Sur le campus de l’université technique de Brunswick, en Allemagne, une innovation technologique silencieuse redéfinit les méthodes de construction. Lors de l’inauguration du « Digital Construction Site » cette semaine, COBOD International, entreprise suisse spécialisée dans l’impression 3D de bâtiments, a présenté en collaboration avec l’Institut de design structurel (ITE) le premier robot multifonctionnel commercialisé pour le secteur du bâtiment. Ce dispositif combine une imprimante 3D à une unité télescopique verticale équipée d’un bras robotique, capable non seulement d’imprimer des structures complexes en béton projeté, mais aussi d’accomplir des tâches variées comme le montage de blocs préfabriqués ou l’application d’isolants.
Points forts |
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Lors d'un événement de lancement en Allemagne, COBOD International et l'Université technique de Brunswick ont présenté le premier robot de construction multifonctionnel de COBOD. L'imprimante à portique 3D BOD2 de COBOD est non seulement capable d'imprimer du béton, mais peut également, à l'aide d'une unité télescopique verticale nouvellement développée équipée d'un bras robotique COBOD à son extrémité, pulvériser du béton, appelé béton projeté. L'unité télescopique a été développée en collaboration avec l'Institut pour la conception structurelle (ITE) et vise à étendre le système COBOD pour une utilisation avec le procédé d'impression 3D à béton projeté (SC3DP). Le système d'impression installé sur le chantier numérique (DSC) de l'université technique de Brunswick est ainsi la première concrétisation de la vision de COBOD, qui consiste à développer et à fournir des robots de construction multifonctionnels capables d'effectuer automatiquement plusieurs tâches de construction, et pas seulement l'impression de béton. |
Un outil modulaire pour une automatisation étendue
Le système repose sur la plateforme BOD2 de COBOD, déjà utilisée dans des projets architecturaux audacieux. La nouveauté réside dans l’intégration d’une unité télescopique verticale permettant une amplitude de 3 mètres, associée à un bras articulé. Cette configuration permet d’accéder à des surfaces déjà imprimées et d’y appliquer des traitements précis.
Henrik Lund-Nielsen, fondateur et directeur général de COBOD International, a déclaré lors de l’événement : « Depuis des années, nous avons la vision de fabriquer des robots de construction multifonctionnels sur la base de nos imprimantes de construction 3D. Je suis très fier de voir ici la première matérialisation de notre vision. Cette nouvelle technologie nous permet d’automatiser bien d’autres processus de construction que la simple impression de murs en béton..«
La modularité du bras robotique est centrale : des outils comme des pulvérisateurs de peinture, des systèmes de ponçage ou des préhenseurs peuvent être montés, transformant l’imprimante en une machine polyvalente. Lors de la démonstration, le robot a assemblé des blocs de béton cellulaire avec une précision millimétrique, illustrant sa capacité à intégrer des matériaux traditionnels dans un processus automatisé.

Une réponse aux défis économiques et environnementaux
Pour Harald Kloft, professeur en conception structurelle à l’ITE, « Notre partenariat avec COBOD est un pas décisif vers le chantier numérique du futur. L’impression 3D permet des processus automatisés et contrôlés numériquement pour des tâches simples ou très complexes, comme la fabrication de murs renforcés à double courbure. La capacité de fabriquer des solutions de construction complexes, personnalisées, efficaces en termes de matériaux et à faible taux de déchets rend l’impression 3D idéale pour l’industrie de la construction, car elle réunit des aspects économiques, environnementaux et sociaux, tels que la réduction du stress physique.«
L’enjeu est triple : réduire les coûts, pallier la pénurie de main-d’œuvre et minimiser l’impact environnemental. Selon les données fournies par COBOD, l’impression 3D pourrait réduire de 30 à 50 % la consommation de béton par rapport aux méthodes classiques, en évitant les gaspillages liés à la découpe ou au dosage.

Le projet « Digital Construction Site » : un laboratoire en conditions réelles
Le développement de ce robot s’inscrit dans le cadre du projet interdisciplinaire mené par TU Braunschweig, intitulé « Le chantier numérique – L’industrie de la construction 4.0, clé d’une industrie de la construction numérique et durable« . Ce programme réunit quatre instituts universitaires (Structures, Génie civil, Géodésie, Matériaux) pour tester des technologies numériques sur des chantiers pilotes.
Norman Hack, chercheur à l’ITE, souligne : « Ce lancement est plus qu’une étape de recherche, c’est le résultat d’une étroite collaboration avec un partenaire industriel de premier plan dans le domaine de l’impression 3D. Le système multifonctionnel nous permet de développer et de tester des concepts entièrement nouveaux de fabrication numérique directement sur le site. Avec cette nouvelle génération de technologie robotique, nous explorons la construction hybride, multi-matériaux et multi-procédés, ce qui nous permet d’appliquer chaque matériau et processus là où il est le plus performant, et de construire plus efficacement, avec plus de précision et d’adaptabilité.«

Défis et perspectives
Malgré ses promesses, le robot doit encore prouver son efficacité dans des conditions réelles. Des tests sont prévus en Allemagne pour évaluer sa performance, sa fiabilité et son intégration dans des équipes mixtes humaines/machines. Helga Kühnhenrich, représentante du BBSR, a rappelé lors de l’événement que « L‘accent mis sur l’automatisation dans l’industrie de la construction est essentiel pour réduire les coûts et les besoins en main-d’œuvre.«
Les obstacles réglementaires et techniques restent cependant nombreux. Les normes de sécurité devront être adaptées, et la formation des professionnels sera cruciale pour éviter une fracture technologique.
Si les premiers résultats sont encourageants, cette innovation pourrait transformer non seulement la construction résidentielle, mais aussi des secteurs comme l’infrastructure ou la rénovation. L’impression de structures courbes, autrefois coûteuse, devient réalisable sans surcoût, ouvrant des possibilités créatives pour les architectes.
À l’horizon 2025, COBOD prévoit de déployer ses robots dans plusieurs pays européens et en Amérique du Nord. Le succès dépendra toutefois de la capacité des acteurs à adopter ces outils et à les intégrer dans des processus existants. Comme le rappelle Henrik Lund-Nielsen, « nous ne remplaçons pas les artisans, mais nous redéfinissons leur rôle.«
Le robot multifonctionnel de COBOD et TU Braunschweig montre peut-être une transition vers une construction plus digitale, durable et productive. S’il parvient à surmonter les défis techniques et organisationnels, il pourrait devenir un pilier des chantiers du XXIᵉ siècle, où l’automatisation et l’ingéniosité humaine se complètent plutôt qu’elles ne s’opposent.
Source : COBOD