Marcio Carvalho, Pontifícia Universidade Católica do Rio de Janeiro (PUC-Rio); Bruna Leopércio, Pontifícia Universidade Católica do Rio de Janeiro (PUC-Rio) et Jorge Antonio Avendaño, Pontifícia Universidade Católica do Rio de Janeiro (PUC-Rio)
Si vous avez déjà utilisé une imprimante à jet d’encre ou effectué un test rapide de COVID, de grossesse ou de glucose, vous avez probablement été en contact avec la microfluidique – une technologie de plus en plus présente dans notre vie quotidienne. Cette science manipule de minuscules volumes de liquides à travers des canaux microscopiques, plus petits qu’une mèche de cheveux. Dans ces circuits, les fluides se déplacent de manière contrôlée et précise. Cela permet d’effectuer des analyses avec des appareils de la taille d’une carte de crédit, ce que l’on appelle le « laboratoire sur puce« .
Développée initialement pour des applications biomédicales, la microfluidique a été utilisée dans des domaines aussi divers que les cosmétiques, les capteurs environnementaux et même la prospection pétrolière et gazière. Les avantages sont considérables : moins de consommation de réactifs, moins de déchets, plus de souplesse et moins de coûts. Au lieu de flacons et d’éprouvettes, il suffit d’une goutte. Au lieu d’attendre des jours, le résultat peut être obtenu en quelques minutes. Cela réduit l’impact sur l’environnement et accélère des processus qui étaient auparavant lents et coûteux.
La taille fait la différence
La performance de ces systèmes est due à la façon dont les fluides se comportent à petite échelle. Dans les microcanaux, les phénomènes physiques associés à l’écoulement des fluides sont très différents de ceux observés dans les canalisations. Au lieu de turbulences, l’écoulement est laminaire, sans oscillations. Deux fluides ne peuvent se mélanger que par diffusion, un processus comparable à la diffusion d’une goutte de colorant alimentaire dans un verre d’eau. De plus, lorsque deux liquides qui ne se mélangent pas (comme l’eau et l’huile) entrent en contact, l’interface entre eux génère une force supplémentaire dans l’écoulement qui a une grande influence sur le mouvement des fluides. Ces caractéristiques font de la microfluidique un outil idéal pour reproduire des phénomènes complexes de manière contrôlée. Même à l’intérieur des roches souterraines où l’on trouve du pétrole.
Les réservoirs de pétrole sur une puce
Le pétrole est extrait de l’intérieur des roches poreuses au moyen de puits qui injectent des fluides (tels que de l’eau ou du gaz) pour pousser le pétrole vers la surface. Le processus de déplacement du pétrole se déroule à une échelle invisible, à l’intérieur des pores de la roche. Et c’est ce qui s’y passe qui définit le succès de l’extraction. L’étude de ces phénomènes à partir des roches réservoirs est extrêmement difficile. C’est pourquoi, en 2011, des chercheurs canadiens et néerlandais ont proposé un nouveau modèle expérimental : les « réservoirs sur puce ». L’idée est simple : utiliser des dispositifs microfluidiques pour simuler, à l’échelle microscopique, l’environnement poreux d’un réservoir de pétrole. Cette approche consomme des volumes minimaux de fluide et permet de visualiser les phénomènes avec une haute résolution spatiale et temporelle, en quelques minutes.
Mouillabilité et trajectoires du pétrole
Au Laboratoire de microhydrodynamique et d’écoulement dans les milieux poreux (LMMP) de l’PUC-Rio, nous menons des recherches, en partenariat avec des compagnies pétrolières, pour comprendre comment améliorer la récupération du pétrole dans les réservoirs.
L’un des étude évalue comment la « mouillabilité » – c’est-à-dire la préférence de la roche pour l’eau ou le pétrole – affecte l’extraction. Une autre étude a examiné la formation et l’utilisation de mousses pour rediriger l’écoulement des fluides à l’intérieur du réservoir. Cela permet de bloquer les voies d’écoulement et d’augmenter le volume de pétrole récupéré. Grâce à la microfluidique, nous avons obtenu des résultats jusqu’à 10 fois plus rapidement qu’avec les expériences traditionnelles, qui utilisent de grands échantillons de roche.
Tests dans des conditions extrêmes
Pour que ces études aient une plus grande application pratique, il est également nécessaire de simuler les conditions extrêmes de température et de pression élevées dans les puits de pétrole. C’est pourquoi notre laboratoire a adopté une infrastructure spécifique pour effectuer des tests avec des micropuces dans ces conditions.
Ainsi, l’un des projets actuels étudie comment les fluides de forage utilisés pour ouvrir les puits peuvent endommager la roche et rendre difficile le passage du pétrole. Ce que nous appelons « formation-damage-on-a-chip« .
En outre, nous évaluons également quel dosage minimal de substances chimiques est efficace pour prévenir la formation d’incrustations minérales à l’intérieur des pipelines. Grâce à la microfluidique, ces tests, qui prendraient normalement des semaines dans les tests conventionnels, peuvent être réalisés en quelques jours, avec une grande précision et moins de déchets.
Capsules intelligentes
Une autre avancée en cours au laboratoire dans le domaine de la microfluidique est la production de microcapsules de taille contrôlée, capables de libérer des substances chimiques de manière ciblée. Elles contiennent, par exemple, des inhibiteurs de corrosion enveloppés dans des membranes sensibles à la température, au pH ou à d’autres déclencheurs spécifiques, qui leur permettent d’être libérés à l’endroit et au moment voulus.
En eaux profondes, comme dans les puits pré-salifères, les basses températures rendent difficile l’injection de certains additifs. Notre solution a consisté à encapsuler les produits et à ne les ouvrir qu’au contact de l’huile chaude provenant du réservoir. Résultat : moins de pertes, moins d’impact sur l’environnement et une distribution plus précise de la substance. Cette technologie est à un stade avancé de développement et a déjà donné naissance à une start-up technologique, MicroDOTs, qui a vu le jour au sein de la PUC-Rio pour permettre à l’innovation d’être mise sur le marché.
Le futur sur une puce
La popularisation de la microfabrication a élargi les possibilités de la microfluidique, rendant son application dans différents contextes plus viable. Que ce soit en médecine ou dans le secteur de l’énergie, ce qui était autrefois limité à des environnements hautement contrôlés et coûteux peut désormais être reproduit avec une plus grande agilité, une plus grande précision et un moindre impact sur l’environnement.
Notre recherche montre qu’il est possible d’étudier des phénomènes complexes d’extraction de pétrole d’une manière plus accessible et plus efficace. Ainsi, nous cherchons à contribuer à la production de connaissances et à l’avancement de solutions innovantes dans des secteurs stratégiques, en accord avec les exigences d’une plus grande durabilité dans l’industrie.
La recherche montre qu’il est possible d’étudier des phénomènes complexes d’extraction du pétrole d’une manière plus accessible et plus efficace.
Marcio Carvalho, Professor Titular e coordenador do Laboratório de Micro-hidrodinâmica e Escoamento em Meios Porosos, no Departamento de Engenharia Mecânica, Pontifícia Universidade Católica do Rio de Janeiro (PUC-Rio); Bruna Leopércio, doutora em Engenharia mecânica pela PUC-Rio e pesquisadora do Laboratório de Micro-hidrodinâmica e Escoamento em Meios Porosos, no Departamento de Engenharia Mecânica, Pontifícia Universidade Católica do Rio de Janeiro (PUC-Rio) et Jorge Antonio Avendaño, doutor em Recuperação Aprimorada de Petróleo pela Universidade Gustave-Eiffel e pesquisador do Laboratório de Micro-hidrodinâmica e Escoamento em Meios Porosos, no Departamento de Engenharia Mecânica, Pontifícia Universidade Católica do Rio de Janeiro (PUC-Rio)
Cet article est republié à partir de The Conversation sous une licence Creative Commons. Lire l’article original.