Le nouveau rapport du Planetary Health Check 2025, publié par l’Institut de Potsdam pour la recherche sur l’impact du climat, vient de dresser un diagnostic assez sombre : sept des neuf « limites planétaires » sont désormais franchies, et toutes poursuivent une trajectoire aggravante. L’étude révèle que l’acidification des océans vient de rejoindre la liste des seuils dépassés, tandis que le climat, la biodiversité ou les cycles de l’eau glissent toujours plus vers des zones à haut risque. Seules la couche d’ozone stratosphérique et la charge globale en aérosols demeurent, provisoirement, dans un espace sûr.
Le rapport propose aussi de nouvelles cartes d’anomalies climatiques, dresse l’inventaire des événements extrêmes de 2024-25 et présente une initiative scientifique destinée à suivre ces indicateurs en temps réel.
Un tableau de bord planétaire dans le rouge
Selon les auteurs, « sept limites sur neuf sont dépassées », un signal comparé à « des voyants vitaux qui clignotent ». Parmi les seuils franchis :
- Changement climatique : la concentration de CO₂ atteint 423 ppm, loin du plafond de 350 ppm, et le forçage radiatif grimpe à +2,97 W/m² (seuil de sécurité +1 W/m²).
- Intégrité biosphérique : le taux d’extinction reste supérieur à 100 E/MSY, dix fois la limite tolérable, tandis que l’appropriation humaine de la productivité primaire atteint 30% (seuil 10%).
- Changement d’usage des terres : la couverture forestière mondiale recule à 59%, bien sous le plancher de 75% jugé sûr.
- Cycles du phosphore et de l’azote : l’apport d’engrais perpétue un excès chronique, trois fois supérieur pour le phosphore, plus du double pour l’azote.
- Acidification des océans : avec un état de saturation en aragonite (Ωarag) de 2,84, la frontière « océan » est franchie pour la première fois.

Focus sur 2025 : l’océan, notre bouclier menacé
Le rapport consacre un chapitre entier à « L’océan, gardien méconnu de la santé planétaire ». Stockant la majeure partie de la chaleur excédentaire et près du quart des émissions de CO₂ d’origine humaine, la mer agit comme amortisseur climatique. Or l’augmentation conjointe de la température, de l’acidité et des pollutions compromet ce rôle régulateur, avec un risque de basculements irréversibles comme le blanchissement massif des coraux, la perturbation des courants de circulation profonde ou la libération accélérée de méthane arctique.
Une analyse d’attribution détaille comment les tempêtes, méga-feux ou inondations de 2024-25 se sont vus amplifiés par l’interaction entre le dérèglement climatique, la déforestation et l’usage de l’eau. Ces synergies, observent les rédacteurs, accentuent la mortalité et les pertes économiques, en particulier dans les régions déjà vulnérables. « Les catastrophes ne sont plus le fruit du seul climat ; elles résultent d’un faisceau de frontières planétaires dépassées », souligne Johan Rockström, co-auteur de l’étude.
Vers un « Planetary Mission Control »
Pour ne plus naviguer à vue, les scientifiques lancent la « Planetary Boundaries Initiative », un dispositif mêlant bases de données, modélisation et intelligence artificielle. L’objectif sera d’alimenter en continu un « PBAnalyzer » capable d’identifier les points de bascule à venir et de proposer des leviers d’action aux décideurs. « La fenêtre pour revenir dans l’espace sûr se rétrécit, mais elle n’est pas encore fermée », insiste Levke Caesar, première autrice du PHC 2025.
L’édition 2025 confirme l’escalade des pressions anthropiques (du fait de l’homme) sur l’ensemble du système Terre. En ajoutant l’océan à la liste des limites franchies, elle rappelle que l’inaction ferme peu à peu la porte d’un retour à la stabilité holocène.
Le rapport « A Scientific Assessment of the State of the Planet » de Planetary Health Check 2025 est disponible à la lecture : ( .pdf )
Source : Planetary Health Check