Un projet d’oxycombustion pour des centrales thermiques

Les chercheurs de six instituts de l’Université RWTH à Aix-la-Chapelle testent, dans une ancienne centrale thermique, une centrale au charbon innovante : cette installation fabrique de l’électricité de façon tout aussi efficace que la génération actuelle de centrales, sans émettre de CO2 dans l’air.

Les centrales thermiques fossiles, qui produisent de l’électricité à partir de charbon, de gaz naturel ou de pétrole, ont mauvaise réputation : elles rejettent une grosse quantité de CO2 dans l’atmosphère et polluent l’environnement. Cependant, elles sont essentielles dans le mix énergétique allemand : en effet, les énergies renouvelables ne suffiront pas à combler le besoin en électricité de ces prochaines décennies. Pour atteindre les objectifs européens extrêmement exigeants, les possibilités sont limitées : les centrales déjà existantes doivent être plus propres – et ce, le plus rapidement possible.

C’est la raison pour laquelle les ingénieurs de la RWTH [1] à Aix-la-Chapelle développent, dans le cadre du projet de recherche OXYCOAL-AC, un procédé d’oxycombustion [2] du charbon. Le projet est financé par le Ministère fédéral de l’économie et de la technologie (BMWi) dans le cadre de son initiative COORETEC [3], par le Ministère de l’innovation, de la science, de la recherche et de la technologie du Land de Rhénanie du Nord-Westphalie, et par l’industrie à hauteur de 20% du budget global. Parmi les partenaires industriels se trouvent des entreprises comme RWE Power, E.ON Energie, Hitachi Power Europe, MAN Turbo et Linde.

Contrairement aux centrales thermiques habituelles, le charbon dans la centrale-test d’Aix-la-Chapelle n’est pas brûlé avec de l’air, mais directement avec de l’oxygène. "De même que dans toutes les autres centrales thermiques, la combustion du carbone produit du CO2", explique le Prof. Reinhold Kneer de la chaire de transfert de chaleur et de masse [4], l’un des six instituts de la RWTH impliqués dans le projet de recherche OXYCOAL-AC.

"Cependant, nous essayons d’obtenir du CO2 presque pur dans le gaz résiduel, afin de pouvoir le traiter plus facilement. Dans ce but, nous employons de l’oxygène pur comme comburant à la place de l’air, et parvenons ainsi à obtenir en sortie de la chambre de combustion des fumées très riches en CO2 (diminution considérable de la production d’oxydes d’azotes par exemple). De cette manière, le CO2 est séparé plus facilement et rentablement des autres composés produits dans le gaz d’échappement."

Il est important que l’oxygène nécessaire à la combustion du charbon ne coûte rien et soit créé dans une installation de séparation d’air à haute efficacité énergétique. L’oxygène est produit dans le bâtiment-coeur de l’installation d’Aix-la-Chapelle, grâce à une membrane de céramique moderne. "Nous avons réussi à développer une technique membranaire à haute température, à l’aide de laquelle de l’oxygène est produit à environ 850°C", comme l’explique le Dr. Malte Förster, de la chaire de transfert de chaleur et de masse de la RWTH d’Aix-la-Chapelle. "Notre membrane présente une structure de grille cristalline […]", complète M. Kneer. "Cette membrane n’est perméable qu’aux molécules d’oxygène." L’oxygène est ensuite introduit dans la chambre de combustion. A la sortie, c’est un gaz avec une très haute concentration en CO2 qui est obtenu, qui peut ensuite être comprimé et stocké de façon sûre.

"Dans une première phase, nous avons construit une installation pour tester ce procédé spécial et nous avons développé le module membranaire ; à présent nous testons l’ensemble des composants dans notre installation pilote", commente le Prof. Kneer. Ensuite nous laisserons le soin aux universitaires de réaliser les mesures et nous examinerons le procédé à plus grande échelle technologique." Le Prof. Kneer n’envisage cependant pas une commercialisation du procédé avant 2020.

[1] RWTH : Rheinisch-Westfälische Technische Hochschule Aachen (Université technique de Rhénanie du Nord-Westphalie d’Aix-la-Chapelle) – http://www.rwth-aachen.de/

[2] Oxycombustion : combustion utilisant directement de l’oxygène comme comburant plutôt que simplement de l’air.

[3] COORETEC : Initiative du BMWi pour soutenir la R&D de centrales thermiques durables à combustibles fossiles – http://www.cooretec.de

[4] Lehrstuhl für Wärme und Stoffübertragung

 

BE Allemagne numéro 429 (25/03/2009) – Ambassade de France en Allemagne / ADIT – http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/58326.htm

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Marcel 13

C’est très sympa cette “oxycombustion” .Mais le vrai problème du CO2,c’est son stockage en très grande quantités,de manière réaliste et à un cout acceptable .Il est là le vrai problème du CO2 :LE STOCKAGE à GRANDE ECHELLE ,bon sang de bonsoir !!!!!!!!!  Le reste,c’est de la FRIME …

Denlaf

Que d’efforts consacrés à un procédé qui fonctionnera toujours à partir d’un combustible fossile et dont le rendement sera diminué puisqu’il faudra investir beaucoup d’énergie pour produire cet oxygène pure indispensable au -bon- fonctionnement du procédé. Je ne crois pas que ce soit dans cette direction qu’il faille se diriger.  http://www.denis-laforme.over-blog.com 

pasnaif

de ne pas systématiquement fronder contre toute source d’énergie qui n’est pas à leur goût, que: 1- On enfouit actuellement 1 million de tonnes de CO² par an dans un puits de pétrole en Mer du Nord depuis des années, sans fanfaronnade, et à coût réduit puisque cela sert à extraire un pétrole encore rentable, 2- Que dépenser un peu plus d’énergie (10-15%) en plus – de toutes façons elle vient du charbon – ni ne coûtera autant que le dispendieux et folâtre éolien ni n’émet de CO².

marcob12

L’oxycombustion s’appliquerait plutôt à de nouvelles unités qu’aux centrales actuelles (les modifications seraient un coût supplémentaire). Cela compense-t’il la moindre perte de rendement par rapport à la post-combustion (voir les résultats de “castor” en europe) ? On sait que l’essentiel des gains à réaliser (sur le procédé complet) sont au stade du captage du CO2 et que vraisemblablement les aquifères salins profonds seront sollicités. Les centrales actuelles relachent environ 11/12Gt/an de CO2, on est donc encore loin du Mt/an des démos actuelles. On va maîtriser cette filière (CCS) et la mettre en oeuvre car nous n’avons pas le choix. Elle sera dans 15 ans au pire la clef de voute de centrales thermiques à émissions négatives de CO2 (1kg de CO2 géostocké par kwh de biomasse “brûlée en centrale” qui vont être indispensables pour faire un travail que ni le nucléaire ni les renouvelables “classiques” ne peuvent réaliser. Appliquée à une combustion de biomasse, j’ai ainsi calculé qu’elle permettrait avec la  production française disponible (91MT/an) de géostocker 27% de nos émissions annuelles de CO2 (531Mt en 2007).