le diagnostic structurel et réduire les coûts,» ajoute Xu.
Légende illustration : Diagnostic de la santé des structures combiné à la technologie IoT. Crédit : Tomoki Uchiyama, Chao-Nan Xu et al.
Article : « Direct recording and reading of mechanical force by afterglow evaluation of multi-piezo mechanoluminescent material Li0.12Na0.88NbO3 on well-designed morphotropic phase boundary » – DOI: 10.1063/5.0209065